Des scientifiques du NIH ont observé des anomalies au niveau des vaisseaux sanguins dans plusieurs régions cérébrales chez des personnes mortes du coronavirus. Elles seraient dues à une réaction inflammatoire délétère. 


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    Entre Mars et Juillet 2020, 19 personnes sont mortes de la Covid-19 aux États-Unis, une goutte d'eau dans le nombre de décès que connaissait le pays à ce moment. Mais ces 19 personnes ont permis de faire avancer les connaissances scientifiques sur les dégâts induits par la maladie dans le cerveau. Après leur mort, on a prélevé des échantillons de tissus de leur bulbe olfactif et de leur tronc cérébral. Ces derniers ont été envoyés aux scientifiques du National Institutes of Health (NIH).

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    C'est probablement l'une des routes d'invasion du cerveau pour le coronavirus

    Chaque échantillon a d'abord été observé grâce à une technique d'imagerie par résonance magnétiqueimagerie par résonance magnétique (IRM) de pointe, la résonance magnétique microscopique, qui permet d'obtenir des images dont la résolutionrésolution est de l'ordre du micromètremicromètre (25 µm pour les tissus du bulbe olfactif et 100 µm pour les structures du tronc cérébral). 

    Les images ainsi obtenues révèlent la présence de zones anormales, claires (zones d'hyper-intensité) pour 9 patients, et des zones sombres (zones d'hypo-intensité) dans le bulbe olfactif et le tronc cérébral (plus précisément dans le pont) pour les 10 autres.

    L'IRM à haute résolution du tronc cérébral d'un patient décédé du Covid-19. La flèche rouge de gauche montre une zone d'hyper-intensité (tache claire) et l'autre flèche, une zone d'hypo-intensité (tache sombre). © NIH, NINDS
    L'IRM à haute résolution du tronc cérébral d'un patient décédé du Covid-19. La flèche rouge de gauche montre une zone d'hyper-intensité (tache claire) et l'autre flèche, une zone d'hypo-intensité (tache sombre). © NIH, NINDS

    Des vaisseaux sanguins endommagés dans le cerveau

    Des analyses plus poussées ont mis en évidence les responsables de ces anomalies. Les régions d'hyper-intensité sont caractérisées par des vaisseaux sanguins particulièrement fins, ainsi que par la présence de fuite de fibrinogène, une des protéinesprotéines sanguines de la coagulationcoagulation. Des microgliesmicroglies actives (les cellules immunitaires du cerveau), des macrophagesmacrophages et des lymphocyteslymphocytes T cytotoxiquescytotoxiques sont également présents dans l'espace périvasculaire et dans la lumièrelumière des vaisseaux. Cet environnement inflammatoire a pu participer à la dégradation des vaisseaux sanguins.

    Les régions d'hypo-intensité présentent un profil différent. Dans celles-ci, les vaisseaux sanguins sont encore en bon état, mais des fuites de fibrinogène ont aussi été identifiées ainsi que des caillots de sangcaillots de sang qui obstruent les vaisseaux. Les scientifiques pensent que ce sont les conséquences de microhémorragies. Au contraire des zones d'hyper-intensité, aucune cellule immunitaire n'a été observée ici.

    Des résultats inattendus

    Les scientifiques du NIH, qui publient leur conclusion sous la forme d'une correspondance dans The New England Journal of Medicine, se disent surpris de ces observations.

    On s’attendait à voir des dommages causés par un manque d’oxygène

    « Nous étions totalement surpris. Initialement, on s'attendait à voir des dommages causés par un manque d'oxygène. À la place, nous avons observé des zones de dommages associées aux accidentsaccidents vasculaires cérébraux et aux maladies neuro-inflammatoires », explique Avindra Nath, médecin au National Institue of Neurological Disorders and Stroke de Bethesda, impliqué dans ce travail.

    Avindra Nath et ses collègues ont tenté de débusquer le SARS-CoV-2SARS-CoV-2 dans les échantillons, sans succès. Plusieurs explications sont possibles : les scientifiques évoquent la disparition du virusvirus après la mort des patients, ou encore sa présence en trop faible quantité pour être détectable.

    Ce travail met en lumière de nouveaux dommages causés par la Covid-19, mais le nombre d'échantillons testés est trop modeste pour conclure qu'ils sont une des caractéristiques neurologiques de la maladie. Néanmoins, ces éléments pourront aiguiller les médecins qui observent les mêmes anomalies chez leurs patients.


    Inflammation, état délirant : le Covid-19 semble lié à des dommages cérébraux sévères

    Article publié le 10 juillet 2020 par Julie KernJulie Kern

    L'infection par le SARS-CoV-2 engendre des problèmes de santé divers et parfois graves. Des médecins anglais décrivent plusieurs cas de différents dommages cérébraux observés chez des certains patients souffrant du Covid-19Covid-19. L'un d'entre eux, habituellement rare, a vu sa prévalenceprévalence augmenter durant la pandémiepandémie

    Régulièrement, les médecins en apprennent plus sur la maladie complexe qu'est le Covid-19. L'infection par le coronaviruscoronavirus SARS-CoV-2 est le déclencheur d'une réaction inflammatoire intense qui abîme plusieurs organes. Des chercheurs de l'University College de Londres décrivent dans une publication parue dans Brain plusieurs cas de patients atteint du Covid-19 présentant une inflammationinflammation cérébrale rare.

    Les affections neurologiques ne sont pas toujours liées à la gravité des symptômes respiratoires

    « Nous avons identifié un nombre plus important de personnes avec des affections neurologiques, comme une inflammation cérébrale, qui ne sont pas toujours corrélées à la gravitégravité des symptômessymptômes respiratoires », explique le docteur Michael Zandi dans un communiqué de presse.

    Scanner cérébral de trois patients de l'étude atteint de dommages cérébraux. © Paterson et al. <em>Brain</em> 2020
    Scanner cérébral de trois patients de l'étude atteint de dommages cérébraux. © Paterson et al. Brain 2020

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    Une inflammation aiguë du cerveau

    Cette étude a été menée sur 43 patients âgés de 16 à 65 ans, pris en charge au National Hospital for Neurology and Neurosurgery à Londres. L’infection au SARS-CoV-2 a été avérée pour 29 d'entre eux, pour les autres, elle n'a pas été formellement confirmée mais reste probable pour 8 personnes ou possible pour 6 personnes, selon les auteurs de l'étude. Parmi les affections cérébrales identifiées dans ce groupe, une en particulier inquiète les médecins, l'encéphalomyélite aiguë disséminée ou EMAD. Habituellement, les médecins londoniens ne traitent qu'un seul patient chaque mois pour cette affection, mais les cas ont augmenté avec l'épidémieépidémie de coronavirus. Sur 43 cas considérés dans l'étude, 12 souffrent d'une EMAD.

    Ils rapportent aussi le cas d'un patient admis à l'hôpital avec, pour seul symptôme, une affection neurologique et aucun syndromesyndrome respiratoire aiguë. Il a été testé positif au coronavirus par la suite.

    Appelée aussi encéphaliteencéphalite post-infectieuse, l'EMAD est connue pour apparaître entre 2 à 30 jours après une infection virale. Elle est caractérisée par une inflammation de la substance blanchesubstance blanche du cerveau entraînant la dégradation de la gaine de myélinegaine de myéline qui entoure les axonesaxones des neuronesneurones.

    L'EMAD semble être gouvernée par une réaction trop importante du système immunitairesystème immunitaire. L'analyse du liquide céphalorachidienliquide céphalorachidien des patients Covid-19 va également dans ce sens, aucun virionvirion n'y a été retrouvé. Le coronavirus n'attaquerait donc pas directement le cerveau. Les mécanismes précis qui conduisent à l'apparition de l'EMAD après une infection au coronavirus doivent encore être éclaircis.

    Le cerveau est composé de substance grise qui regroupe le corps cellulaire des neurones, et de la substance blanche qui regroupe les axones, myélinisés, ou non, des neurones. © AboutKidsHealth
    Le cerveau est composé de substance grise qui regroupe le corps cellulaire des neurones, et de la substance blanche qui regroupe les axones, myélinisés, ou non, des neurones. © AboutKidsHealth

    Accident vasculaire cérébral et autres dommages cérébraux liés au Covid-19

    Les autres patients considérés présentent des problèmes tout aussi inquiétants. Dix d'entre eux ont souffert d'une encéphalopathie transitoire accompagnée pour certains d'épisodes de déliredélire. Huit autres ont fait un accident vasculaire cérébrale et les huit derniers ont présenté des symptômes comparables au syndrome de Guillain-Barrésyndrome de Guillain-Barré.

    Voilà encore une nouvelle piste à explorer parmi la liste, déjà longue, des conséquences sur l'organisme du Covid-19, une maladie qui n'en finit pas de se complexifier. D'autres études seront nécessaires pour comprendre les conséquences neurologiques à long terme de l'infection au SARS-CoV-2.


    Quels impacts du SARS-CoV-2 sur le cerveau ?

    Article publié le 26 avril 2020 par Futura avec l'AFP-RelaxNews

    La fièvrefièvre, la toux, l'essoufflement ou encore la perte d'odoratodorat sont les symptômes connus du Covid-19. Des chercheurs s'interrogent à présent de l'impact du SARS-CoV-2 sur le cerveau et le système nerveux, certains patients atteints du virus présentant une perte de repères et des signes de confusion.

    Les médecins de New York traitant des patients atteints de Covid-19 observent de plus en plus qu'avec la fièvre, la toux et l'essoufflement, un autre symptôme apparaissait. Certains éprouvent de la confusion, au point de ne pas savoir où ils sont, ni quelle est l'année actuelle. Cette perte de repères est parfois liée au manque d'oxygène dans le sang, mais chez certains malades le niveau de confusion semble être hors de proportion par rapport au niveau d'affection de leurs poumonspoumons. Pour Jennifer Frontera, neurologue à l'hôpital universitaire Langone à Brooklyn, la question se pose de l'impact du nouveau coronavirus sur le cerveau et le système nerveux.

    Des patients atteints du Covid-19 présentent une perte de repères et des signes de confusion. Les neurologues ne sont pas surpris que le SARS-CoV-2 puisse affecter le cerveau. © fizkes, Adobe Stock
    Des patients atteints du Covid-19 présentent une perte de repères et des signes de confusion. Les neurologues ne sont pas surpris que le SARS-CoV-2 puisse affecter le cerveau. © fizkes, Adobe Stock

    De possibles inflammations du cerveau

    Des études commencent à décrire le phénomène. Dans la revue de l'Association de médecine américaine (Jama), la semaine dernière, des médecins ont rapporté que 36 % de 214 patients chinois avaient des symptômes neurologiques, allant de la perte d'odorat à des douleursdouleurs nerveuses, et jusqu'à des crises convulsives et des accidents vasculaires cérébraux (AVCAVC).

    Dans le New England Journal of Medicine, la revue médicale américaine la plus cotée, des médecins français à Strasbourg ont décrit que plus de la moitié de 58 patients en réanimation étaient confus ou agités. Des scannersscanners des cerveaux ont révélé de possibles inflammations.

    « Tout le monde dit que c'est un problème de respiration, mais cela affecte aussi quelque chose qui nous est très précieux, le cerveau, dit à l'AFP S. Andrew Josephson, chef du département de neurologieneurologie à l'université de Californie San Francisco. Si vous vous sentez confus, si vous avez des problèmes pour réfléchir, ce sont de bonnes raisons de consulter un médecin, ajoute-t-il. La vieille idée selon laquelle il ne faut venir que si on est à bout de souffle n'est sans doute plus valable. »

    Les virus peuvent affecter le cerveau de deux façons

    Les virologues ne sont pas totalement surpris que le nouveau coronavirus, SARS-CoV-2, puisse affecter le cerveau et le système nerveux, car ce lien a été observé avec d'autres virus, notamment le virus du sidasida, le VIHVIH. Les virus peuvent affecter le cerveau de deux façons principales, explique Michel Toledano, neurologue à la Mayo Clinic dans le Minnesota. La première est par le déclenchement d'une réponse immunitaire anormale appelé « orageorage de cytokinecytokine », qui provoque une inflammation du cerveau : cela s'appelle une encéphalite auto-immune. La seconde est par une infection directe du cerveau : cela s'appelle une encéphalite virale. Le cerveau est protégé par ce qu'on appelle la barrière hémato-encéphaliquebarrière hémato-encéphalique : son rôle est de bloquer les substances intruses, mais elle peut être percée.

    Certains émettent l'hypothèse que le neznez pourrait être la voie d'accès au cerveau, puisque la perte d'odorat est commune à de nombreux malades du Covid-19. Mais ce n'est pas vérifié, et beaucoup de patients perdant l'odorat n'ont pas de problèmes neurologiques sérieux.

    Des troubles durables ?

    La piste principale est en fait celle de la réponse immunitaire en surchauffe. Pour en avoir le cœur net, il faudrait détecter le virus dans le liquide cérébrospinal. Cela a été fait une fois, chez un Japonais de 24 ans, dont le cas a été décrit dans l'International Journal of Infectious Disease. Il a souffert de confusion et de convulsionsconvulsions et l'imagerie de son cerveau montrait des inflammations. Mais le test n'est pas encore validé et les scientifiques restent prudents.

    Pour éclaircir ces mystères, Jennifer Frontera, qui enseigne à l'école de médecine de l'université de New York, collabore à un projet de recherche international visant à standardiser la collecte de données. Sa propre équipe a consigné des cas de crises convulsives chez des patients Covid-19 qui n'en avaient jamais fait avant de tomber malades. Les chercheurs ont également observé de minuscules hémorragies cérébrales qualifiées d'« inédites ». Ils veulent aussi prélever le liquide cérébrospinal d'un quinquagénaire dont la matièrematière blanche du cerveau est gravement affectée. Mais ces prélèvements, tout comme les IRM, sont difficiles à faire sur des patients sous respirateur artificiel. Et comme la majorité meurt, on étudie mal les dommages neurologiques.

    Nous voyons beaucoup de patients dans des états de confusion

    Ceux qui survivent finissent en revanche par consulter des neurologues. « Nous voyons beaucoup de patients dans des états de confusion », dit à l'AFP Rohan Arora, neurologue à l'hôpital Long Island Jewish Forest Hills. Il affirme que 40 % des rescapés du coronavirus sont concernés. On ignore si ces troubles sont durables. Le passage en réanimation est, en soi, créateur de confusion, en particulier à cause des médicaments. Mais le neurologue constate que le retour à la normale, pour les patients Covid, semble prendre plus longtemps que pour ceux qui ont survécu à une crise cardiaquecrise cardiaque ou un AVC.