Comme on pouvait le craindre au départ, le comportement supraconducteur annoncé dans des conditions ambiantes par des physiciens sud-coréens pour un composé baptisé LK 99 n'est probablement pas réel. On pense toutefois savoir ce qui avait vraiment été observé et causé initialement la perplexité de la communauté scientifique qui retenait un peu son souffle, tant les promesses d'une révolution technologique avec ce genre de matériau étaient grandes si il était vraiment le Graal recherché pour la supraconductivité. On ne peut qu'être 100 % d'accord avec ce que dit aujourd'hui de cette saga le physicien Julien Bobroff, professeur à l'Université Paris-Saclay (Orsay).


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    C'est en général au biologiste Thomas Henry Huxley qu'est attribuée cette réflexion : « La tragédie de la science... c'est de belles théories détruites par des faits horribles ». Mais en fait tous les scientifiques dignes de ce nom ont appris à vivre avec  sans plus avoir d'états d'âmes dans la majorité des cas, sachant bien qu'il s'agit en fait de la marche normale de la science où justement pour avancer on accepte de voir le monde tel qu'il est et pas tel qu'on voudrait qu'il soit, en refusant d'exercer son esprit critique et d'accepter le verdit des expériences.

    Même si le buzz concernant la possible supraconductivité dans des conditions ambiantes du composé baptisé LK 99  avait parfois des aspects agaçants, il a au moins servi à montrer sur les réseaux sociauxréseaux sociaux comment les scientifiques procèdent comme à leur habitude selon des règles de partages ouverts de la connaissance et de discussions critiques bien dans l'esprit de la philosophie des sciences de Karl Popper, philosophie adoubée par aux moins deux prix Nobel, Jacques MonodJacques Monod et John Eccles.

    Des effets magnétiques et électriques non exotiques

    Si l'on n'a pas de raisons de penser que les physiciensphysiciens sud-coréens Lee Seok-bae et Kim Ji-hoon ont fraudé en exposant leurs résultats intriguants concernant le composé phosphaté et cuivré LK 99  il semble de plus en plus probable que les effets qu'ils ont observés ne sont en rien des manifestations de la supraconductivité et que l'on sait maintenant quels phénomènes physiques étaient derrière eux, faisant disparaitre tout espoir d'une révolution technologique de grande ampleur.

    Tout n'est peut-être pas encore joué mais on peut raisonnablement être complètement d'accord, à nouveau, avec les explications et les commentaires faits sur l'affaire LK 99 par le physicien Julien Bobroff, professeur à l'Université Paris-Saclay (Orsay) et grand spécialiste de la supraconductivité.  

     


    LK-99, le nouveau flop de la supraconductivité à température ambiante ?

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 09/08/2023

    Rien n'est encore joué, mais comme on pouvait le craindre au départ, des pré-publications sur arXivarXiv venant de chercheurs et de laboratoires sérieux échouent à retrouver le comportement supraconducteur annoncé dans des conditions ambiantes par des physiciens coréens. La sobriété est encore de mise et la patience aussi en ce qui concerne ce qu'il faut penser de la révolution technologique bien trop vite annoncée et commentée...

    Cela fait déjà presque un siècle que nous ne sommes plus du temps de Wilhelm RöntgenWilhelm Röntgen, Henri BecquerelHenri Becquerel ou  Heike Kamerlingh Onnes. La Nature est telle qu'on ne fait plus depuis longtemps de découvertes révolutionnaires en physique aussi facilement que l'ont été celles des rayons X, de la radioactivité ou de la supraconductivité. Sachant cela, on sait aussi depuis un moment déjà qu'il n'est guère justifié de trop s'exciter quand une équipe fait une annonce spectaculaire.

    On peut le faire raisonnablement quand il s'agit d'une équipe dont la réputation est déjà sérieuse et qu'elle a visiblement fait déjà beaucoup de travail pour vérifier ses affirmations. C'était le cas pour les neutrinos que l’on croyait capables de dépasser la vitesse de la lumière ou la mise en évidence des modes B de la théorie de l’inflation dans le rayonnement fossile.

    Hélas, ces découvertes annoncées ont fait un flop, s'ajoutant à bien d'autres percées que l'on pensait avoir faites au cours des dernières décennies comme, par exemple, celle de la mythique fusion froide.


    Skates volants, super-ordinateurs, IRM... la supraconductivité peut servir à des tas de choses. Elle pourrait même nous aider à aller sur Mars ! © L'Esprit Sorcier TV

    On avait donc toutes les raisons de ne pas trop suivre l'excitation bien palpable sur TwitterTwitter à l'annonce de la découverte pas une équipe coréenne d'un supraconducteur à température ambiante. Nous avions relayé à plusieurs reprises sur Futura (voir les articles ci-dessous) les déclarations du physicien Julien Bobroff, expert en ce qui concerne la supraconductivité, qui incitait à être très prudent quant aux propriétés réelles du composé LK 99, découvert par Lee Seok-bae et Kim Ji-hoon, les deux chiffres faisant référence à l'année de la découverte (1999) et les deux lettres aux initiales des deux chercheurs coréens.

    Le nouveau matériaumatériau, de formule Pb9Cu(PO4)6O était clairement un phosphatephosphate de plombplomb et de cuivrecuivre, on peut même dire que c'est une forme d'apatite à base de plomb et donc a priori un composé pas trop difficile à fabriquer, ni très onéreux. On pouvait donc espérer que plusieurs laboratoires allaient reproduire les expériences montrant une annulation de la résistancerésistance du LK 99 et le fameux effet Meissnereffet Meissner se manifestant par une lévitation magnétique.

    Julien Bobroff avait cependant rappelé que les deux physiciens coréens n'étaient pas très connus, que le laboratoire où ils étaient censés avoir fait leur découverte conduisant à un nouveau bond technologique pour l'humanité l'était encore moins et que l'article qui l'annonçait, déposé sur arXiv, n'avait pas encore été critiqué par les experts du domaine, comme c'est la règle avant une publication dans un journal scientifique sérieux.

    Dès lors, la seule chose raisonnable à faire était de ne rien dire de plus et d'attendre que plusieurs équipes, déjà connues et avec des laboratoires crédibles, reproduisent les expériences.

    Pas d'annulation de la résistance électrique et pas d'effet Meissner

    C'est probablement le début d'une douche froide, malheureusement prévisible depuis le début, à laquelle on assiste avec un article de trois chercheurs chinois et que signale Julien Bobroff sur son compte Twitter. Certes, il s'agit là encore d'un article tout juste déposé sur arXiv, mais le pedigree des trois physiciens est plus sérieux.

    Aucune annulation de la résistance électriquerésistance électrique, ni d'effet Meissner, des signes clairs tous ensemble d'un état supraconducteur n'ont été observés. Les matériaux se comporteraient même plutôt comme un aimantaimant ordinaire, c'est-à-dire un simple corps ferromagnétiqueferromagnétique (voir le cours de Feynman à ce sujet) s'aimantant spontanément sous une température critiquetempérature critique. Les images de quasi-lévitation magnétique que les chercheurs coréens avaient montrée s'expliqueraient bien par un avataravatar du ferromagnétismeferromagnétisme.

    Julien Bobroff signale aussi un autre article récent qui lui aussi ne confirme pas l'occurrence d'un état supraconducteur avec LK 99.

    Le compte Twitter de Condensed Matter Theory Center de l'université du Maryland, aux États-Unis, un laboratoire sérieux qui fait des recherches sur la théorie de la matièrematière condensée, c'est-à-dire la physique du solidesolide, n'est pas optimiste non plus et signale notamment une autre pré-publication de chercheurs indiens qui eux non plus ne trouvent pas d’annulation de la conduction électrique dans LK 99.

    Gardons toutefois encore un peu d'espoir mais continuons à faire des commentaires sobres, la situation devrait être très claire dans quelques mois tout au plus probablement. Il s'agira sans doute d'un nième flop...

     


    LK-99 est-il le Graal de la supraconductivité ? Dernières nouvelles

    Article de Laurent Sacco publié le 5 août 2023

    Il y a quelques années, la communauté scientifique avait été en ébullition à l'annonce de la découverte de preuves laissant entendre que des neutrinosneutrinos dépassaient la vitesse de la lumièrevitesse de la lumière. Hélas, il s'agissait d'une erreur et on se demande si un destin similaire ne va pas arriver à l'annonce faite de la découverte d'un supraconducteur à température et pressionpression ambiantes. Ce qui est sûr, c'est que Twitter est également aujourd'hui en ébullition à ce sujet car une révolution technologique majeure, comme celle du transistor, pourrait en découler.

    C'est toujours le buzz sur Twitter quant à la question de savoir si la fusion contrôléefusion contrôlée, l'imagerie médicale, les accélérateurs de particules et même la propulsion spatiale, pour ne citer que ces exemples, vont être révolutionnés par la découverte de deux chercheurs coréens qui prétendent avoir obtenu un état supraconducteur à température et pression ambiantes, en l'occurrence dans une variante d'une classe de roches que l'on appelle une apatite et qu'ils ont baptisée LK-99 comme Futura l'expliquait dans le précédent article ci-dessous.

    Plusieurs vidéos ont circulé laissant entendre que d'autres chercheurs ont reproduit les expériences des Coréens en synthétisant eux aussi du LK-99. Il s'est avéré à plusieurs reprises qu'il s'agissait de fakes ou, pour le moins, rien de concluant ne pouvait en être dit.

    La nouvelle la plus sérieuse vient d'une publication déposée sur arXiv par une chercheuse très compétente et de grande réputation malgré son jeune âge, la physicienne irlandaise Sinéad Majella Griffin. Elle travaille au Laboratoire national Lawrence-Berkeley sur la physique des hautes énergiesénergies et de la matière condensée.

     

    Aucune preuve expérimentale ou théorique

    Elle a utilisé une puissante simulation sur ordinateurordinateur pour montrer que le LK-99 devait posséder des propriétés physiques et électroniques que l'on trouve chez des supraconducteurs à hautes températures connus. Mais, comme Griffin l'explique sur son compte Twitter, la simulation n'en est pas encore à dire que le phosphate à base de plomb et de cuivre devrait bel et bien être un supraconducteur et encore moins dans des conditions ambiantes.

    Plus que jamais, l'avis qu'exprimait il y a plusieurs jours le physicien Julien Bobroff reste pertinent. Il faut garder la tête froide et attendre que la procédure normale de vérification par des laboratoires sérieux et les débats d'experts aient lieu. D'autant plus que la synthèse de LK-99 n'est certainement pas triviale, même si on peut raisonnablement espérer qu'en cas d'une vraie révolution, elle ne deviendra pas problématique. En attendant, les erreurs dans le processus de synthèse pourraient compliquer l'obtention d'une preuve de supraconductivité.


    L'avis de Julien Bobroff sur le LK-99. © Julien Bobroff

    Le Graal de la supraconductivité à température ambiante enfin atteint ?

    Article de Laurent Sacco publié le 28/07/2023

    Pourra-t-on bientôt conduire l'électricité à travers les continents sans aucune perte, disposer d'un IRMIRM chez soi pour détecter le tout début d'un cancercancer, ou encore transporter des passagers dans des tubes à vide à vitesse supersonique ? Il faudrait pour cela disposer de matériaux supraconducteurs à température et pression ambiantes. Une équipe de physiciens coréens pense être arrivée à en trouver un.

    C'est le buzz qui monte depuis 48 heures à la suite de la mise en ligne sur arXiv d'un, puis deux articles par une équipe de physiciens coréens dont on ne sait pas encore très bien s'ils sont crédibles. Les articles, de plus, n'ont pas encore été soumis à la relecture par des experts indépendants et donc encore moins été publiés, ce qui incite déjà à suspendre son jugement quand on n'est pas un physicien du domaine. Les chercheurs affirment qu'ils ont obtenu une transition vers un état supraconducteur dans un matériau qu'ils ont découvert en 1999 et que cette transition s'obtient non seulement en dessous d'une température de 127 °C, mais surtout à pression ambiante.

    Si plusieurs laboratoires sérieux arrivent à reproduire cette transition, c'est une révolution technologique. Des matériaux supraconducteurs à température et pression ambiantes, ou peu s'en faut, permettraient de transporter l'électricité sans perte, peut-être à faire fonctionner en dehors des laboratoires des ordinateurs quantiques avec des circuits supraconducteurs (comme le Sycamore de Google), rendraient plus facile la création des tokamaks pour la fusion contrôlée façon Iter et bien d'autres choses encore, notamment dans le domaine de l'imagerie médicale mais aussi des accélérateurs de particules comme le LHCLHC, avec de puissants aimants.


    Des explications sur le phénomène de supraconductivité et son importance pour une révolution technologique. © CEA Recherche

    Une apatite supraconductrice à base de plomb ?

    Les chercheurs coréens ont appelé leur possible trouvaille LK-99, les initiales étant celles des noms des deux découvreurs, Lee Seok-bae et Kim Ji-hoon, les deux chiffres faisant référence à l'année de la découverte (1999). Le nouveau matériau, de formule Pb9Cu(PO4)6O est clairement un phosphate de plomb et de cuivre, on peut même dire que c'est une forme d'apatite à base de plomb.

    La communauté scientifique commence à réagir à l'article qui, on le rappelle, n'est encore qu'une prépublication. On peut certainement résumer ce qu'elle pense actuellement avec l’avis d’un des grands spécialistes français de la supraconductivité, Julien Bobroff.

    La prudence est en effet de mise, d'autant qu'il y a quelques mois, comme Futura l'avait expliqué dans l'article ci-dessous, une équipe de l'université de Rochester menée par le physicien Ranga Dias avait réussi à publier dans Nature un article dans lequel elle faisait savoir qu'elle pensait avoir observé dans un composé l'occurrence d'un état supraconducteur vers seulement 20 °C et à pression, selon leurs propres mots, presque ambiante, en réalité tout de même d'environ 10 000 fois la pression atmosphériquepression atmosphérique.

    Non seulement des critiques s'étaient élevées à l'époque mais aussi carrément des soupçons sérieux de fraudes avec manipulation de données. Si l'on n'en est pas encore là avec l'équipe coréenne, les résultats de l'équipe de Rochester n'ont toujours pas été confirmés par d'autres physiciens. C'est une raison de plus de ne pas trop commenter pour un moment encore les publications des chercheurs coréens. Croisons tout de même les doigts, face aux défis du XXIe siècle, l'Humanité aurait bien besoin d'une nouvelle révolution technologique avec des supraconducteurs.


    Un échantillon de LK-99 en lévitation magnétique. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Gigazine

    Enfin un supraconducteur à température et pression ambiante ?

    Article de Laurent Sacco publié le 9 mars 2023

    Pourra-t-on bientôt conduire l'électricité à travers les continents sans aucune perte ou disposer d'un IRM « chez soi » pour détecter le tout début d'un cancer ou d'un autre problème de santé ? Il faudrait pour cela disposer de matériaux supraconducteurs à température et pression ambiante. Une équipe états-unienne pense être quasiment arrivée à en trouver un, ce qui fait se lever un nouvel espoir, mais aussi des controverses dans la communauté scientifique.

    Le 8 avril 1911, le Hollandais Heike Kamerlingh Onnes mesurait avec son assistant Gilles Holst la résistance électrique du mercuremercure refroidi par de l'héliumhélium liquideliquide. Ce jour-là, ils découvrent la supraconductivité en observant qu'à 4,2 kelvinskelvins la résistivitérésistivité du mercure est nulle.

    Ce phénomène étonnant, que l'on allait rapidement retrouver avec des températures similaires pour plusieurs matériaux, va dès lors passionner des générations entières de chercheurs et des théoriciens de premier calibre qui s'attaqueront à sa compréhension comme Lev Landau et Vitaly Ginzburg en Russie, Pierre-Gilles de Gennes en France et bien sûr John Bardeen, Leon Cooper et John Robert Schrieffer aux États-Unis. Ces trois chercheurs, en proposant en 1957 la théorie BCS, ont réussi à expliquer le phénomène découvert par Onnes (à savoir l'apparition d'une transition de phasetransition de phase en dessous d'une certaine température dite critique conduisant à l'annihilation de la résistance d'un matériau) en utilisant les lois de la mécanique quantiquemécanique quantique.

    Des matériaux avec des superpouvoirs

    De nos jours, les supraconducteurs sont présents dans de nombreux domaines. On peut citer l'électronique, l'imagerie médicale, les aimants du LHC, les SquidsSquids, des capteurscapteurs magnétiques ultrasensibles et même des tokamaks pour étudier la fusion contrôlée. Mais il faut les refroidir avec de l'azoteazote et même de l'hélium liquide, ce qui n'est pas pratique et coûteux. Certains supraconducteurs en laboratoire exigent aussi en plus des conditions de pression extrême.

    Or, depuis la découverte en 1986 par les prix Nobel de physique Georg Bednorz et Alex Müller, alors chercheurs à IBMIBM, qu'il existe des matériaux devenant supraconducteurs à haute température, c'est-à-dire plusieurs dizaines de kelvins voire un peu plus, c'est la course pour créer des matériaux qui le seraient à température et pression ambiante. Mais sans succès...

    Pourtant, les enjeux sont considérables puisque de tels matériaux, si en plus ils étaient faciles et peu coûteux à synthétiser, conduiraient à des révolutions technologiques de l'imagerie médicale aux transports en commun avec des maglevs, en passant par la fusion contrôlée.

    On peut penser que pour vraiment avancer, il faudrait comprendre pourquoi les cupratescuprates utilisés par les deux prix Nobel, des sortes de céramiquescéramiques composées de couches d'oxyde de cuivre en sandwich entre d'autres éléments, peuvent être supraconducteurs à des dizaines de kelvins.

    Voilà pourtant longtemps que l'on sait expliquer la supraconductivité plus classique de matériaux comme le mercure et le plomb. Le phénomène fait intervenir dans la théorie BCS la formation de paires de Cooper, formées de deux électronsélectrons, comme l'explique la vidéo du CEA ci-dessous, du fait des interactions de ces particules avec les phononsphonons du réseau cristallinréseau cristallin.

    Rien de similaire n'existe pour les supraconducteurs à haute température critique. On sait seulement... qu'ils n'entrent pas dans le cas de la théorie BCS.

    On comprend donc pourquoi l'attention se focalise en ce moment sur un article paru dans Nature et provenant d'une équipe de physiciens de l'université de Rochester menée par Ranga Dias et qui fait savoir qu'elle pensait avoir observé dans un composé l'occurrence d'un état supraconducteur vers seulement 20 °C et à pression, selon leurs propres mots, presque ambiante.


    Une présentation de la découverte que pensent avoir faite Dias et ses collègues. Les pressions nécessaires sont élevées mais ne nécessitent plus des enclumes de diamant. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © University of Rochester

    Un supraconducteur à 20 °C mais 10 000 bars

    Le célèbre Quanta Magazine consacre un article entier à cette découverte ou plus précisément peut-être à la controverse à son sujet. Il faut dire que la pression presque ambiante évoquée par les chercheurs est tout de même d'environ 10 000 fois la pression atmosphérique et qu'ils n'en sont pas à leur première affirmation dans le genre, de quoi avoir des doutes légitimes déjà pour ces raisons.

    De plus, une précédente publication dans Nature des mêmes chercheurs et à propos d'une percée, là aussi avec un supraconducteur, avait dû être retirée en 2022. Futura avait consacré en 2020 un article à ce qui semblait donc être une découverte prometteuse avec un composé à base de sulfure d'hydrogène, déjà par l'équipe de Ranga Dias.

    Espérons que cette fois-ci l'histoire va être différente, même si nous n'en sommes pas encore à un vrai matériau supraconducteur dans les conditions de la vie de tous les jours. Un communiqué de l'université de Rochester donne des détails sur cette découverte, détails que nous reprenons.

    Inspiré par ce que l'on sait des propriétés chimiques de l'atomeatome de lutéciumlutécium (ou lutétium), un élément chimiqueélément chimique de la famille des lanthanideslanthanides, symbole Lu et de numéro atomiquenuméro atomique 71, compté parmi les terres raresterres rares (bien que plus abondant que l'argentargent et le mercure dans la croûte terrestrecroûte terrestre), Dias et ses collègues se sont penchés sur son cas.

    Ils ont ainsi produit un hydrure de lutécium dopé à l'azote en préparant initialement un mélange gazeux de 99 % d'hydrogènehydrogène et de 1 % d'azote, placé dans une chambre de réaction avec un échantillon pur de lutétium, et laissant les composants réagir pendant deux à trois jours à environ 200 °C.

    Un échantillon d'environ un millimètre de diamètre d'hydrure de lutécium, un matériau supraconducteur créé dans le laboratoire scientifique de Ranga Dias, vu au microscope. Cette image composite est le résultat de l'empilement et de l'amélioration des couleurs de plusieurs images. © Université de Rochester, J. Adam Fenster
    Un échantillon d'environ un millimètre de diamètre d'hydrure de lutécium, un matériau supraconducteur créé dans le laboratoire scientifique de Ranga Dias, vu au microscope. Cette image composite est le résultat de l'empilement et de l'amélioration des couleurs de plusieurs images. © Université de Rochester, J. Adam Fenster

    Des percées futures avec l'IA ?

    Dans une expérience de compression à l'aide d'une presse à enclumes de diamantdiamant, la couleurcouleur du composé est passée de bleu à rose lors de l'établissement de ce qui semble bel et bien être un état supraconducteur, puis à un rouge particulièrement intense en quittant la zone de supraconductivité à plus basse pression. Inspiré par cette couleur, Dias a baptisé son nouveau composé du nom de « reddmatter », ce qui peut se traduire par matière rouge, une substance évoquée par Mr Spock dans un des films de Star Trek en 2009, peut-être en raison d’un clin d’œil des scénaristes à la matière noire des astrophysiciens.

    On peut penser, comme Dias et ses collègues, qu'une variante du composé découvert tiendra, lui, toutes les promesses d'un matériau vraiment supraconducteur dans la vie de tous les jours. Il est possible que l'on fasse sa découverte théorique en utilisant l'apprentissage machine comme cela a été le cas avec d’autres matériaux prédits par le calcul, par exemple avec l’algorithme Uspex que l’on doit au célèbre physicien russe Artem Oganov.

    « <em>L'aube de la supraconductivité ambiante et des technologies appliquées est arrivée</em> », déclare Ranga Dias, dont le laboratoire a créé un matériau supraconducteur viable qu'ils ont surnommé « <em>reddmatter</em> ». © <em>Université de Rochester,</em> J. Adam Fenster
    « L'aube de la supraconductivité ambiante et des technologies appliquées est arrivée », déclare Ranga Dias, dont le laboratoire a créé un matériau supraconducteur viable qu'ils ont surnommé « reddmatter ». © Université de Rochester, J. Adam Fenster