On vient de confirmer la découverte de composés supraconducteurs dans des météorites. Ils sont ordinaires, c'est-à-dire que ces matériaux ne deviennent supraconducteurs qu'en dessous de quelques kelvins, mais voilà tout de même de quoi rendre un peu plus crédible l'existence de l'unobtainium d'Avatar, un minéral supraconducteur à température ambiante.


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    Il y a deux ans, dans le précédent article ci-dessous, Futura faisait part de la découverte probable faite par le physicienphysicien Ivan Schuller, de l'University of California à San Diego, et ses collègues, de matériaux supraconducteurs dans deux météorites. On ne pouvait pas manquer de faire le rapprochement avec le fameux unobtainium du film de James Cameron : AvatarAvatar. Il était clairement présenté comme un minéralminéral ou une roche extraterrestre possédant les propriétés d'un supraconducteur à température ambiante, introuvable dans le Système solaire mais existant sur Pandora, une exolune habitée en orbite autour de la géante gazeuse Polyphème orbitant autour d'Alpha Centauri A. On a de bonnes raisons de penser qu'il existe des exoplanètesexoplanètes en orbite autour d'Alpha Centauri CAlpha Centauri C, la troisième composante d'un système stellairesystème stellaire triple plus connue sous le nom de Proxima Centauri.

    Un supraconducteur à température ambiante révolutionnerait notre technologie de bien des façons en permettant, bien sûr, le transport de l'électricité sans perte, mais aussi en générant facilement de puissants champs magnétiqueschamps magnétiques qui auraient toutes sortes d'applicationsapplications. Un tel matériaumatériau est activement recherché et il serait extraordinaire que l'on puisse effectivement le trouver dans des météorites qui auraient pris naissance dans des conditions physico-chimiques exotiquesexotiques.


    Le physicien Roland Lehoucq nous présente l'unobtainium d'Avatar, un supraconducteur à température ambiante. © Pinblue créations

    Des supraconducteurs affectant la formation planétaire ?

    Ivan Schuller et ses collègues viennent de publier un second article dans Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America (PNAS) dans lequel ils confirment la présence d'un matériau supraconducteur dans la météorite de Mundrabilla et dans celle de GRA 95205. Ces dernières avaient déjà montré la présence de ce matériau dans la précédente étude à leur propos. GRA 95205 est classée dans les uréilites, un type rare de météorite pierreuse qui a une composition minéralogique particulière, gris foncé ou brunâtre, nommé d'après le village de Novy Urey en Russie, où une météorite de ce type chuta le 4 septembre 1886. Ce type d'achondriteachondrite est également connu pour sa teneur élevée en carbonecarbone sous forme de graphitegraphite et de nanodiamants.

    Les chercheurs ont découvert des signes d'une transition à un état supraconducteur de certains des grains de ces deux météorites sous une température de 5 kelvinskelvins au-dessus du zéro absoluzéro absolu. Il ne s'agit donc toujours pas de matériaux supraconducteurs à température ambiante mais qui sait, peut-être en trouvera-t-on un jour dans la ceinture d'astéroïdeastéroïde ou avec une mission ramenant des échantillons d'un messager interstellaire comme ‘Oumuamua. Par contre, les techniques de caractérisation, comme l'analyse dispersive en énergieénergie -- EDS ou EDX pour energy dispersive X-ray spectrometry, semblent indiquer que, dans les deux cas, les composés supraconducteurs présents sont des alliagesalliages d'étainétain, de plombplomb et d'indiumindium.

    Enfin, les chercheurs mentionnent dans leur étude que « ces découvertes pourraient avoir un impact sur notre compréhension de plusieurs environnements astronomiques. Les particules supraconductrices dans les environnements froids peuvent affecter la formation planétaire, la forme et l'origine des champs magnétiques par effet dynamo, le mouvementmouvement des particules chargées et d'autres processus ».

    Un échantillon de la météorite Mundrabilla. © James Wampler l'image 
    Un échantillon de la météorite Mundrabilla. © James Wampler l'image 

    Des supraconducteurs dans des météorites

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 09/03/2018

    On vient de découvrir des supraconducteurs dans des météorites. Ils sont ordinaires, c'est-à-dire que ces matériaux ne deviennent supraconducteurs qu'en dessous de quelques kelvins, mais voilà tout de même de quoi rendre un peu plus crédible l'existence de l'unobtainium d'Avatar, un supraconducteur à température ambiante.

    Cela fait plus d'un siècle que l'on connaît le phénomène de supraconductivitésupraconductivité mais on en parle davantage depuis quelques décennies parce que celui-ci est de plus en plus utilisé dans la technologie moderne au service de la science fondamentale, celle portant sur la physiquephysique des hautes énergies au LHCLHC, sur la fusion contrôlée et aussi sur le cerveaucerveau avec l'IRMIRM. Il s'agit à chaque fois de générer de puissants champs magnétiques dans des aimantsaimants supraconducteurs. Problème : il faut refroidir ces aimants presque au zéro absolu, ce qui n'est pas pratique.Or, au milieu des années 1980, on a découvert qu'il existait des matériaux supraconducteurs à hautes températures critiquestempératures critiques et il est alors devenu possible d'obtenir l'annulation de la résistancerésistance de certains de ces matériaux en utilisant de l'azoteazote et non plus de l'héliumhélium liquideliquide. Cela permet de se rapprocher un petit peu plus du rêve qui consisterait à utiliser la supraconduction pour transporter l'électricité sans perte à longue distance, comme le montre l'exemple du câble mis en service en 2014 dans la ville allemande d'Essen (Ruhr). Le graal serait d'obtenir des matériaux supraconducteurs à température ambiante car ils permettraient vraiment de révolutionner notre technologie, par exemple en généralisant l'usage des trains en lévitation magnétique, les Maglev.

    Les matériaux supraconducteurs à température ambiante, un rêve ?

    Pour le moment, malgré d'intenses recherches, de tels matériaux restent du domaine du rêve et sont un exemple d'unobtainium, un néologisme qui est la traduction de l'anglais utilisé en science-fiction pour désigner un métalmétal ou un alliage dont les propriétés sont si exceptionnelles qu'il semble ne pas pouvoir exister (unobtainable signifie « impossible à obtenir »).

    Dans le film Avatar, c'est le nom d'un minéral supraconducteur à température ambiante. La légende veut que ce terme soit né dans les années 1950 chez les ingénieurs de l'aérospatiale pour désigner un matériau idéal pour de futures machines mais, hélas, inexistant. Plus tard, semble-t-il, les ingénieurs de Lockheed l'ont repris à leur compte quand ils travaillaient sur le tout nouvel alliage à base de titanetitane destiné à l'avion supersonique SR-71 Blackbird. Capable d'atteindre Mach 3, l'appareil devait supporter des températures très élevées (jusqu'à 500 °C), ainsi que des contraintes mécaniques fortes.

    De façon surprenante, l'unobtainium d'Avatar, qui est censé s'être formé sur une exolune en orbite autour d'une géante gazeuse appartenant à un hypothétique système planétaire autour d'Alpha du Centaure, vient peut-être de se rapprocher un tout petit peu plus de la réalité à la suite d'une communication faite par un groupe de chercheurs états-uniens lors d'une réunion de l'American Physical Society mardi 6 mars 2018.


    Ne manquez pas l'exposition « Météorites, entre ciel et terre ». Elle a lieu actuellement et se tiendra jusqu'au 10 juin 2018 à la grande galerie de l'Évolution du Muséum national d'histoire naturelle, au jardin des plantes de Paris. © Muséum national d'histoire naturelle

    Un alliage supraconducteur d'indium et d'étain dans des météorites

    L'unobtainium d'Avatar est censé ne pas se trouver sur Terre et être donc un minéral ou une roche extraterrestre qui a pris naissance dans des conditions physico-chimiques exotiques. Or, voilà que le physicien Ivan Schuller, de l'University of California à San Diego, et ses collègues viennent d'annoncer qu'ils avaient repéré des matériaux supraconducteurs dans deux météorites.

    Il y a d'abord la météorite Mundrabilla, trouvée en Australie en 1911, précisément l'année de la découverte de la supraconductivité. C'est une sidéritesidérite de type IAB, largement composée de ferfer comme son nom l'indique mais contenant aussi des silicatessilicates et dont on a retrouvé environ 24 tonnes. Vient ensuite une météorite trouvée en AntarctiqueAntarctique en 1995 dans une région baptisée Graves Nunataks. C'est une chondritechondrite carbonée. Dans les deux cas, il y a présence d'un alliage à base d'étain et d'indium, avec peut-être aussi du plomb avec la météorite Mundrabilla. Celui-ci est connu des physiciens et possède une température critique d'environ 5 kelvins (-268,15 °C).

    La découverte a été rendue possible en plaçant des échantillons de plusieurs météorites dans une cavité micro-ondes où régnait un fort champ magnétique constant auquel une petite composante variable et oscillante était ajoutée. L'absorptionabsorption des ondes électromagnétiquesondes électromagnétiques par les échantillons changeait radicalement lorsqu'il y avait un supraconducteur.

    Cette découverte remarquable ouvre la porteporte à plusieurs spéculations, par exemple sur l'existence de petits corps célestes supraconducteurs, et même, bien sûr, l'existence de météorites supraconductrices à température ambiante qui seraient nées dans des conditions de températures et de pressionspressions très exotiques. On sait par exemple que la fameuse structure de Widmanstätten des sidérites ne peut apparaître que dans un alliage de fer et de nickelnickel au cœur d'un corps céleste différencié refroidi très lentement, durant quelques millions d'années.