Un duo d'anticorps monoclonaux démontre des résultats prometteurs pour diminuer le risque d'hospitalisation et de décès des personnes atteintes de la Covid-19.


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    Contre la Covid-19, Roche, le géant suisse du médicament, ne mise pas sur un vaccin mais sur les anticorps monoclonaux, des anticorps qui ne sont spécifiques que d'un seul épitope sur l'antigène. La firme travaille sur un cocktail de deux anticorps monoclonauxanticorps monoclonaux, le casirivimab et casirivimab, mis au point par la société de biotech Regeneron, lesquels se fixent de façon non-compétitive sur le receptor binding domain de la protéineprotéine S du SARS-CoV-2SARS-CoV-2. Injecté par voie intraveineuse, le cocktail REGN-COV2 diminue le risque d'hospitalisation et de décès de 70 % lorsqu'il est dosé à 1,200 mg, et de 71 %, lorsqu'il est dosé à 2,400 mg.

    Résultats de l'essai clinique de phase III mené par Roche pour le cocktail d'anticorps monoclonaux élaboré par Regeneron. © Roche
    Résultats de l'essai clinique de phase III mené par Roche pour le cocktail d'anticorps monoclonaux élaboré par Regeneron. © Roche

    Des hospitalisations réduites et des maladies plus courtes

    Ces résultats ont été obtenus lors de l'essai cliniqueessai clinique de phase III réalisé sur 4.567 participants atteints de la Covid-19 sans que leur état ne nécessite une hospitalisation. L'effet thérapeutique du casirivimab et de l'imdevimab a été comparé avec un placeboplacebo. En plus de diminuer les risques d'hospitalisation et de décès, REGN-COV2 semble aussi réduire la duréedurée des symptômessymptômes de 4 jours, 10 jours médians pour les participants du groupe ayant reçu le cocktail contre 14 jours médians pour le groupe placebo. Enfin, il est également associé à une diminution de la charge viralecharge virale chez les patients asymptomatiques ou atteints d'une forme légère de la maladie.

    L'ANSM a permis l'autorisation en accès précoce (autorisations temporaires d'utilisation de cohortecohorte) du casirivimab-imdevimab pour les personnes à risque important, susceptibles de développer une forme grave de la Covid-19. Le cocktail n'a pas encore obtenu d'autorisation de mise sur le marchéautorisation de mise sur le marché (AMM), mais l'Agence européenne des médicaments a émis un avis favorable pour son utilisation avant l'obtention de son AMM.


    Un traitement préventif contre la Covid-19... qui n'est pas le vaccin

    Article publié le 25 janvier 2021 par Céline DeluzarcheCéline Deluzarche

    La focalisation sur la vaccinationvaccination fait oublier qu'il existe des centaines d'autres pistes de traitement contre la Covid. Un essai vient par exemple de montrer que les anticorps monoclonaux pourraient protéger d'une infection et constituer dans certains cas une alternative au vaccin.

    Les anticorps monoclonaux, avec lesquels Donald Trump a été soigné en octobre 2020, sont aujourd'hui utilisés comme traitement curatifcuratif contre la Covid. Le 24 novembre dernier, la FDAFDA a ainsi émis une autorisation d'urgence pour un cocktail d'anticorps (casirivimab et imbdevimab) de la firme Regeneron dans les formes légères à modérées de la Covid. Le bamlanivimab, développé par Eli Lilly, a également été autorisé en novembre dernier.

    80 % d’infections en moins

    Le laboratoire affirme aujourd'hui que le bamlanivimab, développé en collaboration avec la biotech canadienne AbCellera, agit non seulement sur les personnes déjà malades, mais aussi à titre préventif pour empêcher une infection chez les personnes saines. Eli Lilly a mené un essai clinique auprès de 1.097 participants exposés à des situations à risque, comme des personnes âgées ou le personnel de santé. Selon ses conclusions, le médicament a permis de réduire de 57 % les infections symptomatiques et même de 80 % dans les maisons de retraite.

    Les anticorps offrent une protection rapide aux personnes exposées récemment au virus et qui n’ont pas le temps d’attendre la réponse immunitaire conférée par le vaccin. © Drazen, Adobe Stock
    Les anticorps offrent une protection rapide aux personnes exposées récemment au virus et qui n’ont pas le temps d’attendre la réponse immunitaire conférée par le vaccin. © Drazen, Adobe Stock

    Cet essai en confirme un autre, mené par l'University College London Hospitals NHS Trust (UCLH) et AstraZenecaAstraZeneca, qui montre aussi que les anticorps peuvent conférer une immunitéimmunité instantanée et à long terme (entre 6 et 12 mois). Son médicament, baptisé AZD7442 et administrable en deux doses comme le vaccin, pourrait être disponible dès mars ou avril selon le journal The Guardian.

    Une solution d’urgence pour les personnes exposées au virus

    « L'avantage de ce traitement est qu'on n'a pas besoin d'attendre que le corps produise des anticorps, explique Catherine Houlihan virologue à l'UCLH. C'est particulièrement intéressant dans le cadre de personnes exposées au virusvirus depuis moins de huit jours à qui il est trop tard d'administrer un vaccin ». Il faut en effet trois à quatre semaines aux vaccins de PfizerPfizer ou Moderna pour offrir une protection suffisante. « Ce genre de traitement pourrait réduire considérablement la mortalité dans les lieux à risque, appuie Paul Hunter, médecin à l'université de East Anglia. Lorsqu'on a un cluster dans une maison de retraite par exemple, on pourrait administrer des anticorps à tous les résidents et au personnel qui n'ont pas été vaccinés ». Les anticorps monoclonaux pourraient également être utilisés chez les personnes immunodéprimées chez qui la réponse vaccinale peut être insuffisante.

    Les anticorps monoclonaux pourraient jouer un rôle fondamental pour renverser le cours de cette pandémie

    « Les vaccins restent probablement plus efficaces et confèrent une protection à plus long terme, reconnaît Daniel Skovronsky, le directeur scientifique d'Eli Lilly. Notre solution n'entre donc pas en compétition avec le vaccin mais offre une solution complémentaire notamment dans les cas d'urgence pour les personnes exposées récemment au virus. Les anticorps monoclonaux pourraient jouer un rôle fondamental pour renverser le cours de cette pandémiepandémie. »

    3.000 fois plus cher qu’un vaccin

    Récemment, le gouvernement américain a acquis 1,25 million de doses du cocktail d'anticorps de Regeneron et des commandes de milliers de doses de bamlanivimab ont également été passées. Des médicaments qui pourraient donc être distribués immédiatement plutôt que d'attendre dans les hôpitaux l'arrivée de patients déjà malades. Seul hic, le coût rédhibitoire de ces fameux anticorps : le cocktail de Regeneron revient à 2.000 dollars la dose (1.640 euros) et le traitement d'Eli Lilly à 1.200 dollars le flacon de 700 mg. Sachant que la quantité préconisée est de 4,2 grammes par dose, cela revient à 7.200 dollars la dose, soit près de 6.000 euros ! Pour rappel, le vaccin de Pfizer a été acheté à 12 euros par l'Union européenne et celui d'Oxford/AstraZeneca à 1,78 euro la dose.


    Covid-19 : un cocktail d'anticorps plutôt qu'un vaccin ?

    Article de Céline Deluzarche publié le 14/05/2020

    Plusieurs start-upstart-up travaillent sur des traitements à base d'anticorps polyclonauxanticorps polyclonaux, capables de conférer une protection contre le coronaviruscoronavirus et de traiter les patients déjà atteints. Une approche innovante qui présente de nombreux avantages mais aussi de sérieux défis. Vaccin ou anticorps, lequel remportera la course ?

    Alors que plus de 70 vaccins contre le coronavirus du Covid-19 sont en cours de conception dans le monde, la solution contre l'épidémieépidémie pourrait bien venir d'ailleurs. La start-up Sorrento Therapeutics, en collaboration avec le Mount Sinai Health System à New York, vient ainsi d'annoncer avoir développé un « cocktail d'anticorps » à prendre en préventionprévention ou en traitement contre le coronavirus.

    Appelé Covi-Shield, ce médicament offrirait une protection d'environ deux mois contre l'infection. Il pourrait être administré à des personnes exposées comme le personnel soignant ou au public fragile comme les personnes âgées. Un essai de phase 1 doit débuter au troisième trimestre de 2020, et la start-up assure qu'en cas de succès et d'approbation par les autorités sanitaires, des millions de doses pourront être produites d'ici la fin de l'année aux États-Unis et en Europe.

    Les anticorps, nouvelle poule aux œufs d’or des laboratoires

    Par rapport à un vaccin, dont la mise au point est très complexe puisqu'il dépend de la réponse immunitaireréponse immunitaire, les anticorps présentent l'intérêt d'agir immédiatement. Ce type de traitement n'est d'ailleurs pas nouveau. Les anticorps monoclonaux représentent aujourd'hui plus de la moitié des ventes de biomédicaments et s'attaquent à un nombre croissant de maladies, allant du cancercancer au diabètediabète en passant par la sclérose en plaques. C'est donc logiquement que le Covid-19 est venu s'ajouter à la liste.

    La première piste consiste à injecter du plasma sanguin de patients guéris du Covid-19 et contenant des anticorps neutralisants. Une dizaine d'essais cliniques sont actuellement en cours dans le monde dont un en France. Mais le plasmaplasma entier contient aussi toutes sortes d'anticorps inutiles ayant trait à d'autres maladies. C'est pourquoi Sorrento et d'autres biotechs utilisent plutôt des mix d'anticorps extraits du plasma et purifiés, ce que l'on appelle des H-Ig.

    Les anticorps neutralisants viennent se fixer directement sur les protéines de pointe du virus pour l’inhiber. © dariaren, Adobe Stock
    Les anticorps neutralisants viennent se fixer directement sur les protéines de pointe du virus pour l’inhiber. © dariaren, Adobe Stock

    Un cocktail d’anticorps différents pour prévenir les mutations

    Le problème, c'est que tous les anticorps ne sont pas efficaces pour combattre le virus. Certains n'ont aucune utilité, d'autres peuvent même aggraver les symptômes en provoquant une réponse immunitaire inadaptée. Seuls les anticorps dits neutralisants, capables de se fixer sur les protéines de pointe pour inactiver le virus, confèrent une protection.

    La première difficulté est donc d'identifier ces anticorps. Afin de renforcer leur action et d'éviter que le virus ne développe une résistancerésistance au traitement, les scientifiques cherchent généralement à combiner ces anticorps entre eux (anticorps polyclonaux). Le « cocktail » de Sorrento Therapeutics comprend ainsi trois types d'anticorps différents visant les protéines de pointe. Xenothera, une biotech basée à Nantes, s'est elle aussi lancée dans la course contre le Covid-19 avec un cocktail d’anticorps baptisé XAV-19 et contenant un mix d'anticorps purifiés. Cette approche permet également de garantir l'efficacité du traitement en cas de mutation du virus.

    Pour produire des anticorps en grande quantité, les chercheurs « humanisent » le plasma d’animaux. © Kateryna_Kon, Adobe Stock
    Pour produire des anticorps en grande quantité, les chercheurs « humanisent » le plasma d’animaux. © Kateryna_Kon, Adobe Stock

    Vaches, chevaux et souris : le bestiaire des biotechs pour produire les anticorps

    Le gros problème de ces anticorps polyclonaux, c'est de les fabriquer. Car produire des anticorps est loin d'être aussi facile que de fabriquer une moléculemolécule chimique. La première approche est de les extraire du plasma des patients guéris. Mais le nombre de donneurs étant réduit, la fabrication est elle aussi limitée. Du coup, l'idée est de passer par des animaux dont on « humanise » les anticorps en les modifiant génétiquement. La start-up américaine Emergent BioSolutions compte, par exemple, produire du plasma immunisant à partir de chevaux. Du fait de sa taille, un cheval permet de traiter trois patients humains.

    De plus, le plasma équin étant plus concentré en anticorps que le plasma humain, on peut utiliser une dose plus faible. SAb Biotherapeutics compte introduire des chromosomeschromosomes artificiels chez des vachesvaches pour leur faire fabriquer des anticorps humains et GigaGen, une biotech basée à San Francisco, vise à cloner les anticorps en laboratoire dans des cellules de mammifèresmammifères. Selon la start-up, moins de 10 donneurs sont ainsi nécessaires pour produire un traitement à des millions de patients. Xenothera est sur le même filonfilon avec ses anticorps polyclonaux glycol-humanisés (GH-pAb).

    Voir aussi

    Coronavirus : comment notre organisme combat l’infection ?

    Des injections à plusieurs centaines d’euros

    Pour le moment, la plupart de ces traitements visent à traiter les formes graves de Covid-19. Sorrento Therapeutics est l'une des seules à promouvoir les anticorps polyclonaux en prévention car ces traitements sont très coûteux. Comme ils ne peuvent pas être administrés par voie orale (les anticorps seraient dégradés par les enzymesenzymes de l'estomacestomac), ils doivent être injectés par voie veineuse et chaque injection coûte plusieurs centaines d'euros. Au final, ces fameux cocktails constitueront donc plus une brique complémentaire à la lutte contre le Covid-19 plutôt qu'une véritable alternative au vaccin.