Lors d’une expédition de cartographie du fond marin, des chercheurs du Schmidt Ocean Institute ont eu la surprise de découvrir un nouveau mont sous-marin de près de 1,6 kilomètre de haut ! Une découverte qui n’est cependant pas une première et qui en dit long sur notre méconnaissance des fonds océaniques.


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    Preuve que le relief des fonds océaniques est encore très mal connu, un imposant mont sous-marin jusqu'à présent absent du catalogue vient d'être identifié lors d'une mission océanographique au large du Guatemala.

    Un mont qui s’enracine à 4 000 mètres de fond

    À terre, si un cônecône volcanique de 1 600 mètres de haut ne pourrait passer inaperçu, l'environnement marin n'a toutefois aucun mal à dissimuler ce type de relief. Il faut avouer qu'il est tout de même bien caché. Malgré sa taille imposante, ce mont sous-marin est en effet bien loin de la surface. Son sommet se situe à une profondeur de 2 400 mètres, et sa base gît sur le fond de la plaine abyssale, située à 4 000 mètres. Pour le découvrir, il fallait donc imager avec précision le fond océanique de la région.

    Le nouveau mont sous-marin est apparu sur les données bathymétriques acquises lors d'une expédition de cartographie du fond océanique © <em>Schmidt Ocean Institute</em>
    Le nouveau mont sous-marin est apparu sur les données bathymétriques acquises lors d'une expédition de cartographie du fond océanique © Schmidt Ocean Institute

    Schmidt Ocean Institute : une cartographie précise de l’océan

    C'est ce qui a été fait au cours de l’une des expéditions menées par le Schmidt Ocean Institute, dont l'objectif est d'implémenterimplémenter progressivement la cartographie des fonds marins du globe. Depuis 2013, l'institut scientifique a ainsi cartographié avec une précision de 100 mètres minimum près de 1,44 million de km2, et ainsi découvert plus de 20 nouveaux « objets » sous-marins, du mont volcanique au champ hydrothermal, en passant par les récifs coralliens. À l'heure actuelle, ces missions ont permis de cartographier 25 % des fonds océaniques avec une haute résolutionrésolution. L'objectif est d'arriver à 100 % d'ici la fin de la décennie.

    Une mission essentielle car ces nouvelles cartes permettront de guider les futures explorations scientifiques et de mieux comprendre les processus géologiques qui gouvernent le domaine océanique. Ce type de découverte est également très importante pour les biologistes, les flancs des monts sous-marins étant souvent le repère de nombreux organismes et animaux. Il n'est pas rare d'ailleurs d'y trouver de nouvelles espèces !


    Plus de 19 000 nouveaux monts détectés au fond des océans !

    Grâce à la résolution toujours plus importante des satellites, il est aujourd'hui possible de détecter des monts sous-marins de plus en plus petits depuis l'espace. Un nouveau catalogue enrichi de plus de 19 000 de ces montagnes sous-marines vient ainsi de paraître. Une meilleure connaissance du relief du fond océanique qui devrait bénéficier non seulement à la navigation, mais aussi à la recherche scientifique.

    Article de Morgane GillardMorgane Gillard publié le 24 avril 2023

    Quelle est la plus grande hantise des sous-mariniers ? Heurter à pleine vitessevitesse un mont sous-marin s'élevant inopinément en travers de leur route. Une situation loin d'être anecdotique qui s'est déjà produite en 2005 et plus récemment en 2021, occasionnant des dégâts matériels, et même un mort ainsi que de nombreux blessés dans le premier cas. Sachant de plus qu'il s'agissait d'un sous-marin à propulsion nucléaire, ce type d'accidentaccident a de quoi donner des sueurs froides à tous les équipages naviguant à plusieurs centaines de mètres sous la surface des océans.

    <em>L'USS San Francisco</em>, sous-marin à propulsion nucléaire, endommagé à la suite de sa collision en 2005 avec un mont sous-marin non cartographié. © <em>U.S. Navy</em>, <em>Photographer's Mate 2nd Class Mark Allen Leonesio</em>, <em>Wikimedia Commons</em>, domaine public
    L'USS San Francisco, sous-marin à propulsion nucléaire, endommagé à la suite de sa collision en 2005 avec un mont sous-marin non cartographié. © U.S. Navy, Photographer's Mate 2nd Class Mark Allen Leonesio, Wikimedia Commons, domaine public

    Un relief sous-marin encore très mal cartographié

    Car, contrairement à nous lorsque nous conduisons en voiturevoiture, les sous-mariniers ne peuvent pas voir l'extérieur. Pour se diriger, ils n'ont d'autre choix que de faire confiance à des cartes du fond marin et à leur sonarsonar. Mais, avec seulement un quart du plancherplancher océanique cartographié par des missions océanographiques, les surprises sont nombreuses et elles peuvent être de taille. Le fond de l'océan est loin d'être plat ! Il est au contraire parsemé de nombreux accidents de terrain : canyons, fractures, mais surtout monts sous-marins. Il peut s'agir de volcans, mais également de blocs soulevés par les mouvementsmouvements tectoniques qui façonnent la croûte océanique. Il s'agit bien de véritables montagnes qui peuvent s'élever sur plusieurs centaines, voire milliers, de mètres de haut.

    De véritables obstacles dont il est important de connaître la position pour la sécurité des sous-mariniers, mais aussi pour mieux comprendre la dynamique des courants océaniques et l'histoire géologique des fonds marins.

    Observer le fond de la mer depuis l’espace

    Impossible cependant de cartographier l'ensemble de la surface océanique par bateau. C'est là qu'interviennent les satellites. Grâce à des radars, ceux-ci sont en effet capables de mesurer les infimes variations du niveau des océans. Sous l'influence de la force de gravitégravité, la surface de l'eau drape en effet de manière très subtile le relief du fond océanique, permettant de reconstruire une image du paysage sous-marin. Si cette méthode d'imagerie est utilisée depuis plusieurs décennies maintenant (on parle de bathymétriebathymétrie satellitaire), les nouvelles générations de radar de haute résolution ont permis de dresser des cartes de plus en plus précises, en identifiant notamment des structures de plus en plus petites.

    La surface des océans, en représentant une équipotentielle du champ de gravité, reflète la topographie du fond marin mais également la distribution des masses au sein de la croûte océanique. © Olivier Dequincey, Planet-terre.ens-lyon.fr
    La surface des océans, en représentant une équipotentielle du champ de gravité, reflète la topographie du fond marin mais également la distribution des masses au sein de la croûte océanique. © Olivier Dequincey, Planet-terre.ens-lyon.fr

    En 2011, 24 000 monts sous-marins ont ainsi été identifiés. Il faut aujourd'hui en ajouter plus de 19 000, comme le révèle une nouvelle étude publiée dans Earth and Space Science. La grande majorité de ces monts n'a jamais été identifiée par les sonars des bateaux, mettant ainsi en lumièrelumière l'intérêt majeur de cette technique d'imagerie.

    Ce nouveau catalogue a été obtenu grâce aux données apportées notamment par les satellites CryoSatCryoSat-2 (ESAESA) et Saral (agences spatiales française et indienne). Grâce à la haute résolution de ces satellites, l'équipe de scientifiques a pu détecter des monts de seulement 1 100 mètres de haut, ce qui représente la limite inférieure de la définition d'un mont sous-marin.  

    Des données qui permettent de mieux comprendre le domaine océanique

    En plus de permettre la constructionconstruction de cartes bathymétriques plus précises pour la navigation, ces nouvelles données représentent une base de travail pour de nombreux chercheurs. Elles pourraient ainsi permettre de mieux comprendre l'évolution des points chaudspoints chauds comme celui de l'Islande par exemple, ou les processus magmatiques en jeu au niveau des dorsales océaniquesdorsales océaniques. Les biologistes sont également très intéressés par cette nouvelle cartographie du fond océanique, les flancs des monts sous-marins représentant de véritables oasis pour la biodiversité.

    Les monts sous-marins influencent aussi grandement les courants océaniques et plus particulièrement le mélange des eaux profondes et de surface par l'effet « d'upwellingupwelling ». Les monts sous-marins créent en effet des turbulencesturbulences dans les courants qui les contournent, permettant ainsi la remontée des eaux profondes et froides vers la surface. Un processus qui impacte directement le climatclimat global.


    Des milliers de montagnes découvertes au fond des océans

    La connaissance de la topographie des océans, qui constituent plus de 70 % de la surface de la Terre, est bien moins précise que celle des continents. On peut l'explorer depuis l'espace via des mesures d'altimétriealtimétrie indirectement liées au champ de gravité de la Terre. Une nouvelle carte plus précise que la précédente obtenue de la même façon vient d'être rendue publique. Elle révèle la présence de plusieurs milliers de monts sous-marins jusqu'ici inconnus.

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 11 octobre 2014

    On a peine à croire qu'au début du XXIe siècle, la surface de la Terre est connue avec moins de précisions que la surface de Mars ou de VénusVénus. Et c'est pourtant vrai. Notre planète bleueplanète bleue rend en effet difficile la connaissance de la topographie précise du fond de ses océans. On n'a ainsi découvert qu'au XXe siècle que les plus grandes chaînes de montagnes et la majorité des volcans se trouvaient sous le niveau de la mer lorsque l'on a commencé à étudier sérieusement le fond des océans par échosondage.De nos jours un sondeur multifaisceaux Sea-Beam permet la cartographie détaillée des fonds marins avec une précision d'environ 15 mètres. Mais plus de 80 % restent encore très peu connus, avec une résolution faible en 3D. Les campagnes d'échosondages standards nécessiteraient plus d'un siècle et plusieurs milliards de dollars pour couvrir vraiment la totalité des océans.

    Le champ de gravité et la surface des océans de la Terre

    Mais les géophysiciens disposent d'autres outils pour progresser plus rapidement dans notre connaissance des océans : la gravimétriegravimétrie et l'altimétrie satellitaire. Ils viennent de le prouver une nouvelle fois dans un article publié dans Science et qui aurait certainement fait plaisir à l'un des pionniers des mesures gravimétriques en mer au début du XXe siècle, le géophysicien et géodésien hollandais Felix Andries Vening Meinesz (1887-1966). Les campagnes de mesures gravimétriques du plancher océanique qu'il a conduites avec le gravimètre de son invention ont révélé des anomaliesanomalies dans le champ de pesanteur terrestre qui se sont révélées précieuses pour l'élaboration de la théorie de la tectonique des plaques qui les a illuminées en retour.


    Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle avec deux barres horizontales en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître, si ce n’est pas déjà le cas. En passant simplement la souris sur le rectangle, vous devriez voir l’expression « Traduire les sous-titres ». Cliquez pour faire apparaître le menu du choix de la langue, choisissez « français », puis cliquez sur « OK ». © Scripps Oceanography, YouTube

    Cela peut paraître de prime abord contre-intuitif, mais la surface de l'océan mondial s'élève dans les régions où le champ de gravité est plus important, à cause des montagnes sous-marines, et elle s'abaisse au niveau des fosses océaniquesfosses océaniques. La raison en est qu'elle suit le géoïdegéoïde, une surface équipotentielle de la gravité de notre planète. En mesurant les variations de la surface des océans autour de celle de l'ellipsoïde de référence de la Terre à l'aide d'échos radar depuis l'espace, il est donc possible de reconstituer la topographie des fonds marins en résolvant ce qu'on appelle un problème inverse dans le jargon des géophysiciens.

    Les chercheurs sont en train d'utiliser les données altimétriques collectées par les satellites Jason-1 et CryoSat-2 pour mettre en pratique cette méthode qui avait déjà été utilisée pour s'affranchir de l'eau des océans et révéler la topographie des fonds marins. Il y a en effet eu un précédent célèbre, il y a 20 ans, avec les travaux de la géophysicienne française Anny Cazenave qui, en compagnie de ses collègues, avait dressé une carte du fond des océans de cette façon. On peut avoir accès aux nouveaux résultats qui ont nécessité des traitements complexes des données fournies par les deux satellites sur le site du célèbre Institut d’océanographie Scripps.

    Un outil pour chercher du pétrole et gérer les stocks de poissons

    Toutes les données fournies par Jason-1 et CryoSat-2 n'ont pas encore été complètement analysées, mais la résolution des images du fond des océans déduites est déjà au moins améliorée d'un facteur 2. Selon David Sandwell, principal auteur de la nouvelle carte, les précédentes mesures permettaient déjà de voir tout ce qui était plus grand que 2 km, ce qui avait conduit à recenser environ 5.000 monts sous-marins. Des milliers d'autres sont déjà visibles, mais comme le nombre de ceux que l'on peut détecter augmente de façon exponentielle avec la résolution des images, il se pourrait que l'on se retrouve à la fin de l'exploitation des données des deux satellites avec 25.000 sommets de plus.

    Faire progresser notre connaissance de la topographie du fond des océans a plusieurs avantages. Cela va permettre de mieux modéliser les mouvements des massesmasses d'eau, comment les courants se mélangent et transportent de la chaleurchaleur et donc, d'améliorer les modèles climatiquesmodèles climatiques qui prennent en compte les interactions entre l'atmosphère et les océans. La connaissance améliorée des sommets sous-marins devrait permettre aussi de mieux gérer les stocks de poissonspoissons disponibles, car les bancs de poissons ont tendance à se rassembler aux abords de ces monts sous-marins. Enfin, comme il est possible de voir les structures géologiques cachées par des couches de sédimentssédiments, cela a des implications pour la prospection pétrolière, car des faillesfailles cachées ont pu piéger des hydrocarbureshydrocarbures. L'histoire de la tectonique des plaquestectonique des plaques et de l'expansion des fonds océaniques peut aussi être mieux comprise.

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