Avec l’augmentation du prix des métaux, certaines entreprises minières lorgnent désormais du côté des grands fonds océaniques où reposent d’énormes réserves de minerais. Mais les scientifiques mettent en garde contre les dommages irréversibles qui pourraient être causés aux écosystèmes marins.
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Aujourd'hui, les métauxmétaux indispensables à notre industrie proviennent exclusivement de gisements terrestres. Pourtant, la croûte continentale n'est pas la seule source potentielle de minerais. Le fond des océans renferme également d'importantes quantités de métaux, comme le cuivrecuivre, le zinczinc, l'or, l'argentargent, le plombplomb... Ces ressources minérales ont été identifiées il y a maintenant une dizaine d'années, lors de la découverte des cheminées hydrothermales. Ces évents, situés généralement au niveau des dorsales océaniques, à environ 4.000 mètres de profondeur, crachent en effet des fluides chauds, acidesacides et chargés en minérauxminéraux et plus particulièrement en sulfuressulfures polymétalliquespolymétalliques. En précipitant au contact avec l'eau de mer, ces sulfures vont s'accumuler pour former d'immenses cheminéescheminées, connues sous le terme de « fumeurs » noirs ou blancs.
D’énormes réserves de métaux posées au fond des océans
Or, ces manifestations hydrothermales sont très courantes au niveau des dorsales océaniques. Il s'agit d'ailleurs d'un processus essentiel dans la dynamique terrestre, puisque la circulation hydrothermale représente le mécanisme principal d’évacuation de la chaleur interne de la Terre. Les scientifiques estiment ainsi que plus d'un million de tonnes de sulfures de ferfer sont produites tous les cent ans par ce processus de minéralisation. Des quantités similaires à ceux des gisements terrestres.
Les plaines abyssales sont également riches en minerais, et plus particulièrement en manganèsemanganèse, fer, cuivre, nickelnickel et cobaltcobalt. Ces métaux se retrouvent sous la forme de petits nodules, directement posés sur le fond océanique, à très grande profondeur (de 4.000 à 6.000 mètres). Leur origine est encore mal comprise mais les scientifiques suspectent que le processus de formation serait ici très lent.
C'est donc une véritable réserve de minerais qui gît au plus profond des océans. Une réserve qui intéresse de plus en plus les sociétés minières. Avec l'augmentation des prix des métaux et face à la demande croissante, l'idée d'exploiter ces ressources est arrivée doucement sur le devant de la scène et elle est aujourd'hui clairement envisagée. Certaines compagnies se sont d'ailleurs déjà lancées dans la mise au point de matériels de prospection et d'exploitation robotisés, capables d'opérer à grande profondeur. Ces compagnies minières d'un nouveau genre attendent désormais l'autorisation d'exploiter les fonds marins. Une autorisation qui pourrait arriver plus tôt que prévu.
Les scientifiques mettent en garde contre l’impact écologique de ce type d’exploitation
Mais les scientifiques du consortium européen chargé d'évaluer les résultats de premiers tests d'exploitation restent sur la réserve. Si les enjeux économiques sont énormes, les considérations écologiques le sont tout autant. Car il est nécessaire d'évaluer quel pourrait être l'impact de ce genre d'exploitation minière sur les écosystèmes des fonds océaniques. Pour les scientifiques, il est encore beaucoup trop tôt pour savoir si les dommages causés seraient permanents où s'ils ne pourraient être considérés que comme « excessifs ». La question n'est donc pas de savoir s'il y aura ou pas des dommages, mais quelle sera leur intensité.
Les scientifiques estiment en effet que chaque opération minière mènerait chaque année à la destruction de 200 à 300 km2 de surface biologiquement active au niveau du fond marin. Les dommages causés seraient donc énormes pour la biodiversitébiodiversité et les fonctions des écosystèmes, même s'ils restent difficiles à estimer précisément.
Car c'est un fait, nous connaissons très mal les écosystèmes des grands fonds. Lors des phases de test, les scientifiques en charge du suivi des opérations ont en effet identifié des milliers de nouvelles espèces, inconnues jusque-là. Comment, dans ce cas, estimer l'impact d'une exploitation minière de grande ampleur ?
Un compte à rebours de deux ans
Pour les scientifiques, une décennie serait certainement encore nécessaire pour comprendre le fonctionnement de ces écosystèmes et envisager un début d'exploitation dans les meilleures conditions. Quelles espècesespèces seraient les plus mises en danger par ce type d'opération ? Lesquelles pourraient facilement se réimplanter ? Les premières études semblent montrer que les dommages seraient visibles sur le fond océanique pendant plusieurs décennies, affectant notamment les populations d'éponges, de coraux et d'anémones.
Mais un petit pays vient bouleverser le calendrier. Nauru, un petit État insulaire dans le Pacifique, vient de braver la communauté scientifique en imposant le rendu des conclusions sur les impacts environnementaux d'ici 2024. Un délai bien trop court pour les scientifiques ; 620 d'entre eux ont d'ailleurs signé une pétition pour instaurer un moratoiremoratoire jusqu'à ce que les conséquences pour l'environnement marin soient clairement établies. Mais, dans les faits, le début de l'exploitation minière des grands fonds pourrait bien débuter dans deux ans.
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