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Au-delà de perdre leur argent avec certains compléments alimentaires, les consommateurs risquent surtout de ruiner leur santé. Cela peut être le cas, pour certaines personnes, avec les vitamines Avitamines A et E mais aussi les vitamines D et les compléments à base de phyto-œstrogènesœstrogènes ou encore le bêtabêta-carotènecarotène. En la matière, les craintes des chercheurs et des médecins sont de plus en plus étayées et l'origine des problèmes semble très variée.
Certains compléments alimentaires peuvent être nocifs pour certaines personnes.
Les vitamines A et E, déconseillées aux femmes enceintes
C'est le cas de la vitamine A (ou rétinol) et de la vitamine Evitamine E, déconseillées aux femmes enceintes car elles peuvent engendrer des malformations congénitalesmalformations congénitales chez leurs bébés.
En outre, suite à plusieurs signalements d'effets indésirables - dont deux interruptions de grossessegrossesse - susceptibles d'être liés à des compléments alimentaires, enregistrés par son dispositif de nutrivigilance, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation (AnsesAnses) a décidé de se saisir du problème. Son comité d'experts spécialisés en nutrition humaine, appuyé par le groupe de travail Nutrivigilance, lui-même composé de douze spécialistes du domaine, vont analyser toutes les données scientifiques disponibles sur le sujet. Puis ils publieront leurs conclusions sous forme d'un avis rendu public.
Vitamine D et cancer du sein
Autre exemple, la vitamine D, dont les effets négatifs semblent subvenir de manière assez subtile. Grâce à la cohortecohorte Women's Health Initiative, qui comprend 36.282 femmes âgées de 50 à 79 ans, Jane A. Cauley, de l'université de Pittsburg, et d'autres chercheurs américains ont évalué durant 7 ans les effets de la vitamine D associée au calcium par rapport à un placebo.
Il est constaté que le risque de cancer du sein invasifinvasif a augmenté chez les femmes prenant plus de 600 UI par jour de vitamine D (l'UI, pour Unité nationale, correspond à la quantité d'un nutrimentnutriment par rapport à son activité biologique).
Pour comprendre ce phénomène, l'étude VitaOx, menée par Marie-Christine Boutron-Ruault et Mathilde Touvier, qui s'appuie sur la cohorte E3N d'environ 100.000 femmes volontaires françaises adhérentes à la mutuelle MGEN, nées entre 1925 et 1950 et suivies depuis 1990, « s'intéresse aux associations entre la prise de compléments de vitamine D, celle de traitements hormonaux de la ménopauseménopause et le risque de cancer du sein, du fait d'une interaction possible entre la vitamine D et les hormoneshormones sexuelles », indique Marie-Christine Boutron-Ruault. Par ailleurs, plus largement, l'étude SU.FOL. OM 3 a montré que, si la prise de compléments alimentaires n'avait pas d'incidenceincidence sur le risque de cancercancer pour les hommes, « ce risque a augmenté chez les femmes prenant des oméga-3oméga-3 », ont alerté les chercheurs.
Les compléments à base de phyto-œstrogènes parfois déconseillés
Toujours en matière de cancers, en l'occurrence hormonaux dépendants (sein, utérusutérus, ovairesovaires, prostateprostate, testiculestesticules), sont également sur la sellette les compléments alimentaires à base de phyto-œstrogènes, en particulier ceux issus des isoflavones de sojasoja dont la vertu le plus souvent avancée est la réduction des troubles liés à la ménopause.
Depuis le début des années 2000, diverses recherches fondamentales menées sur des cellules humaines et des modèles animaux de cancers montrent un lien entre ces composés et une prolifération des cellules cancéreuses, notamment mammaires, mais aussi prostatiques. C'est pourquoi, en 2005, l'Anses a rendu un avis déconseillant ces compléments alimentaires pour les personnes ayant, ou ayant eu, ce type de cancers, et bien sûr pour les malades traités avec le tamoxifène ou le lézotrozole, qui bloquent respectivement l'action et la fabrication des œstrogènes.
Cette dernière recommandation illustre bien un autre problème : les interactions avec les médicaments. Deux études publiées en 2012 montrent que ce phénomène est loin d'être anecdotique. Margaret Hsiang-Wen de la China Medical University de Taïwan et des chercheurs de l'université de l'Illinois de Chicago, qui ont passé en revue un grand nombre de publications sur le sujet, constatent que « les produits contenant du millepertuismillepertuis, du magnésium, du calcium, du fer et du ginkgoginkgo sont l'objet du plus grand nombre de publications sur les interactions avec des médicaments ».
Bêta-carotène et risque de cancer du poumon
Connaît-on vraiment les effets des compléments alimentaires d'un point de vue scientifique ? « Historiquement, cette question s'est posée une première fois dans les années 1990 avec le bêta-carotène, un antioxydantantioxydant, pour lequel les chercheurs avaient identifié des vertus anticancéreuses, explique Mathilde Touvier, de l'équipe de coordination de l'étude NutriNet-Santé. Logiquement, les médecins se sont dit qu'ils pourraient protéger les populations à risque ».
Deux essais cliniquesessais cliniques randomisés en double aveugle versus placeboplacebo ont alors été lancés. En Finlande, l'étude ATBC consistait à étudier les effets du bêta-carotène avec ou sans vitamine E, un autre antioxydant, sur la préventionprévention du cancer du poumoncancer du poumon chez 29.133 fumeurs.
Dans le même temps, aux États-Unis, c'est sa combinaison avec encore un antioxydant, la vitamine A, qui était évaluée chez 18.314 fumeurs, anciens fumeurs et travailleurs de l'amianteamiante (étude CaretCaret).
Or, les deux essais ont été arrêtés avant la fin car le risque de cancer du poumon avait augmenté de 18 % dans l'étude finlandaise et de 28 % dans l'américaine. Encore aujourd'hui, l'origine délétère du bêta-carotène chez les fumeurs n'est pas claire.