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La Terre prise en photo par l'équipage d'Appolo 17 (photo : NASA)
Il est incontestable que, la population mondiale dépassant actuellement 6 milliards d'individus et susceptible d'atteindre 9 milliards en 50 ans, le risque de destruction de la planète par l'homme n'a jamais été aussi grand au cours des 3000 dernières années de l'histoire de l'humanité. Toutefois, les questions essentielles restent posées. Le contact de l'homme et de la nature est-il vraiment à l'origine des changements à long terme de notre climat ? Quel est le degré de réalismeréalisme des prévisions apocalyptiques ?
Effet de serre
La Terre est une véritable oasis de l'espace. La planète bleueplanète bleue tant admirée par les astronautesastronautes se situe à environ 150 millions de kilomètres du SoleilSoleil. A cette distance, les parties immergées de la Terre devraient être gelées, c'est-à-dire recouvertes d'une couche de glace. Sur une Terre sans airair, la température moyenne de la surface de la planète aurait 33 °C de moins : elle seraitalors de -18 °C au lieu de +15 °C. Si la Terre ne gèle pas, c'est grâce à l'atmosphère. Ce sont plus précisément certains gazgaz retenant la chaleur, les gaz dit « à effet de serre », qui donnent à la Terre sa température douce et stable, favorable à la vie.
Les gaz à effet de serre, principalement la vapeur d'eau et le dioxyde de carbone, jouent un rôle majeur dans la régulation de la température terrestre car ils laissent passer les radiations solaires, mais absorbent certaines radiations infrarougesinfrarouges (chaleur) émises par la surface chaude de la Terre. Résultat : la température de l'atmosphère basse augmente.
D'autres gaz à l'état de traces tels que le méthane, l'oxyde d'azoteoxyde d'azote, l'ozoneozone et les chlorofluorocarboneschlorofluorocarbones (CFC) contribuent également au réchauffement de la planète. La plupart de ces gaz sont présents naturellement, mais ils peuvent aussi être générés par l'homme. Un accroissement des émissionsémissions de gaz à effet de serre causées par l'industrie et l'agricultureagriculture risque donc d'accentuer l'effet de serre naturel.
La température globale de la Terre est à son maximum comparée sur des siècles. De nombreux scientifiques établissent un lien entre le réchauffement et la montée constante de la concentration du dioxyde de carbone et d'autres gaz à l'état de traces dans l'atmosphère.
Il est indéniable que la concentration des principaux gaz à effet de serre a considérablement augmenté ces dernières années. La concentration de dioxyde de carbone dans l'atmosphère s'est accrue de près d'un tiers depuis 1750, essentiellement suite à la combustioncombustion de combustiblescombustibles fossilesfossiles et à des changements d'occupation des sols tels que la déforestationdéforestation. Des études de l'air enfermé dans des carottescarottes glaciaires de l'AntarctiqueAntarctique révèlent que le niveau actuel est au plus haut depuis au moins 420 000 ans, et peut-être 20 millions d'années.
On observe la même tendance pour beaucoup d'autres gaz à effet de serre. Les niveaux de méthane ont triplé depuis 1750, l'oxyde d'azote a augmenté de 17 % et l'ozone de l'atmosphère basse (la troposphèretroposphère) de plus d'un tiers. La situation se dégrade davantage étant donné l'influence indirecte de certains polluants artificiels, en particulier les oxydes d'azote et hydrocarbureshydrocarbures organiques, générant de l'ozone dans l'atmosphère basse.
Réchauffement de la planète
Les scientifiques s'accordent pour dire que la température moyenne du globe a augmenté d'un demi degré Celsiusdegré Celsius par rapport au siècle précédent, que la quantité de dioxyde de carbone dans l'atmosphère est en hausse depuis deux siècles et que le dioxyde de carbone est le gaz à effet de serre influant le plus sur le réchauffement de la planète. En outre, il est généralement reconnu que les années 1990 ont été la décennie la plus chaude et 1999 l'année la plus chaude depuis 1861, année où l'on a commencé à enregistrer les températures.
Toutefois, malgré les apparences, la communauté scientifique n'est pas en mesure de déclarer si le réchauffement est dû principalement aux émissions de CO2, s'il se poursuivra et, le cas échéant, s'il serait nocif.
« L'une des raisons de ces incertitudes, c'est que le climat est en perpétuelle évolution », dit Richard Lindzen, professeur de météorologiemétéorologie au Massachusetts Institute of Technology. « Il y a deux siècles, la majeure partie de l'hémisphère nordhémisphère nord sortait d'une courte période glaciairepériode glaciaire. Au Moyen-Age, cette même région a connu une période chaude. Et il y a trente ans, on s'inquiétait d'un refroidissement de la planète. »
En dehors des variations climatiques naturelles, les scientifiques s'acharnent à étudier les interactions complexes entre l'atmosphère, les océans, les terres émergées et la biosphèrebiosphère. Ce n'est qu'aujourd'hui, avec l'arrivée de superordinateurssuperordinateurs et de chaînes de données venant tout droit de satellites placés en orbiteorbite autour de la Terre, que les modèles climatiquesmodèles climatiques du globe sont suffisamment réalistes pour permettre des prévisions raisonnables et justes.
Cependant, même les modèles informatiques les plus perfectionnés ne peuvent pas prévoir l'avenir avec précision, d'une part parce qu'il existe des interactions complexes entre les systèmes naturels de la Terre, d'autre part parce que ces modèles se basent souvent sur des ensembles de données couvrant seulement quelques décennies.
Cette incertitude est exprimée dans le dernier rapport d'évaluation de l'IPCC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climatGroupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) qui estime la hausse de la température de la surface de la Terre en moyenne entre 1,4 °C au minimum et 5,8 °C au maximum sur la période de 1990 à 2100.
Equilibre du climat
Pour conserver une température globalement favorable, la Terre doit dégager une certaine quantité d'énergie thermiqueénergie thermique dans l'espace. L'énergie dégagée par la Terre se compose de deux éléments : les radiations thermiques émises par la surface de la Terre et l'atmosphère, d'une part, et les radiations solaires renvoyées par réflexion vers l'espace lointain par les océans, les terres émergées, les aérosolsaérosols (fines particules en suspension) et les nuagesnuages, d'autre part.
L'équilibre entre l'énergie émise par le Soleil, arrivant sur la Terre, et l'énergie dégagée par la Terre vers l'espace, appelé scientifiquement « bilan radiatif », détermine la température et le climat sur la Terre. Ce bilan dépend à la fois de variations naturelles et causées par l'homme, présentant aux scientifiques une large étendue de scénarios possibles à étudier.
Pour comprendre le climat, les scientifiques doivent donc déterminer ce qui fait varier le bilan radiatif de la Terrebilan radiatif de la Terre. Et c'est là précisément que les données de satellites jouent un rôle encore plus déterminant.
Les plates-formes mises en orbite autour de la Terre peuvent mesurer en permanence de nombreux indicateurs climatiques sur l'ensemble de la planète, ce qui était tout à fait impossible avant la conquête spatiale. En intégrant des données fournies par des instruments spatiaux, les scientifiques peuvent tester et améliorer la précision de leurs modèles climatiques de la planète. Cela donne enfin une image nouvelle du bilan énergétique du plus haut niveau de l'atmosphère à la surface de la Terre, en passant par tous les niveaux intermédiaires.
Notre Terre en perpétuelle évolution
Alors que les preuves dont on dispose laissent supposer que les activités de l'homme ont une influence perceptible sur le climat mondial, les modèles climatiques existants restent sceptiques quant aux origines de ces changements et à leur impact futur sur l'habitabilité de notre planète.
La massemasse de données qui nous vient tout droit des satellites de surveillance de l'environnement de nouvelle génération permettront de lever de nombreux doutes. Le plus puissant et le plus polyvalent d'entre eux est le satellite ENVISATENVISAT de l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne, le plus grand satellite jamais construit en Europe.
ENVISAT, dont le lancement est prévu au début de l'année prochaine, aura à son bord 10 instruments spécialement conçus pour étudier notre planète en perpétuelle évolution. La plupart de ces instruments auront une influence directe sur la recherche en chimiechimie atmosphérique et changements climatiqueschangements climatiques de la planète.
Un des rôles essentiels de la batterie d'instruments montés à bord d'ENVISAT sera de mesurer la concentration de vapeur d'eau, de gaz à l'état de traces et d'aérosols à différents niveaux de l'atmosphère, que l'on n'a pas réussi à quantifier correctement pour l'instant.
Ce rôle est particulièrement important car de fortes quantités de polluants artificiels tels que des composés de carbone, de chlorechlore, d'ozone, d'azote et de soufresoufre, ont été rejetés dans l'atmosphère tout au long du siècle dernier. Non seulement ces polluants agissent comme des gaz à effet de serre, mais ils modifient la structure chimique de la haute atmosphère, parfois de manière inattendue.
Il est également nécessaire de clarifier la fonction des aérosols et des nuages dans le système climatique du globe. En effet, ils peuvent à la fois absorber et disperser les radiations solaires, modifiant ainsi la quantité d'énergie arrivant à la surface de la Terre.
Les aérosols peuvent également augmenter la vitessevitesse à laquelle l'énergie solaire est renvoyée dans l'espace en favorisant la formation de nuages. Cependant, il est difficile d'évaluer dans quelles proportions ils modifient le climat de la Terre car ils varient considérablement en termes de taille, de forme et de composition chimique. Les capteurscapteurs installés sur ENVISAT nous permettent de connaître l'origine, la dynamique et enfin la disparition des aérosols.
Placé relativement proche de la Terre, ENVISAT surveillera également les changements des conditions en surface. Un enregistrement continu de la température de la surface des océans sera essentiel, étant donné que les océans absorbent au moins la moitié du surplus d'énergie thermique que reçoit la Terre, et ensuite transfèrent cette énergie des tropiquestropiques vers les pôles. ENVISAT sera aussi en mesure de surveiller les courants océaniques et les oscillations périodiques climat-océan comme le fameux El NiñoEl Niño se manifestant le long des côtes du Pacifique à quelques années d'intervalle.
Un autre instrument d'ENVISAT mesurera la couleurcouleur de l'océan, c'est-à-dire la concentration de chlorophyllechlorophylle dans les couches supérieures de l'océan. C'est un instrument important car il indiquera l'abondance de plantes et d'animaux microscopiques formant le planctonplancton. En surveillant la « floraison » des océans au printemps, les scientifiques pourront étudier l'activité biologique des niveaux supérieurs de l'océan et déterminer la quantité de carbone susceptible d'être stockée.
« L'absorptionabsorption de CO2 par les océans est des plus difficiles mais motivantes à quantifier », déclare le professeur David Llewellyn-Jones, responsable des sciences de l'observation de la Terreobservation de la Terre à l'Université de Leicester (Royaume-Uni). « Les océans dissolvent le CO2 qui est ensuite assimilé dans le système biologique marin et revient dans le cycle du carbonecycle du carbone. Les observations par satellite de la couleur des océans peuvent permettre de déterminer la productivité biologique à l'échelle du globe. L'instrument MERISMERIS installé sur ENVISAT fournira des données supplémentaires relatives à la productivité biologique des océans et à son influence ultérieure sur l'assimilation de CO2. »
De même, la surveillance de la végétation terrestre donnera de meilleures estimations de la quantité de carbone et d'énergie absorbée ou rejetée dans l'atmosphère. Ceci est crucial car des doutes considérables planent actuellement sur le budget de carbone de la planète.
Enfin, la cartographie par tous les temps des glaces et des terres depuis l'orbite donnera des indications fondamentales sur l'évolution climatique de la planète. Des études examinant si les calottes glaciairescalottes glaciaires et les glaciersglaciers se rétrécissent, avancent ou se retirent, donneront aux scientifiques des signes de changement climatique. En dehors des conséquences sur la hausse du niveau des océans et les inondationsinondations côtières, ces études nous informeront sur l'albédoalbédo de la Terre, c'est-à-dire la quantité de radiations solaires qu'elle renvoie par réflexion dans l'espace.
« Les échos radar en provenance des calottes glaciaires nous permettent d'estimer leur profondeur », dit Seymour Laxon du University College de Londres. « En mesurant les variations de la profondeur des calottes glaciaires de l'Antarctique et du Groenland, nous pouvons déterminer si elles s'étendent ou se rétrécissent et si le niveau des océans du globe en sera affecté. »
« Nous travaillons également avec le Hadley Centre for Climate Change (Centre Hadley sur les changements climatiques, au Royaume-Uni) pour intégrer les données relatives aux glaces de mer dans leurs modèles de changements climatiques », ajoute-t-il. « Ceci nous aidera à améliorer les prévisions réalisées par ces modèles. »
Les scientifiques sont unanimes sur le fait que le développement de modèles informatiques toujours plus complexes est essentiel pour une meilleure compréhension des changements climatiques à venir.
« Le seul moyen de savoir si les modèles climatiques sont justes est d'avoir les bonnes observations », dit le professeur Llewellyn-Jones. « Les observations nous disent ce qu'il y a, ensuite nous établissons un modèle pour décrire ce comportement et nous faisons des prévisions pour l'avenir. »
« Enfin, nous utilisons les observations pour vérifier nos prévisions », explique-t-il. « C'est la logique de toute la recherche sur le climat : être capable d'effectuer des prévisions exactes sur ce qui se produira à l'avenir. Et ceci ne serait pas possible sans les observations de satellites comme ENVISAT et des modèles informatiques encore plus perfectionnés. »