Des chercheurs de l’université de Copenhague ont trouvé que les patients souffrant de narcolepsie ont dans leur sang des lymphocytes T auto-réactifs. Cette découverte, qui suggère que ce trouble du sommeil est une maladie auto-immune, ouvre la voie à de nouveaux traitements.


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    La narcolepsie est une maladie chronique rare, qui touche une personne sur 3.000 à 5.000 en France, d'après l'Inserm. Elle apparaît entre 10 et 30 ans et se manifeste par une difficulté à rester éveillé et des endormissements irrépressibles. Le patient a parfois des hallucinations. Des médicaments existent pour traiter ces symptômes et rester en état d'éveil.

    Environ 70 % des patients souffrent aussi de cataplexie, une chute brutale du tonus musculaire. Cette narcolepsie de type 1, qui est la plus fréquente, se caractérise par un déficit en hypocrétine, une moléculemolécule qui contrôle l'état de veille : chez ces patients, les neurones qui produisent l'hypocrétine sont détruits. Cela fait plusieurs années que les scientifiques suspectent la narcolepsie d'être une maladie auto-immune (voir article ci-dessous). Cette nouvelle recherche qui paraît dans la revue Nature Communications en apporte une preuve supplémentaire.

    Pour préserver notre santé, notre système immunitaire doit reconnaître les agents étrangers à l'organisme, bactériesbactéries et virusvirus, afin de les éliminer. Mais parfois, des cellules dites « auto-réactives » s'attaquent à des cellules de notre organisme : c'est ce qui se passe dans des maladies auto-immunes, comme le diabètediabète de type 1, le psoriasispsoriasis ou la sclérose en plaquessclérose en plaques.

    Les lymphocytes T sont des globules blancs dont la maturation a lieu dans le thymus, d’où la lettre T. © sveta, Fotolia
    Les lymphocytes T sont des globules blancs dont la maturation a lieu dans le thymus, d’où la lettre T. © sveta, Fotolia

    Dans cette étude, des chercheurs danois ont analysé le sang de 20 personnes souffrant de narcolepsie et de 52 personnes en bonne santé. Pratiquement tous les patients avaient des lymphocyteslymphocytes T CD8 auto-réactifsréactifs. Ces lymphocytes T reconnaissaient des antigènesantigènes des neurones qui produisent l'hypocrétine. Les lymphocytes T CD8, aussi appelés « cytotoxiquescytotoxiques », détruisent des cellules infectées, tandis que les lymphocytes T CD4, aussi appelés « helpers », aident les autres cellules du système immunitaire à agir.

    Une prédisposition génétique à la narcolepsie

    Dans un communiqué, Birgitte Rahbek Kornum, qui a mené ces travaux, a expliqué : « Nous avons trouvé des cellules T CD8 cytotoxiques auto-réactives dans le sang de patients atteints de narcolepsie. C'est-à-dire que les cellules reconnaissent les neurones qui produisent l'hypocrétine qui régule l'état de veille du sujet. Cela ne prouve pas que ce sont elles qui ont tué les neurones, mais c'est un pas en avant important. » Cette découverte suggère que des médicament qui ciblent le problème immunitaire pourraient aider à traiter la narcolepsie.

    L’auto-immunité est en sommeil en chacun de nous mais n’est pas activée chez tout le monde

    Cependant, les cellules auto-réactives étaient également présentes chez des personnes en bonne santé : « Nous avons également trouvé des cellules auto-réactives chez certains des individus en bonne santé, mais ici, les cellules n'ont probablement pas été activées. C'est quelque chose que nous voyons de plus en plus souvent avec l'auto-immunitéimmunité - qu'elle est en sommeilsommeil en chacun de nous, mais n'est pas activée chez tout le monde. » La question se pose donc de savoir quel mécanisme active ces cellules auto-réactives. Deux pistes se détachent : une prédispositionprédisposition génétiquegénétique et/ou une infection.

    Il existe une prédisposition génétique à la narcolepsie, liée à la présence d'un allèleallèle particulier codant pour une molécule du complexe majeur d'histocompatibilitécomplexe majeur d'histocompatibilité (CMH). Par ailleurs, les auteurs signalent que, après la campagne de vaccinationvaccination contre le virus H1N1 en 2009-2010 et l'épidémieépidémie de grippegrippe H1N1, l'incidenceincidence de la narcolepsie a augmenté dans certains pays. Or, les lymphocytes T CD4 auto-réactifs qui ciblent l'hypocrétine réagissent également contre une protéineprotéine du virus H1N1, l'hémagglutininehémagglutinine. Chez la souris, il a été montré que des lymphocytes T CD8 qui réagissent contre l'hémagglutinine peuvent détruire des neurones qui fabriquent l'hypocrétine.


    La narcolepsie serait une maladie auto-immune

    Article de Destination santé paru le 24 décembre 2013

    Des chercheurs américains viennent de montrer que la narcolepsie, une pathologiepathologie qui rend les personnes très somnolentes, était une maladie auto-immune. Ce résultat leur a permis de mieux comprendre le lien entre le vaccinvaccin contre la grippe A(H1N1)grippe A(H1N1) et cette pathologie du sommeil.

    Caractérisée par une somnolencesomnolence anormale dans la journée, la narcolepsie est fréquemment associée à une cataplexie, autrement dit une perte soudaine de tonus musculaire. Environ 30.000 patients seraient concernés en France. Cependant, les causes de cette maladie ne sont pas encore clairement identifiées

    Des chercheurs de l'université Stanford en Californie (États-Unis) ont voulu creuser la question. Leurs recherches, publiées dans la revue Science Translational Medicine, suggèrent que la narcolepsie est une maladie auto-immune, pour laquelle le système de défense de l'organisme se retourne contre lui-même.

    Le vaccin contre la grippe H1N1 aurait causé quelques cas de narcolepsie. © Sanofi Pasteur, Flickr, cc by nc nd 2.0
    Le vaccin contre la grippe H1N1 aurait causé quelques cas de narcolepsie. © Sanofi Pasteur, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Cette étude est basée sur des résultats précédents montrant que la narcolepsie était en partie due à la mort des cellules cérébrales qui produisent l'hypocrétine, un neuropeptide stimulant l'éveil.  Les chercheurs états-uniens sont allés plus loin et ont montré que les malades présentaient un taux élevé de lymphocytes T anormaux réagissant à l'hypocrétine. En d'autres termes, la libération de ce neuropeptide induirait l'activation anormale des lymphocytes T et conduirait à une réponse immunitaire inappropriée.

    Le lien entre la vaccination anti H1N1 et la narcolepsie décrypté

    En juillet 2013, une étude française réalisée par l'équipe d'Yves Dauvilliers du centre hospitalier universitaire de Montpellier montrait pour la première fois une relation entre la vaccination contre la grippe A(H1N1) et l'apparition de quelques cas de narcolepsie en France. Cette publication était alors venue confirmer les résultats de travaux réalisés en Scandinavie en 2010.

    Les chercheurs ont découvert que le Pandemrix®, le vaccin anti H1N1 mis en cause dans l'étude française, contenait un fragment d'une protéine grippale proche de l'hypocrétine. Ce résultat suggère que cette molécule est l'agent déclencheur de la maladie. Cependant, seules quelques personnes sont tombées malades suite à la vaccination. Il est donc fort possible que d'autres facteurs soient en cause, comme des prédispositions génétiques.