Imaginez la moitié de la Corse dérivant dans l’océan, au gré du vent et des courants marins et vous aurez une idée du gigantisme de A23a, qui s’est détaché il y a peu des côtes de l’Antarctique. L’iceberg géant est désormais en route pour l’Atlantique Sud, sous l’œil attentif des scientifiques, qui redoutent un échouage sur les côtes de la petite île de Géorgie du Sud.


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    Auparavant échoué sur le fond de la mer de Weddell pendant près de 40 ans, A23a, monstre de glace de 400 mètres de haut, a entamé un voyage sans retour à travers l'océan Austral. Voilà plusieurs mois que les satellites scrutent les mouvementsmouvements du colosse, mais la situation a rapidement évolué au cours de novembre, comme le montre ces dernières images.

    Une vitesse de croisière de 5 km par jour, direction l’océan Atlantique Sud

    L'iceberg se déplace désormais à une vitessevitesse d'environ 5 km par jour. Il se situerait actuellement au niveau de la pointe de la Péninsule Antarctique, soit à la limite de l’océan Austral. Il est probable qu'il entre doucement dans le girongiron du grand Courant Circumpolaire de l’Antarctique, qui, à l'image d'une fronde, pourrait le propulser vers le nord-est, en direction de l'Atlantique Sud.

    L'iceberg A23a est suivi depuis plusieurs mois par les satellite. Son trajet est ici visible, depuis août 2011 jusqu'à ce mois de novembre 2023 © Nasa
    L'iceberg A23a est suivi depuis plusieurs mois par les satellite. Son trajet est ici visible, depuis août 2011 jusqu'à ce mois de novembre 2023 © Nasa

    Une menace pour la petite île de la Géorgie du Sud

    Deux trajectoires sont cependant possibles, chacune véhiculant son lot d'inquiétudes. La première option est que A23a prenne la direction de la Géorgie du Sud, petite île isolée dont la superficie est inférieure à celle de l'iceberg ! En s'échouant sur ses côtes, A23a pourrait ainsi grandement perturber les écosystèmes occupant l’île, notamment les populations de phoques, manchots et oiseaux de mers qui dépendent de l'accès à la mer pour se nourrir. La seconde option est que l'iceberg se dirige vers l'Afrique du Sud. Cette solution serait bien moins dommageable pour les écosystèmes marins, mais pourrait poser des problèmes de navigation, la région étant sillonnée de nombreuses routes maritimes.

    Déplacement de l'iceberg A23a entre le 2 novembre (bleu) et le 26 novembre (rouge) © données modifiées de Copernicus Sentinel (2023), données traitées par ESA, CC BY-SA 3.0 IGO
    Déplacement de l'iceberg A23a entre le 2 novembre (bleu) et le 26 novembre (rouge) © données modifiées de Copernicus Sentinel (2023), données traitées par ESA, CC BY-SA 3.0 IGO

    Mais un rôle de support pour l'activité biologique marine

    Il faut cependant garder à l'esprit que comme ses prédécesseurs, A23a a de fortes chances de se disloquer dans les eaux plus chaudes de l'Atlantique, bien avant d'atteindre la Géorgie du Sud. Outre la menace évidente qu'ils peuvent représenter pour certains environnements, les icebergs jouent également un rôle de support de l'activité biologique. Leur fontefonte libère en effet quantités de nutriments essentiels pour les organismes à la base de la chaine alimentaire marine.


    Le plus grand iceberg du monde est à la dérive !

    Un des plus grands icebergs du monde a entamé une rapide dérive au nord de l'Antarctique. Un phénomène que les scientifiques peinent pour l'instant à expliquer, et qui menace un vivier de biodiversité.

    Article de Camille AuchèreCamille Auchère publié le 27 novembre 2023

    L'iceberg A23a est un champion dans la catégorie des poids lourds : avec ses près de 4 000 km², ses 400 mètres de haut et son milliard de tonnes, il peut aisément contenir le département du Vaucluse, toiser de haut la Tour Eiffel et battre l'humanité tout entière à « qui c'est le plus gros », puisque l'ensemble de la population adulte pèserait 287 millions de tonnes... Bref, des dimensions ahurissantes, qui ne l'empêchent pourtant pas de se déplacer rapidement, mû par des courants et des ventsvents puissants. Vendredi, des scientifiques ont signalé que cela faisait plusieurs mois que le colosse dérivait au milieu de l'océan Austral. Aux dernières nouvelles, il était au bout du bras du continent Antarctique qui pointe vers le cap Horn, au sud de l'Argentine et du Chili.

    Une première en 37 ans

    En 1986, il s'était détaché de la plateforme Filchner-Ronne, une des gigantesques plaques de glace fixées au sol rocheux de l’Antarctique, avant de s'immobiliser sur le fond de la mer de Weddell (qui longe la côte est de la péninsule Antarctique). Il a finalement commencé à bouger en 2020, avant de complètement s'en défaire. Les raisons ne sont pas encore clairement identifiées, mais le réchauffement climatiqueréchauffement climatique n'est - pour l'instant - pas mis en cause. Il « s'est probablement légèrement amaigri au fil du temps et a obtenu un petit supplément de flottabilitéflottabilité qui lui a permis de décoller du fond de l'océan », détaille le glaciologue britannique Oliver Marsh pour Reuters.

    Une dérive qui menace la Géorgie du Sud, petite île située dans le bien nommé « couloir des icebergs », au sud de l'Atlantique où d'autres géants des glace flottent. Ne reste plus qu'à espérer qu'il connaîtra le même sort que A68, un iceberg parti à la dérive en 2020, et se sera disloqué d'ici-là pour épargner ce véritable vivier de biodiversité quasiment inhabité, où se reproduisent chaque année - entre autres - des millions de phoques, de manchots et d'oiseaux marins.