On l'attendait depuis 2019, en même temps que la première image du trou noir M87*. Elle est enfin là : la toute première photo de Sagittarius A*, le trou noir supermassif du centre de notre Galaxie !


au sommaire


    16h. Et voici une comparaison des deux trous noirs dont on a pu obtenir des images, M87*M87* et Sagittarius A*Sagittarius A* ! « Nous avons deux types de galaxies complètement différents et deux masses de trous noirs très différentes, mais près du bord de ces trous noirs, ils se ressemblent étonnamment », explique Sera Markoff dans le communiqué du CNRS, coprésidente du conseil scientifique de l'EHT et professeure d'astrophysique théorique à l'université d'Amsterdam, aux Pays-Bas. « Cela nous indique que la relativité générale régit ces objets de près, et que toute différence que nous voyons plus loin doit être due à des dissemblances dans la matière qui entoure les trous noirs. » 

    Sagittarius A*, le trou noir central de notre Voie lactée, apparaitrait minuscule face à M78* ! Du haut de ses 4 millions de masses solaires, il ne fait pas le poids face aux 6.5 milliards de masses solaires de M87*. © EHT Collaboration
    Sagittarius A*, le trou noir central de notre Voie lactée, apparaitrait minuscule face à M78* ! Du haut de ses 4 millions de masses solaires, il ne fait pas le poids face aux 6.5 milliards de masses solaires de M87*. © EHT Collaboration

    15h45. De nombreuses animations et informations s'ajoutent. Notamment, de multiples images qui explicitent à quel point le travail des chercheurs a été important : ils ont effectué une moyenne d'une quantité gargantuesque d'images. A présent, ils comptent comparer les deux images obtenues, qui correspondent à des trous noirs très différents : l'un pèse 4 millions de masses solaires - Sagittarius A*, tandis que l'autre représente 6.5 milliards de masses solaires, M87* ! « Nous avons des images pour deux trous noirs - un à l'extrémité large et un à l'extrémité petite des trous noirs supermassifstrous noirs supermassifs dans l'UniversUnivers - nous pouvons donc aller beaucoup plus loin dans le test du comportement de la gravitégravité dans ces environnements extrêmes que jamais auparavant. », a déclaré  Keiichi Asada, co-auteur de l'une des six études sorties dans la revue The Astrophysical Journal Letters, et chercheur à l'Institut d'Astronomie et d'Astrophysique de Taipei.

     

     

    15h35. On s'en doutait mais les chercheurs le confirment : la source Sagittarius A* est bien un trou noir ! « Nous avons été stupéfaits de voir à quel point la taille de l'anneau correspondait aux prédictions de la théorie de la relativité générale d'EinsteinEinstein », a déclaré Geoffrey Bower, scientifique du projet EHT, de l'Institut d'astronomie et d'astrophysique, Academia Sinica, Taipei. Le disque d'accrétiondisque d'accrétion effectue un tour autour de Sagittarius A* en seulement quelques minutes, contre plusieurs jours, voire semaines, pour M87*, expliquent les scientifiques. Cela signifie que la luminositéluminosité a changé rapidement durant les observations effectuées, compliquant ensuite les calculs pour obtenir une image.

    Le saviez-vous ?

    Découvert en 1974 par Bruce Balick et Robert Brownnom, d'abord en tant que source radio puissante et compacte, le trou noir de notre galaxie a été nommé Sagittarius A* car : « Sagittarius »  désigne la provenance de la source radio, donc la constellation du Sagittaire, « A » explicite le fait que c'est la source radio la plus brillante dans cette constellation, et « * » en référence à un état excité comme en physique fondamentale pour les atomes. En effet, les atomes visibles situés tout autour de l'horizon sont ionisés car chauffés à des températures extrêmes, donc ils sont dans un état dit excité. 

    Il est 15 h 07 : c'est une première mondiale, les chercheurs de l'EHT (Event Horizon Telescope) et de l'ESO (European Southern ObservatoryEuropean Southern Observatory) viennent de dévoiler la toute première image du trou noir Sagittarius A* ! « Nous avons été si proches, de nombreuses fois, précédemment. » a déclaré dans la conférence de presse le président de l'ESO, Xavier Barcons. Situé au centre de notre Galaxie la Voie lactéeVoie lactée à 27.000 années-lumièreannées-lumière de nous, ce monstre astronomique de 4 millions de masses solaires a un diamètre de son horizon qui atteint 6 millions de kilomètres, soit environ 15 fois la distance Terre-LuneLune.

    L'image obtenue est le résultat d'une moyenne effectuée sur des milliers d'images créées avec différentes méthodes de calculs. Elles peuvent être réparties en quatre groupes, visibles sur la photo. Trois des amas présentent une structure en anneau mais avec une luminosité distribuée différemment autour de l'anneau. Le quatrième groupe contient des images qui correspondent également aux données mais n'apparaissent pas en forme d'anneau. Les graphiques à barres montrent le nombre relatif d'images appartenant à chaque groupe. © EHT Collaboration
    L'image obtenue est le résultat d'une moyenne effectuée sur des milliers d'images créées avec différentes méthodes de calculs. Elles peuvent être réparties en quatre groupes, visibles sur la photo. Trois des amas présentent une structure en anneau mais avec une luminosité distribuée différemment autour de l'anneau. Le quatrième groupe contient des images qui correspondent également aux données mais n'apparaissent pas en forme d'anneau. Les graphiques à barres montrent le nombre relatif d'images appartenant à chaque groupe. © EHT Collaboration

    Des télescopes synchronisés dans le monde entier et 5 ans de calculs !

    Obtenir cette image n'a pas été chose facile ! Tout a commencé par une campagne d'observation en avril 2017 par interférométrieinterférométrie à très longue base, aussi appelée VLBIVLBI. Cette technique d'observation consiste à utiliser simultanément de nombreux radiotélescopes dans le monde, afin de créer l'équivalent d'un gigantesque interféromètreinterféromètre de la taille de la Terre. En procédant ainsi, la résolutionrésolution angulaire obtenue qui définit la plus petite taille angulairetaille angulaire que les chercheurs sont capables d'observer en détails, devient si infime que de nombreux objets habituellement invisibles deviennent visibles. C'est le cas de M87* et Sagittarius A*, deux trous noirs dont le diamètre apparent est similaire, et qui nécessitent une résolution que la VLBI peut atteindre. En effet, M87* est à la fois bien plus massif et bien plus éloigné que Sgr A*, avec ses 6.5 milliards de masses solaires et sa distance de 50 millions d'années-lumière, donc son diamètre visible depuis la Terre est équivalent à celui de Sgr A*.

    La collaboration EHT permet grâce à cette méthode d'atteindre le plus grand pouvoir de résolution angulaire dans le monde. Dedans s'y trouvaient lors de l'observation en 2017 huit radiotélescopesradiotélescopes situés partout sur le globe : Mexique, Chili, AntarctiqueAntarctique, Etats-Unis, Espagne. Dans chaque cas, l'antenne radio se trouve à haute altitude, afin d'éliminer au maximum la pollution atmosphérique. Ce procédé demande de plus beaucoup de préparation, car la synchronisation doit être parfaite. Ainsi, la seule campagne d'observation par cette méthode a eu lieu en 2017, plus précisément du 4 au 14 avril 2017.  Vient ensuite l'analyse des données ! Cette phase est toute aussi ardue que la première, et nécessite des super ordinateursordinateurs, appelés corrélateurs. Au total, ce sont plus de 350 personnes qui ont participé à cette prouesse technologique. C'est ainsi qu'en 2019, la toute première image de M87* a été dévoilée, mais pas celle de Sagittarius A*, à laquelle la communauté scientifique s'attendait aussi.

    À terme, la volonté des chercheurs est de tester la relativité générale

    Mais qu'apporte cette image, scientifiquement parlant ? Beaucoup de choses. Tout d'abord, obtenir la véritable apparence d'un trou noir permet de la comparer avec les modèles et simulations existants, afin de les corriger. Elle permet donc d'en savoir plus sur la physique des trous noirs. En effet, obtenir la dimension de l'horizon, également appelée ombre du trou noir, et la luminosité qui l'entoure donne de nombreux indices sur ses propriétés : sa taille bien sûr, sa masse, mais aussi et surtout la dynamique de son disque d'accrétion. Celui-ci est constitué par la matière que le trou noir attire vers lui, chauffée à très haute température et qui tournoie à des vitessesvitesses relativistes. En effet, il faut seulement 4 minutes et 30 secondes aux poussières qui constituent le disques pour effectuer une orbiteorbite autour du trou noir, qui rappelons-le a un diamètre d'horizon d'environ 6 millions de kilomètres !

    Elle permet aussi aux astronomesastronomes de tester la relativité générale établie par Einstein en 1916, dans le régime de champ fort : lorsque les particules deviennent relativistes. Ils regardent la courbure de la lumière causée par les effets gravitationnels, appelée « lentille gravitationnellelentille gravitationnelle » : le trou noir est si massif que la lumière ne suit pas un chemin linéaire lorsqu'elle passe à proximité. Cette capacité ouvre une nouvelle voie pour tester la relativité générale dans le régime de champ fort, étudier les processus d'accrétion et d'écoulement au bord d'un trou noir et sonder la physiquephysique fondamentale des trous noirs et l'existence même des horizons des événementshorizons des événements.