Les mesures fines de gravité que Cassini a effectuées au cours de six survols de Titan entre 2006 et 2011 indiquent l’existence d’un océan global souterrain. Une découverte qui fait de ce satellite de Saturne un des endroits du Système solaire où des formes de vies exotiques ont pu apparaître dans le passé.

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    Pour contourner l'absence d'instruments permettant d'étudier le sous-sol de TitanTitan, une équipe internationale de chercheurs a eu l'idée d'utiliser six survolssurvols rapprochés de Titan, effectués par la sonde Cassini entre février 2006 et février 2011. Pour en savoir plus sur sa structure interne, ces chercheurs ont mesuré les variations de son attraction gravitationnelle, qui font très faiblement varier la trajectoire de la sonde. Des mesures très fines rendues possibles grâce au réseau de l'espace profond de la Nasa (Deep Space Network, DSN), seul capable à ces distances de maintenir un lien très stable entre la Terre et la sonde Cassini.

    Il a donc été possible de mesurer et analyser les déformations de Titan causées par les effets de marée de SaturneSaturne. Au cours de sa rotation de 16 jours autour de la planète aux anneaux, la lune se déforme et induit des perturbations de son champ de gravité, que détecte Cassini, comme l'explique l'équipe de Luciano Iess, qui vient de publier ses résultats dans la revue Science.

    Structure interne de Titan telle que nous l'imaginons à partir de nos connaissances : atmosphère et surface riches en matière organique (<em>Organic-rich atmopshere and surface</em>), croûte gelée (<em>De-coupled icy shell</em>), océan de surface (<em>Global subsurface ocean</em>), glace à haute pression (<em>High-pressure ice</em>), cœur de roche (<em>Hydrous silicate core</em>). © A. Tavani

    Structure interne de Titan telle que nous l'imaginons à partir de nos connaissances : atmosphère et surface riches en matière organique (Organic-rich atmopshere and surface), croûte gelée (De-coupled icy shell), océan de surface (Global subsurface ocean), glace à haute pression (High-pressure ice), cœur de roche (Hydrous silicate core). © A. Tavani

    Un pari technologique gagné

    Concrètement, l'équipe de chercheurs a mesuré le nombre de Love, un quotient qui indique comment se redistribuent les massesmasses à l'intérieur d'un corps. Autrement dit, un corps comme Titan se déforme de façon différente si son intérieur est solidesolide ou liquideliquide. La valeur du nombre de Love oscille entre 0 pour un corps solide et parfaitement rigide et 1 pour un corps liquide.

    Pour Titan, la valeur mesurée est de l'ordre de 0,6, soit une déformation d'environ 10 m du sol. Cela corrobore les modèles de Titan comportant un océan profond qui conduisent à une valeur théorique de 0,4. Cette valeur est même supérieure à celle attendue si Titan est fait d'un cœur de roche surmonté d'un océan global, puis d'une croûtecroûte gelée.

    Pour les chercheurs, ce résultat suggère fortement qu'une couche globale interne à Titan se comporte comme un fluide sur une échelle de temps comparable à la duréedurée d'une orbiteorbite.

    Cette découverte confirme l'hypothèse faite par d'autres chercheurs qui ont analysé les signaux de l'atterrisseur européen Huygens, posé sur Titan en janvier 2005. Des ondes de basse fréquencefréquence (36 HzHz) étaient piégées entre deux surfaces conductrices séparées d'une cinquantaine de kilomètres. L'une est l'ionosphèreionosphère excitée par le champ magnétiquechamp magnétique de Saturne. Mais comme le sol de Titan est isolant (contrairement à la Terre), l'autre surface ne pouvait être qu'une étendue d'eau liquide souterraine rendue conductrice par de l'ammoniaqueammoniaque qui sert d'antigel.

    La découverte ne manque pas d'intéresser les spécialistes d'exobiologieexobiologie, qui aiment à penser que la vie a pu émerger sur Titan, même si la présence d'eau est nécessaire à l'apparition de la vie telle que nous la connaissons, mais n'est pas une condition suffisante...