En 2020, la pandémie de la Covid-19 avait fait reculer nos émissions de dioxyde de carbone (CO2). En 2021, elles sont reparties à la hausse. Comme jamais, nous précise aujourd’hui l’Agence internationale de l’énergie (AIE).


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    En pleine crise du gaz russe et malgré la plus forte croissance jamais enregistrée de la production d'énergie renouvelable, l'Agence internationale de l’énergie (AIE) annonce aujourd'hui que nos émissionsémissions de dioxyde de carbone (CO2) ont atteint, pour l'année 2021, un niveau sans précédent de 36,3 milliards de tonnes. Une augmentation historique par rapport à 2020. Et qui compense largement le déclin qui avait été induit par la crise sanitairecrise sanitaire.

    Selon les experts de l'AIE, ces mauvais chiffres s'expliquent par un rebond de l'économie, d'une part. Par des conditions météorologiques défavorables, d'autre part. Et par la flambée des prix du gazgaz fossile qui a eu pour effet immédiat d'augmenter les consommations de charbon. Un charbon dont la combustioncombustion émet plus de deux fois plus de CO2 que celle du gaz.

    Les émissions de dioxyde de carbone (CO<sub>2</sub>) de la Chine — des émissions ramenées par habitant — au cours de ces deux dernières années ont plus que compensé la baisse observée dans le reste du monde. © Agence internationale de l’énergie
    Les émissions de dioxyde de carbone (CO2) de la Chine — des émissions ramenées par habitant — au cours de ces deux dernières années ont plus que compensé la baisse observée dans le reste du monde. © Agence internationale de l’énergie

    La Chine, mauvaise élève

    Sur un plan plus strictement géographique, c'est notamment la Chine qui tient une part importante dans cette hausse des émissions. À elle seule et avec près de 12 milliards de tonnes CO2 émises, elle compte pour quelque 33 % des émissions mondiales. À la faveur d'une économie qui a poursuivi sa croissance malgré la pandémiepandémie de la Covid-19Covid-19. Et d'une demande d'électricité qui a augmenté comme jamais auparavant au cours de l'année 2021. Une électricité majoritairement produite dans des centrales à charbon.

    La bonne nouvelle vient tout de même des énergies renouvelables et du nucléaire qui, dans le monde, ont produit plus d'électricité que le charbon en 2021. La production renouvelable a même atteint un record de 8.000 térawattheures (TWh). C'est 500 TWh de plus que l'année précédente. Et même en Chine, jamais auparavant une progression aussi forte n'avait été enregistrée. Notamment grâce au solaire et à l'éolien. L'hydraulique ayant souffert de pas mal de sécheresses.


    Vers un nouveau record des émissions de CO2

    Le G20 Environnement, ClimatClimat et Énergie se tiendra à Naples les 22 et 23 juillet prochains. Au programme, notamment, placer la transition écologique au centre de l'agenda politique. Et à en croire le dernier rapport de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), il reste du chemin à parcourir pour cela. Les experts estiment en effet que loin de diminuer, nos émissions de CO2 vont continuer à augmenter fortement au moins jusqu'en 2023. Selon les experts, il n'y a pas de pic à l'horizon.

    Article de Nathalie MayerNathalie Mayer paru le 20/07/2021

    Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), nos émissions de dioxyde de carbone (CO<sub>2</sub>), l’une des principales causes du réchauffement climatique anthropique, devraient atteindre un niveau record en 2023. En cause, des plans de relance après la crise du Covid-19 pas suffisamment durables ! © Vital, Adobe Stock
    Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), nos émissions de dioxyde de carbone (CO2), l’une des principales causes du réchauffement climatique anthropique, devraient atteindre un niveau record en 2023. En cause, des plans de relance après la crise du Covid-19 pas suffisamment durables ! © Vital, Adobe Stock

    En 2020, la crise du Covid-19 a fait baisser nos émissions de dioxyde de carbone (CO2) -- faut-il le rappeler, principales responsables du réchauffement climatiqueréchauffement climatique anthropique que nous vivons actuellement -- pour la première fois depuis près de 30 ans. Une baisse de pas moins de 7 %. Mais, comme après la crise financière d'il y a 10 ans, les experts avaient déjà annoncé plus tôt dans l'année, que 2021 connaîtrait un rebond massif de nos émissions. Le deuxième plus important de l'histoire. En cause notamment, une relance centrée sur des investissements dans les combustiblescombustibles fossiles. Plus encore dans le charbon -- pour lequel les experts attendent une croissance de 5 % en 2021 et de 3 % en 2022 --, pourtant réputé le plus sale d'entre eux.

    Un record historique devrait être atteint en 2023.

    Aujourd'hui, l'Agence internationale de l’énergie (AIE) confirme la malheureuse tendance. Nos émissions devraient augmenter cette année, tout comme l'année prochaine. Pour atteindre un record en 2023, dépassant celui établi en 2018. Une prévision loin d'être en phase avec les objectifs de l'Accord de Paris. Car rappelons que les chercheurs estiment que pour réussir à limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C, il nous faudrait diviser nos émissions par deux au cours de cette décennie.

    L'AIE avance les chiffres suivants. En 2020, le monde a émis 31,4 gigatonnes (Gt) de CO2. En 2025, nous pourrions en être à 34,7 Gt et même à 33,9 Gt si les mesures durables annoncées aujourd'hui par les gouvernements sont mises en place. Or, pour atteindre l'objectif « zéro émissions » en 2050, il faudrait que nos émissions en 2025 ne dépassent pas les... 27,9 Gt !

    Des investissements trop faibles et mal répartis

    Le rapport de l'AIE souligne notamment que si plus de 320 milliards d'euros ont bien été investis par les États dans les énergies durables début 2021, cela ne représente que 2 % des mesures fiscales mises en place pour sortir de la crise économique liée à la pandémie de Covid-19. Et même si les États ont annoncé des investissements similaires d'ici 2023, cela ne représente, là encore, que 35 % de ce qu'un récent rapport de l'AIE estimait nécessaire pour se mettre sur la voie du « zéro émissions » d'ici 2050.

    Les experts pointent également d'importantes disparités géographiques. Ainsi les pays industrialisés comme les États-Unis, l'Europe ou le Japon semblent pouvoir être en passe de réduire leurs émissions. Les pays en développement ou les économies émergentes comme l'Inde ou les pays d'Amérique du sud, en revanche, seront bientôt responsables de 90 % de la croissance des émissions de CO2 annoncée.

    Le saviez-vous ?

    Une étude menée par Oxfam avec l’Institut de l’environnement de Stockholm (SIE) et parue il y a quelques mois dévoilait que les émissions de CO2 des Européens à revenu faible et moyen ont baissé entre 1990 et 2015, respectivement de 24 et 13 %. Et que celles des 10 % les plus riches ont en revanche augmenté de 3 %. Ainsi 10 % des Européennes sont désormais responsables de 27 % des émissions. Soit autant que la moitié la plus pauvre de la population.

    En parallèle, une autre étude montre que 25 mégapoles sont, à elles seules, responsables de plus de 50 % des émissions de CO2 urbaines.

    Un peu comme c'est le cas concernant la crise sanitaire, les scientifiques appellent donc les pays industrialisés ainsi que des institutions comme le Fond monétaire international (FMI) non seulement à intensifier leurs propres efforts pour une transition écologique, mais aussi à soutenir ceux des économies émergentes. À la veille de la tenue de la COP26, il est ainsi question d'accorder une aide d'au moins 85 milliards d'euros par an aux pays en développement pour financer des projets climatiques.

    Fatih Birol, le directeur exécutif de l'AIE et l'un des économistes de l'énergie les plus reconnus au monde, présentera ses conclusions devant les ministres concernés du G20, à la fin de cette semaine. Son objectif : les encourager ainsi à porter le principe d'une « reprise verte » dont nous avons tant besoin. « Il n'y a pas d'autre issu, assure-t-il. Mais il faut garder à l'esprit que, même si la marge de manœuvre se réduit, l'objectif reste atteignable ».