La nébuleuse d’Orion a déjà été observée maintes et maintes fois. Mais aujourd’hui, le télescope spatial James-Webb nous en renvoie des images tout simplement époustouflantes. Que les astronomes n'ont pas fini d'analyser.
au sommaire
La nébuleuse d’Orion, c'est l'un des objets les mieux connus des astronomesastronomes. Une pépinière d'étoiles située à « seulement » 1 500 années-lumière de la Terre. Tellement proche et active qu'elle en est visible à l'œil nu lorsque notre ciel est suffisamment sombre. La nébuleuse d'Orion - ou M42, Messier 42 - est sans doute la plus photographiée au monde. Mais ce sont aujourd'hui des images de la région d'une incroyable netteté que le télescope spatial James-Webb (JWST) nous offre de découvrir. Un zoom, notamment, sur la fameuse « barre d'Orion ». Des images époustouflantes, mais aussi riches d'enseignements pour les scientifiques.
Découvrez le télescope spatial James-Webb aux côtés d'Astropierre dans cet épisode de Futura dans les Étoiles. © Futura
« Ces images sont tellement détaillées qu'il nous faudra probablement des années pour les analyser entièrement, raconte Els Peeters, astrophysicienne, dans un communiqué de l’université Western (Canada). Elles serviront de référence pour la recherche en astrophysique pendant des décennies ». Grâce à la plongée qu'elles autorisent dans les environnements souvent chaotiques qui accompagnent la formation des étoiles.
Coup de projecteur sur une région où se forment des étoiles
Dans une série d'études publiées dans la revue Astronomy & Astrophysics, les chercheurs présentent aujourd'hui de premières analyses des processus physiquesphysiques et chimiques qui se jouent au cœur de la barre d'Orion. Plusieurs découvertes « surprenantes et majeures ».
Avant d'entrer dans le détail, rappelons que les étoiles se forment lorsque des régions trop denses dans de gigantesques nuagesnuages de gazgaz et de poussière s'effondrent sous leur propre gravitégravité. Il apparaît alors une protoétoileprotoétoile enveloppée de gaz et de poussières. Ces étoiles naissantes continuent de rassembler de la matièrematière jusqu'à ce qu'elles deviennent suffisamment massives pour déclencher la fusion nucléaire. Cela semble simple. Mais dans la réalité, lesdites régions trop denses n'ont pas toutes la même taille ou la même massemasse. Elles ne s'effondrent pas non plus toutes en même temps. Résultat, les pépinières d'étoiles se retrouvent avec des étoiles de masses variables à différents stades de leur développement dans un nuage chaotique de gaz et de poussière.
Pour comprendre comment se forment les étoiles, les astronomes doivent ainsi mieux cerner la physique et la chimiechimie de régions dites de photodissociation. Ils les appellent, les régions PDR. Et ce qui s'y joue est essentiellement déterminé par la façon dont le rayonnement ultravioletultraviolet des jeunes étoiles interagit avec les gaz et les poussières environnants. Des interactions qui donnent naissance à des structures comme la barre d'Orion.
La nébuleuse d’Orion sous son meilleur profil
La barre d'Orion, c'est donc une caractéristique en forme de crête qui fait la diagonale de la nébuleuse. Elle est composée des restes de gaz et de poussières à partir desquels les étoiles se sont formées. Elle correspond au bord d'une grande bulle creusée par certaines des étoiles massives qui alimentent la nébuleuse d'Orion. La transition entre le gaz ionisé chaud près des étoiles du Trapèze et le nuage moléculaire froid de l'autre côté.
Sur les images du télescope spatial James-Webb, des détails à couper le souffle apparaissent dans la barre d'Orion vue sous son meilleur profil. Des détails qui révèlent aux yeuxyeux des astronomes une structure plus complexe qu'ils ne l'avaient imaginé. Des gaz et de la poussière aussi bien au premier plan qu'à l'arrière-plan et que la qualité des images, expliquent les chercheurs, permet de séparer pour faire apparaître une sorte d'immense murmur.
Les données renvoyées par le JWST dans le domaine de l'infrarougeinfrarouge proche révèlent, quant à elles, la manière dont la composition chimique -- mais aussi la température, la densité et l'intensité du rayonnement -- de la barre d'Orion peut varier. Les analyses spectroscopiques, en effet, montrent de nombreux pics assez nets comme autant d'empreintes digitalesempreintes digitales de divers composés chimiques présents dans la région. Pas moins de 600 !
Les astronomes les ont utilisées pour améliorer considérablement les modèles existants des PDR. Et préciser comment les changements dans l'environnement physique affectent la chimie locale et vice versa.
Le JWST et l'intelligence artificielle pour percer les mystères de la nébuleuse d'Orion
Les chercheurs ont par ailleurs exploité les données renvoyées par le télescope spatial James-Webb pour essayer de comprendre les fortes variations jusqu'ici inexpliquées des émissionsémissions de poussière dans la barre d'Orion. Et les données ont apporté leur réponse. Elles pointent clairement l'atténuation du rayonnement par la poussière et la destruction efficace des plus petites particules de poussière comme cause sous-jacente de ces variations.
Les autres études publiées dans la revue Astronomy & Astrophysics s'intéressent aux émissions de grosses moléculesmolécules carbonées, les hydrocarbures aromatiqueshydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Ces dernières constituent l'un des plus grands réservoirs de matières carbonées de notre UniversUnivers. D'où leur importance dans l'histoire même de notre humanité. Et plus largement, dans notre compréhension de l'existence de la vie sur les planètes qui se forment autour de jeunes étoiles. Ce que les astronomes montrent aujourd'hui, grâce aux données du JWST et avec l'appui de l'apprentissage automatique, c'est que le rayonnement ultraviolet brise les molécules de carbonecarbone plus petites. Les émissions des molécules plus grosses, quant à elles, sont modifiées. Ce qui marque un changement très net dans la structure desdites molécules. Un autre enseignement de l'intelligence artificielle. Comme s'il existait un principe de survie du plus fort au niveau moléculaire dans les environnements les plus difficiles de l'espace.