Le dégazage de la comète interstellaire 2I/Borisov a été observé par une batterie d'instruments, notamment le télescope en orbite Swift de la Nasa. Il a permis aux chercheurs d'estimer la quantité d'eau extrasolaire libérée lors de son passage dans le Système solaire.


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    Le monde des exoplanètes nous fascine mais, malheureusement, même si une fraction de l'Humanité est occupée à développer un projet de sonde interstellaire via le projet Breakthrough Starshot, une nanovoile photonique propulsée par des faisceaux laser à destination des étoiles les plus proches du Soleil dans le système d'Alpha du Centaure, Homo sapiensHomo sapiens en est encore à faire ses premiers pas hors de son berceau, la Terre, dans le Système solaire.

    Pourtant, de la matièrematière issue d'un autre système planétaire est à sa portée depuis l'identification des premiers objets interstellairesobjets interstellaires traversant le Système solaire. Il y a d'abord eu le désormais légendaire 'OumuamuaOumuamua qui n'était pas sans faire penser au scénario du roman d'Arthur Clarke Rendez-vous avec Rama et dont on pense qu'il est peut-être né au voisinage d'une naine rouge. Il y a maintenant la comètecomète interstellaire 2I/Borisov.

    Une mission est envisagée pour tenter dans un avenir proche d'observer de plus près ces visiteurs interstellaires, et, pourquoi pas, en prélever des échantillons. Dans le cas de la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko, l'astrochimiste, exobiologiste et planétologue Olivier Poch, nous a récemment expliqué que son étude jetait une lumièrelumière nouvelle sur l'origine de l'azoteazote sur Terre, azote que la vie utilise de façon cruciale dans les protéinesprotéines et l'ADNADN. Une mission à destination d'une cousine de 2I/Borisov pourrait donc se révéler très bavarde sur l'exobiologieexobiologie et nous aider à comprendre à quel point la vie sur Terre est une rare occurrence dans une galaxiegalaxie, ou non.


    Une présentation des découvertes faites avec Swift concernant 2I/Borisov. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa Goddard

    Swift, des sursauts gamma aux comètes

    En attendant, les instruments dont s'est déjà dotée la noosphère du géochimiste Vladimir Vernadsky et du géologuegéologue et paléontologuepaléontologue Pierre Teilhard de Chardin, l'esprit collectif en quelque sorte des Homo sapiens, nous permettent déjà de sonder les arcanes de la formation des systèmes planétaires et de la chimiechimie prébiotiqueprébiotique qu'ils hébergeraient en plongeant dans la composition de la comacoma de 2I/Borisov. Ce fut le cas ces derniers mois avec le télescopetélescope HubbleHubble, le réseau de radiotélescoperadiotélescope Alma et on l'apprend maintenant via une publication d'un article dans The Astrophysical Journal et que l'on peut consulter en ligne sur arXiv, avec l'observatoire Neil Gehrels Swift de la NasaNasa.

    Comme le rappelle la vidéo ci-dessous, Swift a été développé pour étudier les sursautssursauts gamma, les explosions parmi les plus lumineuses de l'UniversUnivers. Mais il s'est avéré par la suite que les instruments qui équipaient ce satellite de la Nasa, et en particulier son télescope ultravioletultraviolet/optique (Uvot), pouvaient être utilisés dans d'autres domaines de l'astrophysiqueastrophysique. Le planétologue états-unien Dennis Bodewits de l'Université Auburn en Alabama s'en sert depuis quelques années pour étudier les comètes.

    Avec ses collègues, notamment Zexi Xing en thèse à l'Université Auburn, il a donc obtenu du temps de télescope avec Swifttélescope avec Swift pour prendre plusieurs clichés en ultraviolet de 2I/Borisov. Les chercheurs étaient notamment sur la trace des radicaux hydroxyles OH, des produits de la photodissociation des moléculesmolécules d'eau dégazées de la comète par le rayonnement ultraviolet du Soleil. Rappelons que selon le fameux modèle de la « boule de neige sale » proposé par l'astronomeastronome Fred Whipple au début des années 1950, les comètes sont des petits corps célestes glacés contenant de la matière primordiale datant des premiers temps de la formation d'un système planétaire. Dans le cas du Système solaire, des centaines de milliards seraient « au congélateur » dans la ceinture de Kuiperceinture de Kuiper et le nuage d’Oort à des milliards de kilomètres du Soleil.


    Une présentation des découvertes faites avec Swift. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa Goddard

    230 millions de litres d’eau extrasolaire dégazés

    En tant que comète, 2I/Borisov devait également contenir de la glace d'eau, mais aussi en plus faible quantité de dioxyde de carbonedioxyde de carbone (CO2).  Récemment, Hubble a permis de détecter également la présence en quantité atypique de monoxyde de carbone (CO) dans la chevelure de la comète à l'occasion de son dégazagedégazage sous l'effet du rayonnement chaud du Soleil, en particulier au plus proche de notre étoile. En combinant toutes les observations, on arrive finalement aujourd'hui à un premier portrait de 2I/Borisov que résume une déclaration de Zexi Xing : « Borisov ne s'intègre parfaitement dans aucune classe de comètes du Système solaire, mais elle ne se distingue pas exceptionnellement d'elles. Il existe des comètes connues qui partagent au moins une de ses propriétés ».

    Swift a permis de suivre la perte d'eau de la comète qui avait débuté à son approche à 370 millions de kilomètres du Soleil alors que 2I/Borisov fonçait à environ 161.000 kilomètres par heure sur une orbiteorbite hyperbolique sans retour à travers le Système solaire. Les astrophysiciensastrophysiciens ont ainsi vu une augmentation de 50 % de la quantité d'hydroxyle - et donc d'eau - produite par Borisov entre le 1er novembre et le 1er décembre, à sept jours seulement de son passage au périhéliepérihélie. Au pic de son dégazage, la perte d'eau s'élevait à 30 litres par seconde. Cumulée sur tout son temps d'activité la comète aurait libéré dans le Système solaire l'équivalent de 230 millions de litres d'eau extrasolaireextrasolaire. Toutefois alors qu'elle s'éloignait du Soleil, la perte d'eau de Borisov a chuté plus rapidement que n'importe quelle comète précédemment observée. Pour Zexi Xing, cela pourrait avoir été causé par une variété de facteurs comme un changement de rotation de la comète et même sa fragmentation qui a été mise en évidence fin mars.

    Toujours est-il que la perte d'eau a permis de préciser la taille de la comète dont on estime qu'elle est d'environ 0,74 kilomètre. Par contre, c'est au moins 55 % de sa surface qui se sublimait sous l'action des rayons du Soleil, ce qui est 10 fois la surface impliquée dans la majorité des comètes du Système solaire. Borisov leur ressemble néanmoins partiellement du point de vue chimique car Uvot a permis d'identifier des molécules comme C2 et l'amidogène dans environ 25 % à 30 % de toutes les comètes du Système solaire.