Les membres de la collaboration Event Horizon Telescope sont toujours occupés à nous préparer de nouvelles surprises avec l'imagerie des trous noirs supermassifs entourés de leurs disques d'accrétion. Ils viennent d'en livrer une concernant un zoom sur le plus lointain quasar observé avec le télescope géant virtuel de cette collaboration et il s'agit de NRAO 530.


au sommaire


    On se souvient des succès spectaculaires des membres de la collaboration Event Horizon Telescope qui ont réussi à presque voir l'horizon des événements de deux trous noirs supermassifstrous noirs supermassifs mythiques, celui derrière la galaxie elliptique géante M87M87 et celui derrière Sgr A*, la source radio au cœur de notre Voie lactée.

    À chaque fois, les images se sont montrées très similaires à celles calculées il y a plus de 40 ans par Jean-Pierre LuminetJean-Pierre Luminet. On pourra trouver des explications à ce sujet dans l'un des derniers ouvrages que le célèbre astrophysicienastrophysicien a publié l'année dernière, Les trous noirs en 100 questions, paru aux éditions Tallandier.

    Certes, à strictement parler, nous n'avons toujours pas une preuve que l'on pourrait considérer comme définitive de l’existence des trous noirs mais, depuis les premiers travaux sur leur sujet de Roger Penrose et Stephen HawkingStephen Hawking, il s'est tellement accumulé d'indications en ce sens qu'il devient de moins en moins rationnel de douter de leur existence. Ce qui bien sûr, en bonne application de l'épistémologie de Karl Popper, ne doit pas nous empêcher de faire passer encore d'autres tests à la théorie des trous noirs et également aussi à la théorie de la relativité générale qui devra peut-être un jour prochain s'effacer devant, par exemple, la théorie de la relativité intriquée.

    Une version des images de NRAO 530 obtenues dans le domaine radio par la collaboration EHT en utilisant plusieurs méthodes d'imagerie différentes, avec toujours le noyau du quasar situé vers la partie inférieure gauche de l'image et un jet s'étendant vers le haut (nord). Les températures de la matière déduite de son rayonnement sont indiquées en milliard de degrés kelvins. L'échelle des distances est indiquée en parsec (pc). Pour mémoire, un parsec vaut 3,26 années-lumière. © EHT Collaboration
    Une version des images de NRAO 530 obtenues dans le domaine radio par la collaboration EHT en utilisant plusieurs méthodes d'imagerie différentes, avec toujours le noyau du quasar situé vers la partie inférieure gauche de l'image et un jet s'étendant vers le haut (nord). Les températures de la matière déduite de son rayonnement sont indiquées en milliard de degrés kelvins. L'échelle des distances est indiquée en parsec (pc). Pour mémoire, un parsec vaut 3,26 années-lumière. © EHT Collaboration

    Les membres de l'EHT font toujours de nouvelles observations mais ils sont aussi occupés à traiter celles qu'ils ont déjà obtenues au cours des années précédentes au moyen de divers algorithmes de traitement des images. Rappelons à ce propos que ces images proviennent en fait d'observations de plusieurs radiotélescopesradiotélescopes répartis sur la Planète et que l'on peut combiner selon des techniques dites d'interférométrieinterférométrie par synthèse d'ouverturesynthèse d'ouverture et qui permettent d'avoir virtuellement l'équivalent d'un télescopetélescope de la taille de la Terre ou presque.

    NRAO 530, le plus lointain trou noir observé par l'EHT

    Un récent communiqué des membres de l'EHT -- accompagné une publication que l'on peut consulter en accès libre sur arXiv -- fait savoir que les astrophysiciens et les informaticiens impliqués ont analysé des données prises en 2017, concernant un trou noir supermassif bien particulier puisqu'il est responsable de l'énergieénergie phénoménale rayonnée par le quasarquasar NRAO 530.

    Le trou noir, très certainement en rotation, se trouve à environ 7,5 milliards d'années-lumièreannées-lumière de la Voie lactée et, tout comme dans le cas de certains noyaux actifs de galaxies, certes moins brillants, il produit des jets de particules.

    Il existe une théorie de ces jets qui fait intervenir un disque d'accrétiondisque d'accrétion contenant du plasma à haute température et alimenté en matièrematière notamment par des filaments de matière froide. De complexes processus de magnétohydrodynamique relativiste se combinent alors avec la rotation du trou noir pour accélérer des particules dans les jets.

    Les images obtenues avec plusieurs types d'algorithmes comme Smili, DMC et ThemisThemis ne résultent pas d'un zoom aussi spectaculaire que dans le cas de M87 mais elles montrent tout de même le quasar et un jet que l'on peut deviner.

    Les astrophysiciens peuvent tout de même tenter de comprendre la physiquephysique compliquée des quasars et de trouver des réponses à des questions telles que celles portant sur la manière exacte dont les jets sont alimentés et créés, et quel est le rôle des champs magnétiqueschamps magnétiques dans leur formation grâce à ces images.

    Une version plus brute des images de NRAO 530. Les contours montrent des régions d'égales intensités du rayonnement émis par le quasar et les tirets représentent la direction de la polarisation de la lumière observée, polarisation qui indique la structure d'un champ magnétique ordonné (EVPA). © EHT Collaboration
    Une version plus brute des images de NRAO 530. Les contours montrent des régions d'égales intensités du rayonnement émis par le quasar et les tirets représentent la direction de la polarisation de la lumière observée, polarisation qui indique la structure d'un champ magnétique ordonné (EVPA). © EHT Collaboration