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    Les OGM et l'environnement

    Les OGM et l'environnement

    Il est difficile de maîtriser les OGM et leur dissémination dans la nature. Pour protéger l'environnement, les expérimentations et les cultures sont bien encadrées par des directives européennes. Parole à Marc Fellous (INRA, UMR d'Agronomie, président de la Commission du génie biomoléculaire - Texte datant de 2002 mais dont les principes généraux restent vrais).

    Protéger l'environnement des effets des OGM grâce aux directives européennes. © ecoden.fr

    Protéger l'environnement des effets des OGM grâce aux directives européennes. © ecoden.fr

    Expérimentations de plantes génétiquement modifiées en France

    La constructionconstruction ou création d'un organisme génétiquement modifiéorganisme génétiquement modifié (OGM) puis son développement est un processus long qui se déroule en plusieurs étapes. Ce processus débute tout d'abord dans un laboratoire et comprend des expérimentations en milieu confiné in vitroin vitro, puis in vivoin vivo en enceinte climatisée, ensuite en serre pour déboucher éventuellement sur des expérimentations en milieu ouvert. Certains OGM, conçus comme outils scientifiques et destinés à améliorer la connaissance et la compréhension de la biologie des plantes, sont utilisés exclusivement en milieu confiné. L'expérimentation au champ est en revanche envisagée lorsqu'elle est nécessaire pour acquérir certaines données scientifiques ou qu'un développement de l'OGM à des fins commerciales est envisageable et techniquement possible. La succession des étapes et des expérimentations conduit à la construction de connaissances tant sur les caractéristiques intrinsèques de l'OGM que sur ses intérêts potentiels et sur les risques qu'il est susceptible de présenter pour la santé et l'environnement.

    C'est notamment sur la base de ces données que le développement de l'OGM en vue d'une valorisation dans le domaine agricole, industriel ou pharmaceutique peut être jugé intéressant. Le développement de l'OGM peut en revanche être abandonné, notamment par le pétitionnaire, si les données acquises montrent qu'il ne répond pas aux objectifs recherchés ou qu'il ne répond pas de manière satisfaisante aux exigences d'innocuité.

    Un champ de blé (OGM ?). © DR

    Un champ de blé (OGM ?). © DR

    Les essais au champ sont de plus, dans le domaine de la génomiquegénomique végétale et en particulier des OGM, la condition essentielle à l'évaluation des risques et des avantages potentiels liés à la culture et la commercialisation de plantes sur grandes parcelles. Dans le cas contraire, les connaissances sur le comportement de l'OGM dans les conditions naturelles et sur les risques potentiels qu'il peut représenter sur la santé publique et l'environnement ne seraient que parcellaires. Leur appréciation risquerait d'être trop exclusivement centrée sur des approches théoriques.

    Lorsqu'une utilisation commerciale de l'OGM est envisagée, l'expérimentation de plantes transgéniquesplantes transgéniques au champ est imposée par la réglementation européenne : la directive 2001/18/CE relative à la dissémination volontaire des OGM, remplaçant la directive 901220/CEE indique, « qu'il convient de n'envisager la mise sur le marché d'aucun produit consistant en OGM ou en contenant et devant faire l'objet d'une dissémination volontaire sans qu'il ait au préalable été soumis, au stade de la recherche et du développement, à des essais sur le terrain satisfaisants, dans les écosystèmesécosystèmes qui sont susceptibles d'être affectés par son utilisation ».

    Effets non intentionnels des plantes génétiquement modifiées

    Les isolements des essais par rapport aux cultures avoisinantes et les autres mesures qui sont prises pour limiter la dispersion de pollenpollen, de graines ou d'organes permettant une reproduction végétativereproduction végétative.

    1.) Facteurs affectant l'étendue de ces effets non-intentionnels

    Dans le cadre des disséminations expérimentales d'OGM, la taille des parcelles, le nombre de plantes expérimentées, la localisation de ces parcelles, et les conditions dans lesquelles est conduite la culture expérimentale, sont des facteurs pris en considération, en tant que facteurs qui affectent l'étendue des effets non-intentionnels considérés.

    Les effets non intentionnels sont fonction de plusieurs facteurs qui dépendent du caractère introduit, de l'espèceespèce concernée et du contexte général de l'utilisation de l'OGM. C'est ce qui justifie une approche d'évaluation sur la base du cas par cas, principe commun de l'évaluation des risques des OGM au sein de l'Union européenne.

    Le paragraphe 2 propose un inventaire des effets non intentionnels qui peuvent être imputés à des plantes génétiquement modifiées. Cependant, il convient de rappeler que la plupart de ces effets non-intentionnels ne sont généralement pas spécifiques des plantes transgéniques, mais peuvent concerner toute innovation dans le domaine de l'amélioration ou de la sélection végétale. Lors de l'évaluation, il est donc nécessaire d'effectuer la distinction entre les effets propres des plantes transgéniques et ceux relevant de problématiques plus larges.

    2.) Inventaire des effets non intentionnels possibles

    Les effets non intentionnels que les OGM sont susceptibles de produire lors d'une utilisation à une échelle d'ordre commercial, sont de plusieurs types : toxicologique, environnemental, agronomique et économique. Certains justifient une évaluation à priori, préalable à toute dissémination volontaire en particulier dans les étapes préliminaires qui relèvent de la recherche et du développement.

    • Effets non intentionnels sur l'environnement

    Les effets non intentionnels dépendent de l'espèce considérée et de sa capacité à disperser des gènesgènes dans l'environnement par la voie du pollen, des graines ou d'organes permettant une multiplication végétative. Suivant la nature des caractères introduits, l'OGM peut acquérir de nouvelles propriétés lui conférant un avantage sélectif par rapport aux autres variétés ou espèces végétales. Il peut en résulter des effets non intentionnels sur l'équilibre des espèces dans les écosystèmes, par prolifération dans l'écosystème de la plante transgénique elle-même ou de l'espèce interfertile qu'elle aurait fécondée.

    Les possibles conséquences, en particulier à long terme, de ces flux sur l'environnement peuvent être difficiles à évaluer. Ces possibles conséquences génèrent des préoccupations, plus importantes lorsqu'elles concernent des régions qui correspondent à des centres de diversité génétiquegénétique de l'espèce génétiquement modifiée expérimentée. La possibilité d'acquisition de plusieurs caractères génétiquement modifiés par une même plante doit également être prise en considération.

    Les OGM résistants à des ravageurs sont susceptibles d'exercer une pression de sélection favorisant la sélection de populations résistantes à la toxinetoxine exprimée par la plante. L'effet non intentionnel est alors lié à la possible prolifération de ces ravageurs du fait des difficultés qu'il y aurait à les maîtriser.

    Le relargage dans les sols de toxines natives ou modifiées secrétées par la plante est aussi une source d'effets non-intentionnels sur les écosystèmes du sol et, par voie de conséquence, de la diversité biologique dans l'environnement immédiat de la plante.

    Les plantes cultivées dans le cadre de l'expérimentation peuvent également avoir un effet non intentionnel sur les espèces « non cibles » de la faunefaune sauvage qui sont susceptibles de visiter les parcelles expérimentales.

    • Effets non intentionnels liés à la pratique agricole sur ces cultures

    L'utilisation d'OGM tolérants à un herbicideherbicide peut créer des effets non intentionnels indirects sur l'environnement, du fait de l'emploi des molécules phytopharmaceutiques sur ces cultures.

    En outre, il se pose aussi la question de possibles effets d'ordre économique, et du domaine de la gestion des espaces agricoles liés aux flux de gènes nouveaux vers des parcelles de productions commerciales. Il en découle des interrogations sur la coexistence, dans les mêmes espaces ou dans des espaces proches, d'expérimentation et de cultures commerciales, et plus largement sur la coexistence de différents modèles d'agricultureagriculture. Le choix de l'agriculture biologiqueagriculture biologique de n'accepter aucune utilisation d'OGM dans ses productions, ainsi que les revendications d'associations de consommateurs visant à pouvoir disposer du libre choix d'une alimentation sans aucune trace d'OGM, sont des préoccupations de cet ordre.

    Les critères d'ordre social ou économique ne rentrent pas dans le champ réglementaire de compétence des instances consultatives d'évaluation qui interviennent spécifiquement sur la question des organismes génétiquement modifiés. Les questions agronomiques qui relèvent de la gestion globale des espaces agricoles ne sont pas prises en compte dans le cadre de l'évaluation, au cas par cas, mais peuvent être abordées, dans le cadre de réflexion spécifiques, et faire l'objet de recommandation dans des avis de portée générale de la Commission du génie biomoléculaire.

    Moyens de prévention pour limiter les risques

    1.) Clauses d'exclusion

    L'évaluation préalable des risques est le premier élément qui conduit à la préventionprévention des risques.

    Toute expérimentation de plante génétiquement modifiée est subordonnée à une évaluation des risques préalable. Cette évaluation des risques s'appuie sur un dossier scientifique et technique. Ce dossier apporte des informations relatives à l'innocuité pour l'homme et pour l'environnement de la «nouvelle construction génétique ». L'évaluation vise à exclure tout dossier pour lequel l'information serait jugée insuffisante ou révèlerait des risques avérés.

    Des éléments sur l'origine, l'historique et la longueur de la séquence des gènes et de la construction génétique transférée dans l'organisme hôte doivent être connus. Les informations précisent dans quel compartiment cellulaire de l'hôte, cette construction génétique est susceptible d'être insérée (noyau, organitesorganites, cytoplasmecytoplasme). Les évaluations s'appuient aussi sur les informations disponibles sur l'organisme qui reçoit la construction génétique.

    2.) Limitation des disséminations non intentionnelles

    Un problème se pose : celui de la dissémination non intentionnelle dans l'environnement de transgènes issus de l'OGM. © DR

    Un problème se pose : celui de la dissémination non intentionnelle dans l'environnement de transgènes issus de l'OGM. © DR

    Les mesures prises autour des essais visent à limiter à un niveau très faible la possibilité de dissémination non intentionnelle dans l'environnement des transgènestransgènes issus de l'organisme génétiquement modifié expérimenté. Les mesures préconisées et imposées par la décision individuelle d'autorisation d'expérimentation au champ, sont définies en fonction des conclusions de l'évaluation des risques conduite au préalable. Elles sont donc déterminées au cas par cas en fonction des caractéristiques biologiques de l'espèce considérée, du niveau de connaissance sur l'événement de transformation considéré et des objectifs de l'expérimentation.

    Des mesures d'isolement, reproductif, géographique ou physique permettent d'assurer une limitation de la dispersion des transgènes par la voie du pollen, des graines ou d'organes permettant une multiplication végétative.

    • Isolements reproductifs

    Dans le cas d'isolement reproductif strict, les plantes expérimentées ne produisent ni pollen, ni graines : les fleurs ou inflorescencesinflorescences sont éliminées de la plante dès leur apparition. L'isolement reproductif est assuré par exemple par la castration des organes mâles de la plante génétiquement modifiée, par des systèmes de stérilité-mâle ou la disjonction des périodes de floraison entre les plantes expérimentées et les plantes cultivées à proximité. Un suivi régulier assure une élimination complète des organes de reproduction des plantes.

    • Isolement géographique ou physique

    Les isolements géographiques ou les mesures physiques d'isolement ont un effet moins radical sur la réduction de cette dispersion. Dans ce cas, les plantes génétiquement modifiées expérimentées se reproduisent pendant la période de l'essai. La distance d'isolement est déterminée en fonction des caractéristiques de dispersion du pollen de la plante. L'objectif est de créer une zone tampon entre la parcelle expérimentale de l'OGM et les cultures avoisinantes dans le but de réduire la probabilité de fécondationfécondation croisée entre l'OGM et la plante cultivée de la même espèce, ou compatible avec celle­-ci. Des isolements utilisant des mesures physiques comme par exemple la pose de filets sur les plantes ou de sachets sur les inflorescences limitent encore plus cette probabilité, mais elles imposent un suivi plus important et ne sont pas techniquement réalisables lorsque le nombre de plantes est important. Enfin, des dispositifs complémentaires, constitués de plantations périphériques de plantes non transgéniques, sont souvent recommandés en complément.

    3.) Suivi avant et après les récoltes

    Les mesures d'isolement se complètent par d'autres dispositions qui assurent un contrôle des plantes et de leur dispersion. Ces dispositions portent notamment sur la surveillance et la destruction des plantes susceptibles de constituer des relais de dissémination des transgènes. Il peut s'agir de plantes de la même espèce ou d'espèces apparentées présentes sur le bord des routes ou des chemins. La fécondation de ces plantes par le pollen de la plante génétiquement modifiée permettrait la production d'hybrideshybrides susceptibles, l'année suivante, de disperser à leur tour le transgène dans l'environnement.

    Des mesures de gestion des parcelles permettent d'éviter l'enfouissement en profondeur des graines tombées au sol, et d'assurer le contrôle des repousses qui pourraient en découler les années suivant l'expérimentation. Elles visent également, le cas échéant, au contrôle des organes de multiplication comme les tuberculestubercules de pommes de terrepommes de terre ou les éclats de racine de betterave. Ces opérations de gestion et de surveillance concourent au même titre que les mesures d'isolement au contrôle de la dissémination involontaire des transgènes.

    Données relatives à la dispersion des gènes

    1.) Conséquences de la dispersion pollinique

    Les conditions en cadrant la production de semences permettent de garantir une pureté variétale conforme aux exigences d'une production de qualité. Un règlement technique de production définit notamment les modalités permettant d'assurer une maîtrise des pollutions polliniques provenant de l'extérieur de la parcelle de production (flux entrant). Le résultat de ces mesures s'exprime à travers les taux de pureté variétale mesurés dans les lots de semences de base (SB) ou de semences certifiées (SC) commercialisées. Ces taux de pureté variétale sont de bons indicateurs des effets des mesures d'isolement sur les probabilités de fécondation croisée au-delà d'une certaine distance.

    Ces valeurs ne sont pas directement transposables pour déterminer le taux de fécondation à attendre à partir d'une parcelle vers les parcelles extérieures (flux sortant). Les expérimentations et l'analyse d'échantillons sur des parcelles placées à proximité de la source de pollen issus de plantes génétiquement modifiées, apportent des informations complémentaires sur cet aspect. La mesure des taux d'impureté variétale dans les échantillons permet d'évaluer l'efficacité des distances d'isolement sur la diffusion de pollen depuis la parcelle considérée vers les parcelles voisines. Ce sont des indicateurs pertinents des flux de gènes depuis la parcelle expérimentale de plantes transgéniques (flux sortant).

    Des analyses de ce type ont été conduites, notamment en France, dans le cas de différentes espèces comme le maïsmaïs, le colza et la betterave.

    Discussions et recommandations

    • Pour l'environnement

    En ce qui concerne l'impact environnemental des herbicides, les surfaces limitées des cultures expérimentales permettent de considérer qu'un tel impact est limité dans le temps et l'espace. En outre, si les plantes génétiquement modifiées sont nouvelles, les herbicides considérés ne le sont pas et sont déjà autorisés à la mise sur le marché pour d'autres usages, et ont donc fait l'objet d'une évaluation toxicologique et écotoxicologique.

    Du fait de leur nombre et de leurs surfaces, les cultures expérimentales d'OGM résistants à des ravageurs ne sont pas susceptibles d'exercer une pression de sélection notable, et de suffisamment longue duréedurée, pour favoriser la sélection de populations de ravageurs résistants. Des effets non intentionnels liés à la possible prolifération de ravageurs résistants, du fait de ces cultures expérimentales, ne sont donc pas à craindre. On rappellera que l'une des principales mesures de gestion du risque d'émergenceémergence de ravageurs résistants, est de préserver des zones refuge (i.e. sans culture d'OGM) de suffisamment grande taille. Dans ce cas, on peut donc considérer que la zone refuge est constituée par les cultures conventionnelles couvrant le territoire national.

    Les contraintes d'isolement et de surveillance qui entourent les essais semblent apporter des éléments de garantie, quant à l'absence de conséquences de ces expérimentations de plantes génétiquement modifiées sur l'environnement.

    Il en ressort que dans les conditions actuelles où sont conduites les expérimentations d'OGM au champ, les risques paraissent encadrés et limités. En outre, si l'Union européenne s'est dotée d'une législation commune en matièrematière d'OGM, elle laisse à chaque État membre la possibilité d'adopter des mesures de gestion des risques, qui lui sont propres. Il convient de constater que les mesures d'isolement et d'encadrement des essais adoptées par la France sont parmi les plus contraignantes d'Europe en termes d'isolement et de suivi des essais.

    Cependant, le manque de certitudes sur les potentiels effets non intentionnels résiduels doit inciter à la prudence et justifie une évaluation des risques préalable rigoureuse. Les expérimentations constituent un moyen important pour acquérir des informations précises sur les effets non intentionnels des OGM, et doivent permettre ainsi de faire évoluer, le cas échéant, les dispositifs en place.

    • Que dire de la coexistence des essais avec divers types d'agriculture ?

    La coexistence de différents modèles agricoles est une question qui se pose déjà actuellement entre la culture conventionnelle et la culture biologique. Le principe même d'une éventuelle coexistence suppose tout d'abord de reconnaître un droit égal à exister pour chacun des modèles choisis librement par les uns ou les autres.

    L'agriculture biologique a opté pour la non utilisation (à l'exception des médicaments vétérinairesvétérinaires), de produits génétiquement modifiés, ou de produits qui en sont issus, ainsi que de semences ou de plants obtenus à partir d'OGM (Règles de production - Article 6 du règlement 2092/91 du 24 juin 1991 modifié). Cependant, comme dans le cas des produits de traitement phytopharmaceutiques, également considérés dans les règles de production de ce même règlement européen, il s'agit là d'une obligation de moyens et non pas d'une obligation de résultats quant à une absence totale des molécules considérées, dans les produits finis.

    Il en ressort que, de la même manière que l'agriculture biologique est capable de coexister avec une agriculture conventionnelle, utilisant des produits phytopharmaceutiquesproduits phytopharmaceutiques, elle pourrait l'être face à une agriculture utilisant des plantes génétiquement modifiées, qu'il s'agisse de cultures de plantes génétiquement modifiées à titre commercial ou expérimental. Cette coexistence suppose cependant que les partenaires, du producteur aux consommateurs, reconnaissent clairement que les productions issues de l'agriculture biologique sont acceptables lorsqu'elles présentent des traces d'OGM alors que l'agriculteur a, en toute bonne foi, utilisé des semences vendues comme conventionnelles. Cette coexistence suppose également la définition de cahiers des charges précis et de seuils de tolérance.

    En outre, dès lors que des variétés de plantes génétiquement modifiées ont été autorisées au niveau communautaire à la mise sur le marché, cette question de coexistence n'est plus spécifique de la question de l'expérimentation au champ de telles plantes.

    • Quel type d'essais admettre ?

    Les expérimentations au champ doivent s'inscrire dans une démarche rigoureuse contribuant à l'acquisition de connaissances indispensables, à l'élaboration d'une expertise indépendante et accessible, au contrôle et au suivi transparenttransparent des plantes transgéniques. Dans la logique de ces finalités, on peut distinguer une gradation des expérimentations en deux ordres.

    Les essais de premier ordre fournissent des réponses indispensables et nouvelles à des questions qui ont déjà été abordées et non résolues par des expérimentations en milieu confiné. Il est donc nécessaire de soumettre les plantes génétiquement modifiées à des conditions environnementales de milieux ouverts. Ces essais apportent des éléments nouveaux de compréhension. Ceci peut concerner la conception ou la mise au point de méthodologies, l'appréciation de l'efficacité agronomique d'événements de transformation sous diverses conditions agro-climatiques, la caractérisation et l'évaluation des risques, ou enfin la production de matériel transgénique pour des essais ultérieurs ou pour des études d'alimentarité ou de toxicologietoxicologie. Dans tous les cas, la justification de mettre en place des essais peut être étayée par des résultats obtenus en serre confinée ou dans d'autres lieux. Les approches expérimentales et la modélisationmodélisation pourront être couplées chaque fois que la complémentarité des apports fournira des résultats ou des questions nouvelles. Ces essais sont conduits aussi bien par des laboratoires publics que privés. Les expérimentations de premier ordre concernent aussi bien les essais de niveau 1, 2 ou 3. Ainsi la caractérisation et l'évaluation des impacts sur l'environnement biotique ou abiotiqueabiotique peuvent exiger la conduite d'expérimentation sur plusieurs hectares pendant plusieurs années. Dans la mesure où ces expérimentations fondent une partie de leur légitimité sociale sur le fait qu'elles apportent des informations inédites, il est indispensable que les résultats relatifs à l'évaluation des risques en soient largement diffusés, qu'ils soient issus du secteur public ou privé. Suivant certains experts, l'incapacité à conduire des essais du premier ordre sur le territoire national ne serait pas sans conséquences sur le dynamisme de la recherche française et sa capacité à acquérir, en propre, des données et des connaissances.

    Les expérimentations du deuxième ordre ont pour vocation de confronter les données déjà acquises aux exigences de la réglementation ou à celles du développement. Ils se mettent en place uniquement au niveau 3 conformément aux exigences de la réglementation européenne décrite précédemment.

    • Comment organiser ces essais et les gérer ?

    Les effets non intentionnels de parcelles expérimentales dépendent des caractéristiques de la plante génétiquement modifiée ainsi que de facteurs liés aux conditions expérimentales, tels que la taille des parcelles. Les données précises sur ces différents effets ne sont pas toujours bien connues d'autant qu'elles dépendent de différents facteurs. Ces effets potentiels dépendent pour une large part de la dispersion du pollen dans l'environnement.

    La localisation géographique est donc un facteur important à considérer dans la gestion des expérimentations au champ, à la fois en terme de distance de l'essai par rapport aux espèces végétales sexuellement compatibles, et de site d'implantation de l'essai. Les distances d'isolement géographique et reproductif actuellement appliquées permettent de limiter les risques de présences fortuites dans les semences conventionnelles à un niveau faible.

    En ce qui concerne la dispersion pollinique, il apparaît logique de considérer que plus la distance est grande, plus la probabilité de fécondation croisée est faible. Toutefois, les données acquises montrent qu'au-delà d'une certaine distance, la probabilité de fécondation croisée se maintient à un niveau très faible. Suivant les connaissances acquises chez la plupart des espèces allogames, la dispersion du pollen décroît, en effet, de manière exponentielle à courte distance à partir de la source (spécifique de l'espèce considérée) puis se maintient à un niveau très faible (quelques pour mille) sur des distances plus longues (spécifiques de l'espèce considérée). Il semble donc difficile de prédire de façon fiable, le taux de dispersion dans le cas de ces distances plus longues du fait que la loi de décroissance ne peut pas être déterminée à partir des données actuellement disponibles. En outre, la dispersion du pollen est variable suivant l'espèce considérée. Elle dépend de ses caractéristiques biologiques et notamment de la taille, du poids et de la forme du pollen. La dispersion du pollen sur de longues distances est soumise à des facteurs variables parmi lesquels l'hétérogénéité du paysage (haieshaies, rivières ...) et le transport par les animaux. La durée de vie du pollen et sa capacité de germination qui en découle, sont des paramètres importants également à prendre en considération, puisque ce n'est pas la dispersion en tant que telle qui importe, mais les conséquences de cette dispersion.

    L'ensemble de ces éléments permet donc de considérer que l'accroissement des distances d'isolement actuellement définies n'aurait que peu d'incidenceincidence sur la réduction de la probabilité de fécondation croisée entre la plante génétiquement modifiée et d'autres plantes. En outre, les données disponibles sur la dispersion possible par d'autres moyens que le pollen (graines, organes permettant une reproduction végétative...) sont plus fragmentaires que celles disponibles sur le pollen. Elles devraient être prises en compte pour fonder valablement de nouvelles mesures limitant la dispersion à longue distance. Un effort dans ce domaine de recherche devrait donc être encouragé. De même, un complément d'attention devrait être porté sur la question des effets non-intentionnels qui concernent le patrimoine naturel (flore et faune). Ces effets sont actuellement moins connus, moins bien évalués et justifient un effort particulier.

    Tout en considérant que des parcelles de petite taille sont souvent suffisantes pour obtenir certaines informations, des expérimentations à grande échelle peuvent aussi être nécessaires. Comme la taille des parcelles expérimentales a également une influence sur la probabilité d'apparition des effets non intentionnels, une gestion plus globale de l'implantation des parcelles dans l'espace est souhaitable notamment lorsque les essais concernent plusieurs sites.