À l’occasion des 20 ans de Futura, Jean Jouzel, le climatologue vice-président du Giec, s’associe à la rédaction pour vous proposer, tout au long de cette journée spéciale, des sujets qui interpellent. Il se pose, notamment avec nous, la question des extrêmes. Car, dans ce monde qui globalement se réchauffe, les événements climatiques extrêmes, autrefois plutôt rares, deviennent de plus en plus fréquents. De plus en plus intenses aussi. Avec de graves conséquences pour la Planète et pour nos sociétés.


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    Dans ces quelques lignes, je souhaite redire l'urgence de la lutte contre le réchauffement climatique et mon regret, teinté de colère, qu'à la sortie de la pandémiepandémie, nous ne repartions pas du bon pied. Au cours des dernières décennies notre climat a globalement évolué comme le prévoyaient les premières simulations réalisées à partir des années 80 et dont les rapports successifs du Giec, le Groupe Intergouvernemental d'experts sur l'Évolution du Climat, rendent compte. Ceci vaut aussi bien pour le rythme du réchauffement proche -- en moyenne, de 2 dixièmes de degré par décennie -- que pour l'amplification annoncée de ce réchauffement dans les hautes latitudes de l'hémisphère Nord, pour l'élévation du niveau de la mer désormais proche de 4 mm/an, le double de ce qu'il au XXe siècle, ou pour l'évolution aujourd'hui perceptible de certains événements extrêmes -- sécheressessécheresses, inondationsinondations, caniculescanicules, cyclones -- désormais plus intenses ou plus fréquents, au moins régionalement.

    Le réchauffement de l’atmosphère, des océans et des continents est dû à nos activités

    Cette anticipation tout à fait correcte de l'évolution du climat à l'échelle des dernières décennies vient d'être confirmée par le premier volet du 6e rapport du GIEC adopté en août dernier. Y est affirmée la certitude que le réchauffement de l'atmosphèreatmosphère, des océans et des continents est dû à nos activités ; qui plus est l'ensemble du réchauffement observé depuis le début du XXe siècle peut leur être attribué. Ce double constat nous invite à prendre au sérieux ce que notre communauté scientifique y envisage d'ici une trentaine d'années et au-delà.  

     CO<sub>2</sub> et effet de serre. © Graphithèque, Adobe stock
     CO2 et effet de serre. © Graphithèque, Adobe stock

    Chaque demi degré compte !

    Dès 2007, le Giec mettait en avant 2020 comme devant être une année charnière à partir de laquelle les émissions de gaz à effet de serre devraient commencer à diminuer si l'on voulait qu'à long terme le réchauffement lié aux activités humaines soit limité à 2 °C par rapport aux conditions préindustrielles. En 2015, l'Accord de Paris inscrit aussi l'objectif plus ambitieux d'un réchauffement limité à 1,5 °C et, en 2018, les scientifiques du Giec nous disent que chaque demi degré compte. Et que cette ambition est justifiée si l'on veut que les jeunes d'aujourd'hui puissent, sans trop de difficultés, s'adapter au climat qu'ils connaîtront d'ici la fin du siècle. Ils soulignent qu'il est alors quasiment indispensable d'atteindre la neutralité carbone dès 2050.

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    L'Arctique se réchauffe « <em>plus vite que le reste du monde</em> ». © Simon Malfatto, AFP 
    L'Arctique se réchauffe « plus vite que le reste du monde ». © Simon Malfatto, AFP 

    D'ici 2050, le réchauffement dépend peu des quantités de gaz à effet de serregaz à effet de serre que nous émettrons d'ici là ; en France, il ne devrait guère excéder 1 °C, en moyenne, par rapport à la décennie 2010. Les véritables difficultés sont pour l'après 2050. Si rien de sérieux n'était fait d'ici là pour diminuer nos émissionsémissions, nous serions sur une trajectoire qui conduirait à des réchauffements moyens de 4 à 5 °C d'ici 2100 avec des impacts extrêmement importants : élévation du niveau de la mer, acidification de l’océan, récifs coralliens mis à mal, extrêmes climatiques encore plus intenses ou plus fréquents, difficultés d'accès à l'eau, perte de biodiversitébiodiversité, problèmes de pollution, de sécurité alimentaire et de santé, mouvementsmouvements de populations, phénomènes irréversibles. Pris dans leur ensemble, ils se traduiront par un risque d'accroissement des inégalités entre ceux qui pourront y faire face et ceux qui ne le pourront pas, y compris dans les pays développés.

     Agir vite et maintenant avant de se retrouver sur la trajectoire d'un réchauffements moyen de 4 à 5 °C d’ici 2100. © Black Salmon, Adobe stock
     Agir vite et maintenant avant de se retrouver sur la trajectoire d'un réchauffements moyen de 4 à 5 °C d’ici 2100. © Black Salmon, Adobe stock

    Trop timides, les engagements devraient être multipliés par trois !

    Manifestement, ne rien faire n'est pas une option. Toutefois, les engagements de réduction des émissions pris dans le cadre de l’Accord de Paris sont beaucoup trop timides et nous entraînent, s'ils ne sont pas suffisamment revus à la hausse, vers un réchauffement supérieur à 3 °C à la fin du siècle : il faudrait, d'ici 2030, les multiplier par trois pour avoir des chances de rester à long terme en-dessous de 2 °C, par 5 pour 1,5 °C.

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    Les émissions de gaz à effet de serre battent encore un record en 2020 !

    Certes, 130 pays ont d'ores et déjà affiché un objectif de neutralité carboneneutralité carbone d'ici 2050 mais c'est maintenant qu'il faut agir pour éviter des conditions climatiques auxquelles il serait difficile de s'adapter d'ici une cinquantaine d'années, sinon impossible dans certaines régions. Or, après une année 2020 effectivement marquée par une diminution des émissions liée à la pandémie, il est assez clair que nous sommes revenus dans le monde d'avant, avec un nouveau record d'émissions à craindre dès 2021. Certes, les engagements pris par les pays dans le cadre de l'Accord de Paris seront globalement revus à la hausse lors de la conférence climat de Glasgow (COP26) mais sans réelle ambition puisqu'ils nous mettraient sur une trajectoire proche de +3 °C par rapport aux conditions pré-industrielles.

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