Les zones mortes, ces espaces où plus rien ne peut survivre dans l'océan, se multiplient et grandissent en superficie. Or, elles sont directement liées aux activités humaines et à nos choix de consommation.
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Les chercheurs de l'Institut royal des Pays-Bas de recherche sur la mer tirent la sonnettesonnette d'alarme : nos océans ne se réchauffent pas seulement, ils suffoquent ! Les zones mortes sont des espaces où le niveau d'oxygène est si bas que la vie marine ne peut pas subsister. Le taux de nutrimentsnutriments présents dans ces eaux est tellement élevé que l'oxygène est insuffisant pour permettre la survie de la majorité des espèces. Le peu d'espèces qui survit dans ces zones mortes souffre de problèmes de santé et présente par conséquent des difficultés à se reproduire. On répertorie environ 700 zones mortes dans les océans, la plupart du temps près des côtes. Parmi les plus grandes, on peut citer celle située le long des côtes américaines de la Louisiane, ou encore une autre le long de la côte est américaine près de New York, mais aussi celle de la mer baltique près de la Suède.
La multiplication des zones mortes est la plus grande catastrophe actuelle dans les océans
Certaines zones mortes se sont formées de manière naturelle, mais de plus en plus sont liées à la pollution humaine. D'où vient cette pollution de nutriments ? Des produits agricoles principalement, du traitement de l'eau, mais aussi des produits courants que nous choisissons d'acheter : liquideliquide d'entretien, lessive, engrais, etc. Ces produits finissent dans les rivières, qui elles-mêmes transportent cette pollution jusqu'à la mer. Une fois dans les océans, de grands courants marins transportent la pollution vers des zones où elle reste ensuite piégée, et s'agglomère d'année en année.
Les nutriments permettent à des algues de proliférer, avant de mourir elles aussi. Et lorsqu'elles meurent et pourrissent, cela entraîne une prolifération de bactériesbactéries. Ces bactéries engloutissent tout l'oxygène présent dans l'eau, et l'eau n'est alors plus un milieu viable. Les scientifiques néerlandais, qui ont publié leur étude dans Biogeosciences, estiment que l'urgence du problème n'est pas assez pris en compte : l'excès de nutriments dans l'eau est selon eux une catastrophe probablement plus lourde de conséquences, et plus rapide, que celle du réchauffement des océans qui est davantage médiatisée.
Chaque consommateur peut jouer un rôle
D'une manière générale, le taux d'oxygène présent dans les océans a diminué de 2 % en l'espace de 50 ans. Les scientifiques rappellent que chaque consommateur peut jouer un rôle dans la sauvegardesauvegarde de la vie marine : en choisissant d'acheter des produits issus de l'agriculture biologique par exemple, des produits d'entretien plus respectueux de l'environnement ou encore des matériaux biodégradablesbiodégradables.
Inquiétante prolifération des zones mortes dans l'océan mondial
Article de Jean-Luc GoudetJean-Luc Goudet, publié le 6 décembre 2016
Une « zone morte » se développe dans la baie du Bengale, au large de l'Inde, selon des océanographes. Elle est hypoxique, c'est-à-dire très pauvre en oxygène et perd aussi son azoteazote. Ce phénomène, naturel, s'accélère depuis les années 1960 à cause des pesticides et du réchauffement de l'eau. Mais il est complexe et imparfaitement connu.
Dans la baie du Bengale, la teneur en oxygène est très basse. Cette région hypoxique n'est pas la seule : il en existe plusieurs centaines dans l'océan mondial, repérées par les océanographes. Les courants marins et les climats régionaux expliquent la formation de ces « zones mortes », où peuvent proliférer les organismes anaérobies, ceux qui se débrouillent sans oxygène mais où les autres ne peuvent que fuir ou mourir (voir l'article ci-dessous).
Près des côtes, le phénomène peut être amplifié par le déversement d'engrais, qui favorise l'eutrophisationeutrophisation et par la chaleurchaleur de l'eau. Plus loin au large, les mécanismes sont plus complexes et mettent en jeu les échanges verticaux entre la surface et les profondeurs, ainsi que les équilibres chimiques entre l'oxygène et l'azote, lequel est sous forme de nitrites ou de nitrates et sous forme de N2 gazeux, qui s'échappe.
Cet équilibre pourrait être rompu dans la baie du Bengale, expliquent des scientifiques qui publient leurs résultats dans Nature Geoscience. La vie marine dans cette région serait profondément modifiée et la pêchepêche y serait très affectée. L'exemple de la baie du Bengale vient s'ajouter à celui des quelque 400 « zones mortes » déjà répertoriées et dont le nombre semble augmenter autour du Globe.
L'eutrophisation des mers fait localement chuter le taux d'oxygène
Article initial de Jean-Luc Goudet publié le 10/11/2006
D'après un rapport de l'Unep, les cas d'eutrophisation, qui conduisent à la mort de nombreux organismes marins, ont augmenté d'un tiers en deux ans, sous l'effet des activités humaines. La situation est grave mais pas désespérée car il suffirait de peu de choses pour réduire cet impact.
Qu'on les appelle maréesmarées brunes ou marées rouges, ces catastrophes locales sont connues sur la plupart des côtes des pays développés. Au changement de couleurcouleur de l'eau correspond une chute du taux d'oxygène et une hécatombe chez les animaux, poissonspoissons, mollusquesmollusques, crustacéscrustacés, annélidesannélides ou corailcorail, et aussi, souvent chez les grands végétaux, algues ou posidonies. Dans le rapport qu'il vient de publier, l'Unep (United Nations Environment Programme) en recense 200 sur la planète alors que sa précédente étude, datant de 2004, n'en avait dénombré que 149.
La meilleure surveillance, par satellite notamment, et la plus grande attention portée à ce genre d'événement peuvent expliquer que le nombre de cas observés augmente. Cependant, le biologiste marin Robert Diaz (Virginia Institute of Marine Sciences, Williamsburg) explique dans le magazine Science que la hausse constatée est bien réelle et ce depuis les cinquante dernières années. Ces zones mortes totalisent 245.000 kilomètres carrés sur la planète [chiffres 2008, NDLRNDLR].
Le phénomène est connu dans ses principes mais beaucoup moins dans ses détails. Les ennuis commencent avec l'eutrophisation du milieu, c'est-à-dire la prolifération excessive du phytoplanctonphytoplancton, ensemble d'algues microscopiques flottant dans les premières dizaines de mètres de l'océan. Ce boom planctonique est souvent dû au déversement dans la mer de déchetsdéchets divers de l'activité humaine , essentiellement les égouts et les engrais azotés de l'agricultureagriculture entraînés par les eaux fluviales. Aubaine pour les végétaux, ces substances nutritives, organiques et minérales, les conduisent à une activité endiablée.
L'écosystèmeécosystème local s'en trouve alors bousculé. Les algues toxiques, par exemple, pullulent en même temps que les autres. Même si elles représentent moins de 1 % des espèces d'algues présentes, elles deviennent un danger pour la faunefaune et participent au massacre des animaux. Quant aux algues non toxiques, elles finissent par obscurcir l'eau, ce qui réduit l'activité du phytoplancton à partir d'une certaine profondeur. Parfois, de grandes algues se mettent aussi à proliférer en surface, accentuant le phénomène.
C'est alors que les bactéries se mêlent au jeu. Les organismes morts, animaux, végétaux et planctonplancton, coulent au fond où ils sont consommés par des bactéries détritivoresdétritivores. Le boom planctonique de surface conduit donc secondairement à une prolifération bactérienne au fond et à une consommation d'oxygène qui s'accroît considérablement. Dans des eaux profondes déjà appauvries en oxygène par l'obscurcissement de l'eau proche de la surface, la quantité de ce gazgaz chute dramatiquement.
L'été meurtrier
Le maintien de l'eutrophisation dépend alors de la température et de la profondeur. La pire situation est celle d'eaux peu profondes en été, dans des baies abritées. Chauffée par l'airair, l'eau de surface, plus légère, y reste. Le brassage vertical est très réduit et les algues de surface continuent de proliférer tandis que l'eau de fond passe en hypoxiehypoxie grave. À ce jeu, les animaux ne résistent pas.
La surveillance par satellite permet aujourd'hui de bien détecter ces phénomènes, simplement par la couleur de l'eau. L'Homme n'a pas inventé l'eutrophisation, la Mer MorteMer Morte est un exemple de ce phénomène, avec une interruption quasi complète des échanges verticaux entre le fond et la surface. Mais les cas de ce genre ont clairement augmenté en taille et en nombre près des côtes et semblent en rapport avec l'activité humaine, industrielle et agricole. L'eutrophisation a eu de graves conséquences sur la pêche en Alaska et également en mer Baltique où les Norvégiens ont dû renoncer à pêcher le homard. Mais il n'y a rien d'inévitable : des stations d'épuration et des pratiques agricoles moins portées sur les nitrates réduisent toujours le phénomène...