Les humains entretiennent une relation de longue date avec le cannabis (C. sativa), elle prend racine au Néolithique, il y a environ 12.000 ans.


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    Le cannabiscannabis (Cannabis sativa) est une plante à deux visages. D'un côté, le chanvre cultivé depuis des millénaires pour sa fibre et ses graines, de l'autre côté, le cannabis, consommé mondialement pour ses effets stupéfiants. Les plants de chanvre contiennent peu de THCTHC, mais du CBDCBD, alors que les plants de cannabis ont été sélectionnés pour leur forte teneur en THC. Les archéologues ont découvert des brûleursbrûleurs d'encens vieux de 2.500 ans en Asie de l'Est, suggérant que le cannabis était déjà fumé à cette époque, notamment durant des rites funéraires. D'autres vestiges replacent l'utilisation du chanvre encore plus loin dans le passé, 7.500 ans avant Jésus-Christ, au Japon et en Chine.

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    Chanvre et cannabis : quelle différence ?

    L'humain utilise cette plante depuis la nuit des temps, mais depuis quand la cultive-t-il ? Selon une publication récente dans Science Advances, l'ancêtre de tous les cultivars de C. sativa cultivés aujourd'hui a été domestiqué au début du Néolithique.

    La carte des plants de <em>C. sativa</em> prélevés pour l'étude. En orange, le cannabis ancestral, en vert le chanvre, en bleu clair, le cannabis sauvage et en rouge, le cannabis cultivé. © Guangpeng Ren et <em>al., Science Advances</em>
    La carte des plants de C. sativa prélevés pour l'étude. En orange, le cannabis ancestral, en vert le chanvre, en bleu clair, le cannabis sauvage et en rouge, le cannabis cultivé. © Guangpeng Ren et al., Science Advances

    Le cannabis et les humains, une relation de longue date

    Pour parvenir à cette conclusion, le groupe de chercheurs à l'origine de cette étude a séquencé le génomegénome de 82 plants de chanvre et de cannabis, sauvages ou cultivés, provenant des quatre coins du monde. Couplés à des génomes déjà répertoriés, ils ont ainsi analysé 110 génomes différents. L'analyse phylogénétiquephylogénétique de ces plants suggère qu'il y a eu un événement de domestication unique, en Asie de l'Est. 

    Les premiers plants de C. sativa domestiqués ont aujourd'hui disparu, mais les spécimens sauvages présents actuellement en Chine sont leurs plus proches descendants. Cette domestication semble avoir eu lieu il y a environ 12.000 ans avant Jésus-Christ. À partir de là, la culture du chanvre et de sa forme psychotropepsychotrope se sont progressivement propagées dans le monde. Les plants de chanvre et de cannabis produits aujourd'hui sont le résultat d'une sélection débutée il y a 4.000 ans. À cette époque, qui correspond à l'Âge de BronzeBronze, les premiers champs de C. sativa étaient cultivés en Europe et au Moyen-Orient 

    Le cannabis psychotrope arrive d'abord en Afrique, au XIIIe siècle, puis en Amérique du Sud au XVIe siècle. La culture du chanvre a traversé l'Atlantique pour rejoindre l'Amérique du Nord avec les colons en partance pour les États-Unis au XVIIe siècle. La forme stupéfiante ne s'y implantera que plus tard.

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    Cannabis thérapeutique : où en est la France ?

    Bien qu'il s'agisse de la même plante, le chanvre et le cannabis ne sont pas soumis aux mêmes réglementations. En France, seuls les cultivars de C. sativa contenant moins de 0,2 % de THC, sans effet psychotrope donc, peuvent être cultivés. Le CBD produit par le chanvre en grande quantité intéresse de plus en plus les médecins et est envisagé comme traitement thérapeutique pour soulager certains symptômessymptômes comme les douleursdouleurs chroniques.


    Le cannabis se fumait déjà il y a 2.500 ans

    Article publié le 16 juin 2019 par Nathalie MayerNathalie Mayer

    Le cannabis compte parmi les plus anciennes plantes cultivées. Et des chercheurs nous apprennent aujourd'hui que certains peuples fumaient déjà du cannabis - à des fins rituelles - il y a au moins 2.500 ans.

    Les peuples d'Asie de l'Est cultivent le cannabis pour ses graines et ses fibres depuis au moins 4.000 ans. À en croire un texte d'HérodoteHérodote, la consommation de cannabis - que ce soit pour ses propriétés psychoactives ou médicinales - aurait débuté bien plus tard. Et aujourd'hui, des chercheurs de l'Institut Max-Planck (Allemagne) ont enfin mis la main sur un indice concret. Des traces de composés psychoactifs dans des brûleurs d'encens funéraires vieux de 2.500 ans et découverts à l'est du Pamir, une chaîne de montagnes d'Asie centrale.

    Les chercheurs ont analysé les anciens brûleurs en bois grâce à la technique dite de chromatographie en phase gazeusechromatographie en phase gazeuse - qui permet de séparer les composées de l'échantillon - couplée à la spectrométrie de massespectrométrie de masse qui elle, permet de les identifier. Pas de doute possible : la signature chimique des composés isolés est celle du cannabis. Mais elle révèle un niveau de THC supérieur à celui que l'on trouve habituellement dans les plants de cannabis sauvages.

    Cette étude se présente comme la preuve la plus ancienne et la plus solidesolide à ce jour d'une sélection par les peuples anciens de plantes de cannabis destinées à des rituels mortuaires plus riches en THC que les autres. « Nos résultats corroborent l'idée que c'est dans les régions montagneuses que le cannabis a d'abord été utilisé pour ses composés psychoactifs », note Nicole Boivin, directrice de l'Institut Max-PlanckPlanck. D'autres traces avaient déjà été découvertes plus au nord et en Russie, dans les montagnes de l'Altaï.

    L’un des brûleurs contenant des résidus de cannabis trouvés dans le cimetière de Jirzankal. © Xinhua Wu, Académie des sciences sociales chinoise
    L’un des brûleurs contenant des résidus de cannabis trouvés dans le cimetière de Jirzankal. © Xinhua Wu, Académie des sciences sociales chinoise

    Du cannabis sur la Route de la soie

    Par ailleurs, les objets et les ossements également trouvés sur place concordent avec l'idée selon laquelle les cols de haute altitude de l'Asie centrale et orientale ont joué un rôle clé dans les premiers échanges transeurasiens. Ainsi « la connaissance et la consommation de cannabis riche en THC ont pu faire partie des traditions culturelles qui se sont propagées le long de la Route de la soie », explique Robert Spengler, archéobotaniste.

    Il reste toutefois difficile de savoir si les peuples du Pamir avaient appris à cultiver du cannabis plus riche en substances psychoactives ou s'ils recherchaient simplement parmi le cannabis sauvage, celui qui contenait le plus de THC. Les chercheurs suggèrent que les plantes de cannabis produisent plus de substances psychoactives lorsqu'elles sont plus exposées aux rayonnements UVUV ou à d'autres facteurs de stressstress. Ce qui est le cas en altitude. Ainsi, les peuples de haute montagne auraient pu découvrir du cannabis sauvage plus riche en THC.

    Les propriétés psychoactives du cannabis sont recherchées par l’Homme depuis des millénaires

    Les chercheurs imaginent que leurs travaux pourraient venir éclairer d'un jour nouveau certaines décisions politiques. « Les perspectives modernes sur le cannabis varient énormément selon les cultures, mais il apparaît aujourd'hui plus que jamais clair que la plante est utilisée par l'Homme depuis des millénaires à des fins médicinales, rituelles et récréatives », conclut Nicole Boivin.