Les données astrométriques de la mission Gaia concernant les positions et les vitesses d'étoiles dans la Voie lactée indiquent que notre Galaxie et sa galaxie naine elliptique satellite dite du Sagittaire sont entrées en collision il y a environ 5,7 milliards d'années. Cette collision pourrait avoir amorcé, via des ondes de chocs dans le milieu interstellaire, l'effondrement d'un nuage moléculaire et poussiéreux qui sera à l'origine du Système solaire il y a 4,56 milliards d'années.


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    C'est au physicienphysicien, astronomeastronome et mathématicienmathématicien britannique James Jeans que l'on doit une théorie élémentaire donnant un critère permettant de déterminer si un nuagenuage de gaz, de densité et de température données, va s'effondrer sous sa propre gravité. Découvert en 1902, le critère de Jeans, comme on l'appelle, permet donc de comprendre comment et quand des nuages interstellaires dans une galaxie comme la Voie lactée vont pouvoir s'effondrer à cause d'une instabilité gravitationnelle pour finir par donner de jeunes étoilesétoiles entourées d'un disque protoplanétairedisque protoplanétaire.

    On observe ainsi dans notre Galaxie des nuages moléculaires denses et froids, comme les célèbres globules de Bokglobules de Bok, qui sont susceptibles en s'effondrant de se fragmenter pour donner des pouponnières de jeunes étoiles nées presque en même temps. De la même manière, serait né notre SoleilSoleil, lequel a donc fait partie pendant un temps d'un amas ouvert d'étoilesamas ouvert d'étoiles similaire à celui des PléiadesPléiades dans la constellation du Taureauconstellation du Taureau. Ses sœurs se sont ensuite dispersées dans la Voie lactée.

    Cette masse sombre devant les étoiles est Barnard 68, un nuage moléculaire situé à environ 450 années-lumière. C’est à la fin du XIX<sup>e</sup> siècle que l’astronome américain E. E. Barnard le découvrit, alors qu’il photographiait la Voie lactée. Des nuages de ce genre sont également appelés globules de Bok, en hommage à l’astronome B. Bok qui les étudia dans les années 1940. Le globule Barnard 68 mesure environ 12.500 unités astronomiques et sa température avoisine les -260 °C. © Jean-baptiste Feldmann, ESO
    Cette masse sombre devant les étoiles est Barnard 68, un nuage moléculaire situé à environ 450 années-lumière. C’est à la fin du XIXe siècle que l’astronome américain E. E. Barnard le découvrit, alors qu’il photographiait la Voie lactée. Des nuages de ce genre sont également appelés globules de Bok, en hommage à l’astronome B. Bok qui les étudia dans les années 1940. Le globule Barnard 68 mesure environ 12.500 unités astronomiques et sa température avoisine les -260 °C. © Jean-baptiste Feldmann, ESO

    Des ondes de chocs à l'origine d'étoiles

    Toutefois, ces nuages moléculaires ne devraient pas souvent s'effondrer selon le critère de Jeans. Les astrophysiciensastrophysiciens spécialisés en cosmogonie ont cependant trouver un échappatoire à ce problème : les ondes de chocs. Elles naissent dans le milieu interstellaire, notamment à l'occasion d'explosion de supernovaesupernovae mais aussi de collisions entre les nuages moléculaires, et dans les deux cas, elles provoquent des compressions de ces nuages. Ces collisions peuvent se produire lors du passage d'un de ces nuages dans l'un des bras spiraux de la Voie lactée. Rappelons que ces bras spiraux sont également le produit d'ondes de densité dans le fluide autogravitant des étoiles de notre Galaxie selon la théorie développée par Lin et Shu.


    Le Système solaire est un laboratoire pour étudier la formation des planètes géantes et l'origine de la Vie que l'on peut utiliser conjointement avec le reste de l'Univers observable dans le même but. Mojo — Modeling the Origin of JOvian planets, c'est-à-dire modélisation de l'origine des planètes joviennes— est un projet de recherche qui a donné lieu à une série de vidéos présentant la théorie de l'origine du Système solaire et en particulier des géantes gazeuses par deux spécialistes réputés, Alessandro Morbidelli et Sean Raymond. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Laurence Honnorat

    En étudiant les isotopesisotopes dans des météoritesmétéorites, en particulier celle d'Allende, les cosmogonistes étaient arrivés à la conclusion que la nébuleusenébuleuse protosolaire précédant le Système solaireSystème solaire s'était effondrée à la suite de l'explosion d'une supernova dans un amas ouvert. Mais cela laisse bien sûr en suspens la question de la formation de cet amas ouvert d'étoiles. Or, justement, un article publié dans le célèbre journal Nature Astronomy apporte peut-être une nouvelle lumièrelumière sur cette question comme on peut s'en convaincre en lisant sa version accessible en accès libre sur arXiv.

    Tomás Ruiz-Lara, chercheur en astrophysiqueastrophysique à l'Instituto de Astrofísica de Canarias (IAC) à Tenerife (Espagne) y explique que lui et ses collègues ont fait une découverte intéressante en utilisant les données astrométriques collectées par la mission GaiaGaia. Rappelons qu'elle est consacrée à la mesure de la position, de la distance et du mouvementmouvement de plus de un milliard d'étoiles ainsi que leur magnitudemagnitude dans différentes couleurscouleurs. Cela permet de faire en quelque sorte de l'archéologie galactique car les distributions en positions et vitessesvitesses de ces étoiles dans la galaxie gardent jusqu'à un certain point la mémoire des événements qui les ont affectées depuis des milliards d'années.


    Une vidéo montrant avec une animation les collisions entre la Voie lactée et la galaxie naine du Sagittaire. On voit également les pics de formation d'étoile à chacune de ces collisions. © European Space Agency, ESA

    Des ondes de densité dans la Voie lactée

    Gaia s'est montrée bavarde en ce qui concerne la galaxie nainegalaxie naine du Sagittaire, une galaxie elliptiquegalaxie elliptique satellite de la Voie lactée. D'environ 10.000 années-lumièreannées-lumière de diamètre, elle se trouve actuellement à 80.000 années-lumière de la Terre et voyage sur une orbiteorbite polaire à environ 50.000 années-lumière du centre de la Voie lactée.

    Dans un communiqué de l'ESAESA, Tomás Ruiz-Lara explique à son sujet : « On sait d'après les modèles existants que la galaxie naine du Sagittaire est tombée sur la Voie lactée à trois reprises - d'abord, il y a environ cinq ou six milliards d'années, puis il y a environ deux milliards d'années et enfin, il y a un milliard d'années. Quand nous avons examiné les données de Gaia sur la Voie lactée, nous avons trouvé trois périodes d'augmentation de la formation d'étoiles qui ont culminé il y a 5,7 milliards d'années, puis 1,9 milliard d'années et enfin, 1 milliard d'années, correspondant au moment où la galaxie naine elliptique du Sagittaire serait passée à travers le disque de la Voie lactée ».

    Il est certain que ces passages ont fait comme l'effet de la chute d'un caillou dans une mare et que des ondes de densité en ont résulté, ondes qui, en se propageant, auraient ainsi déstabilisé des nuages moléculaires pour donner des amas ouverts d'étoiles. Notre Système solaire pourrait donc devoir finalement son existence depuis 4, 56 milliards d'années à une collision galactique survenue il y a 5,7 milliards d'années.

    C'est bien ce qu'explique Carme Gallart, coauteur de l'article de Nature Astronomy, également de l'IAC, dans le communiqué de l'ESA :  « Le Soleil s'est formé au moment où les étoiles se formaient dans la Voie lactée à cause du premier passage de la galaxie naine elliptique du Sagittaire. Nous ne savons pas si le nuage particulier de gaz et de poussière qui s'est transformé en notre Soleil s'est effondré à cause des effets du Sagittaire ou non. Mais c'est un scénario possible parce que l'âge du Soleil est cohérent avec une étoile formée à la suite de l'effet Sagittaire ».

    Une représentation d'artiste des multiples collisions (<em>billion years</em> = milliard d'années) entre la galaxie naine du Sagittaire et la Voie lactée. À chaque fois, du gaz et des étoiles de cette galaxie elliptique naine ont été avalés par la Voie lactée, contribuant à sa croissance. © ESA
    Une représentation d'artiste des multiples collisions (billion years = milliard d'années) entre la galaxie naine du Sagittaire et la Voie lactée. À chaque fois, du gaz et des étoiles de cette galaxie elliptique naine ont été avalés par la Voie lactée, contribuant à sa croissance. © ESA