Les astronautes de la Station spatiale internationale ont mené avec succès une étude sur la réparation de l'ADN dans l'espace, en y utilisant pour la première fois efficacement la méthode CRISPR/Cas9, faisant ainsi un grand pas pour la recherche spatiale. 


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    Tous les jours, notre ADN subit des dommages causés par des procédés externes et internes. Il peut par exemple être physiquement attaqué par les rayonnements ultraviolets du soleil ou des moléculesmolécules chimiques, mais des processus métaboliques et des réactions biochimiques endogènesendogènes peuvent aussi endommager notre code. Lorsque cela se produit, il y a des risques de développement de cancer. Parmi les altérations qui peuvent se produire, les cassures double-brin constituent un type de dégât très sérieux, et sur Terre, les organismes eucaryotes possèdent deux mécanismes pour les réparer : la recombinaisonrecombinaison homologue et la jonction d'extrémités non-homologues.

    La nécessité de protéger la santé des astronautes

    À la surface de la Terre, l'atmosphèreatmosphère nous protège partiellement en filtrant les dangereux rayons spatiaux. Par contre, ce n'est pas le cas pour les habitants de la Station spatiale internationaleStation spatiale internationale (ISS), plus à risque de voir leur ADN gravement endommagé, notamment à cause des rayonnements ionisants omniprésents dans l'espace, ce qui est inquiétant lors de longs voyages spatiaux. Pour protéger les astronautesastronautes, la NasaNasa mène des recherches sur les mécanismes de réparation de l'ADN, qui pourraient être influencés par la microgravitémicrogravité, et ils ont choisi de les étudier dans le cadre de cassures double-brin dans l'espace. 

    La Station spatiale internationale en orbite autour de la Terre. Les astronautes ont mené l'étude dans ses laboratoires. © dimazel, Adobe Stock
    La Station spatiale internationale en orbite autour de la Terre. Les astronautes ont mené l'étude dans ses laboratoires. © dimazel, Adobe Stock

    Le découpage des brins d'ADN avec CRISPR/Cas9

    Comme décrit dans l'étude publiée dans PLOS One le 30 juin, afin de recréer ces lésions doubles de manière contrôlée, les scientifiques ont eu recours à une nouvelle méthode utilisant la technologie d’édition du génome CRISPR/Cas9. Durant celle-ci, l'enzymeenzyme nucléase Cas9 est dirigée par un ARN guide synthétisé par génie génétique pour faire une coupure à un site spécifique du génome. 

    Le saviez-vous ?

    Les enzymes sont des protéines qui permettent de catalyser, c'est-à-dire accélérer une multitude de réactions biochimiques dans notre corps.

    L'utilisation du ciseau moléculaire CRISPR/Cas9 pour endommager l'ADN a l'avantage de permettre d'observer les mécanismes de réparation. En effet, si les cassures étaient induites par des méthodes non précises comme des radiations, ce ne serait tout d'abord pas sécuritaire, et les scientifiques ne sauraient pas où regarder exactement, alors qu'avec CRISPRCRISPR/Cas9 les changements dans la séquence peuvent être identifiés facilement par réaction en chaîneréaction en chaîne par polymérasepolymérase (PCRPCRou séquençage.  

    Les astronautes ont mené l’expérience sur des cellules de levure de boulanger Saccharomyces cerevisiaeSaccharomyces cerevisiae, en l'amenant sur l'ISS avec tout le nécessaire pour la faire croître et pour étudier sa réparation complètement dans l'espace. Il était important que l'expérience soit menée de A à Z en microgravité pour obtenir les résultats les plus fiables.

    La levure de boulanger, ou <em>Saccharomyces cerevisiae</em>, est la levure la plus largement utilisée en biotechnologie. © vicu9, Adobe Stock
    La levure de boulanger, ou Saccharomyces cerevisiae, est la levure la plus largement utilisée en biotechnologie. © vicu9, Adobe Stock

    Une longue expérience menée en microgravité de A à Z

    Dans les laboratoires de l'ISS, l'organisme a été transformé en incorporant du matériel génétiquematériel génétique d'origine extérieure, le génome a été édité avec CRISPR/Cas9 de manière à causer des brisures contrôlées dans les brins d'ADN. La levurelevure a ensuite pu croître, permettant ainsi à l'ADN de se réparer. Finalement, ce dernier a été séquencé, et tout ce processus a été fait dans l'espace. « La capacité d'effectuer cette recherche globale de bout en bout est un énorme pas en avant pour la biologie spatiale », déclare Sarah Castro-Wallace, coauteure de l'étude. La même expérience était parallèlement menée sur Terre, permettant ainsi de comparer le déroulement de la réparation génétique dans les deux environnements.

    C'est la première fois que, dans l'espace, la méthode CRISPR/Cas9 a été conduite avec succès et que du matériel génétique provenant de l'extérieur a été incorporé dans un organisme. D'autres recherches seront nécessaires pour déterminer si la microgravité fait qu'une voie de réparation est plus utilisée qu'une autre, mais cette étude marque un grand début et remplit d'espoir pour la future exploration et colonisation de l’espace.