Ne vous fiez pas à leur bouille parfois adorable : certains animaux, introduits depuis des territoires étrangers, se sont installés en France au prix de dégâts écologiques et sanitaires parfois très importants. Des espèces dites invasives contre lesquelles le gouvernement lutte afin de préserver les habitats des espèces indigènes.


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    En France, on compte 2 442 espèces de faune exotiqueexotique, faisant de l'hexagone un des pays ayant le plus d'espèces introduites. Problème : ces introductions seraient responsables de 16% des extinctions des espèces locales. Un bilan écologique et économique lourd : d'après le Centre de ressources des espèces exotiques envahissantes, on estime à 1070 milliard d'euros le coût des dégâts écologiques, matériels et sanitaires induits par ces « Espèces exotiques envahissantes » (EEE). Petit tour d'horizon de 10 des espèces animales les plus problématiques en France.

    Moustique-tigre (Aedes albopictus)

    Le Moustique tigreMoustique tigre a été introduit en France en 1999, principalement via le commerce international de pneuspneus usagés contenant de l'eau de pluie résiduelle et le commerce de décorationsdécorations végétales. Il transmet divers arbovirusarbovirus, dont certains ont un fort impact sur la santé humaine : chikungunya, denguedengue, encéphalite japonaiseencéphalite japonaise, virus du Nil occidentalvirus du Nil occidental, etc. En France, le premier cas de dengue autochtone a été documenté en 2010 à Nice.

    Le moustique-tigre est porteur du chikungunya, à l'origine de plusieurs épidémies d'importance, notamment en 2009. © mallorca78, Adobe Stock
    Le moustique-tigre est porteur du chikungunya, à l'origine de plusieurs épidémies d'importance, notamment en 2009. © mallorca78, Adobe Stock

    Ragondin (Myocastor coypus)

    Le Ragondin a été introduit en France dans les années 1880 pour l'élevage de sa peau, et sa présence s'est étendue sur l'ensemble du territoire métropolitain depuis. Les impacts documentés du Ragondin comprennent la diminution des herbiers, la perturbation des communautés végétales et de la biodiversité associée à ces habitats.

    En raison de son comportement fouisseur, il dégrade les berges, accélère le colmatage du lit des rivières, perturbe le réseau hydraulique et endommage les infrastructures humaines telles que les digues et les piliers de ponts. Le Ragondin cause également des dommages aux cultures (betterave et maïsmaïs) et est vecteur de divers pathogènespathogènes, dont la douve du foiedouve du foie, la leptospirose, la toxoplasmose et l'échinococcose alvéolaire.

    Le ragondin dégrade l'environnement naturel dans lequel il vit en creusant des trous près des rivières. © lichtpinzel, Adobe Stock
    Le ragondin dégrade l'environnement naturel dans lequel il vit en creusant des trous près des rivières. © lichtpinzel, Adobe Stock

    Écrevisse du Pacifique (Pacifastacus leniusculus)

    L'espèce a été importée en Suède et en Finlande dans les années 1960-1980, à des fins de repeuplement. En France, des tentatives d'acclimatation dans les années 1970 ont conduit à une colonisation rapide du milieu naturel, favorisée par la popularité de la pêchepêche à cette écrevisseécrevisse. En 2014, elle était présente dans 80 départements.

    L'Écrevisse du Pacifique est robuste, agressive, et compétitive, supplantant systématiquement les espèces autochtones. Elle est également vectrice de l'aphanomycose, une maladie touchant les écrevisses. Des études montrent des taux d'infestationinfestation élevés par l'aphanomycose, conduisant à des cas de mortalités massives d'écrevisses à pieds blancs en lien avec la présence de Pacifastacus leniusculus. Elle est considérée comme une espèce exotique envahissante préoccupante pour l'Union Européenne, et son introduction, détention, transport, et autres actions associées sont interdites en France.

    En raison de son agressivité et de sa robustesse, l'écrevisse du Pacifique supplante systématiquement les espèces concurrentes dès qu'elle s'installe dans une zone. © Fab, Adobe Stock
    En raison de son agressivité et de sa robustesse, l'écrevisse du Pacifique supplante systématiquement les espèces concurrentes dès qu'elle s'installe dans une zone. © Fab, Adobe Stock

    Corbeau familier (Corvus splendens)

    Sur l'île de La Réunion, le corbeau familier est devenu une véritable menace pour la salubrité publique. Les premières observations de cette espèce remontent à 2004, et les premiers individus proviendraient de l'île Maurice, où l'espèce est bien établie. L'espèce a la réputation de voyager comme passager des bateaux, ce qui expliquerait son introduction aux Pays-Bas depuis le milieu des années 1990.

    Le Corbeau familier est porteur d'agents pathogènes susceptibles de provoquer des maladies diarrhéiques chez l'homme, menace les espèces locales par prédation des œufs et des jeunes, et cause des dégâts dans les cultures ainsi que des nuisancesnuisances diverses telles que des dommages sur les câbles électriques et les poubelles.

    Le Corbeau familier ne fait pas l'objet de mesures en métropole, est au centre d'enjeux sanitaires sur l'île de La Réunion. © Ian, Adobe Stock
    Le Corbeau familier ne fait pas l'objet de mesures en métropole, est au centre d'enjeux sanitaires sur l'île de La Réunion. © Ian, Adobe Stock

    Frelon asiatique (Vespa velutina)

    Le frelon asiatique, introduit en France via des poteries importées de Chine, a été observé pour la première fois en 2004. Il s'est rapidement adapté : en 2017, il avait colonisé presque tout le territoire français et se dispersait dans les pays voisins. Bien que le FrelonFrelon asiatique ne soit pas considéré comme plus agressif envers les humains que le Frelon d'Europe, ses attaques peuvent être graves en cas de piqûres multiples et de réactions allergiques.

    Le frelon asiatique n'est pas plus agressif que le frelon européen pour l'humain, mais il est extrêmement problématique en raison du danger qu'il représente pour les abeilles. © jgd.cannes, Adobe Stock
    Le frelon asiatique n'est pas plus agressif que le frelon européen pour l'humain, mais il est extrêmement problématique en raison du danger qu'il représente pour les abeilles. © jgd.cannes, Adobe Stock

    Raton laveur (Procyon lotor)

    Le raton laveur a été introduit en Europe dans les années 1920 pour l'élevage de fourrure. En France, la population la plus ancienne provient d'individus relâchés par des troupes américaines et canadiennes en 1966. D'autres foyers de population se sont depuis développés en Auvergne et en Gironde, avec des observations sporadiques dans d'autres régions. Des échappés de parcs zoologiques ou des abandons intentionnels semblent être à l'origine de ces introductions. L'impact du raton laveurraton laveur sur les écosystèmes est varié.

    En tant qu'omnivoreomnivore opportuniste, le raton leveur consomme divers végétaux, invertébrés, petits reptilesreptiles, amphibiensamphibiens, et peut perturber les populations d'oiseaux en consommant leurs œufs et couvéescouvées. Il peut aussi causer des dommages aux poulaillers et s'introduire dans les habitations à la recherche de nourriture. Aux Antilles, il s'attaque aux cultures de melonsmelons, pastèquespastèques et bananesbananes. Le raton laveur est également un réservoir de zoonoseszoonoses, telles que la ragerage et un ver (Baylisascaris procyonis) pouvant causer des encéphalites, particulièrement chez les enfants.

    Ne vous laissez pas avoir : derrière cette bouille se cache un omnivore qui menace de nombreux petits animaux, les cultures et transporte des maladies. © Alexander, Adobe Stock
    Ne vous laissez pas avoir : derrière cette bouille se cache un omnivore qui menace de nombreux petits animaux, les cultures et transporte des maladies. © Alexander, Adobe Stock

    Grenouille-taureau (Lithobates catesbeianus)

    La grenouille-taureau (également appelée Ouaouaron !) a été introduite en France dans les années 1970, principalement à des fins d'élevage en pisciculturepisciculture. Elle a été importée d'Amérique du Nord pour être utilisée dans le cadre de la production alimentaire ou de l'aquacultureaquaculture. Cependant, certaines de ces grenouilles se sont échappéeséchappées ou ont été libérées dans la nature, ce qui a conduit à l'établissement de populations sauvages en France.

    C'est une espèce robuste et agressive qui peut entrer en compétition avec les espèces de grenouilles indigènesindigènes pour la nourriture, les habitats aquatiques et les ressources. Elle exerce une prédation importante sur les espèces locales de grenouilles, ainsi que sur d'autres petites espèces aquatiques. En outre, la grenouille-taureau est porteuse de maladies qui peuvent affecter les amphibiens indigènes, contribuant ainsi à la dégradation de la santé des populations locales.

    La grenouille-taureau n'hésite pas à s'attaquer à ses cousines d'espèces différentes, au point de menacer les populations locales d'amphibiens dans les zones qu'elle envahit. © Sir_Eagle, Adobe Stock
    La grenouille-taureau n'hésite pas à s'attaquer à ses cousines d'espèces différentes, au point de menacer les populations locales d'amphibiens dans les zones qu'elle envahit. © Sir_Eagle, Adobe Stock

    Fourmi de feu (Wasmannia auropunctata)

    A l'origine, la petite fourmi de feu était présente en France uniquement dans les départements d'outre-mer (Martinique, Guadeloupe, Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Wallis et Futuna). Cependant, en 2022, elle a été identifiée pour la première fois en métropole, à Toulon, avec une zone d'environ 1 hectare déjà envahie. Les prospections suggèrent que l'espèce serait en fait présente depuis plusieurs années.

    La petite fourmi de feufourmi de feu est un prédateur ayant des impacts écologiques directs et indirects sur la faune et la flore : elle concurrence d'autres espèces pour la nourriture et les ressources, attaque les œufs de reptiles, les jeunes reptiles, ou même les reptiles adultes isolés. Elle attaque également les nids d'oiseaux au sol et peut indirectement favoriser certains insectesinsectes suceurs de sève en éliminant des prédateurs potentiels d'insectes nuisibles, entraînant des changements dans la composition des communautés d'insectes.

    Les piqûres de cette fourmi peuvent provoquer des problèmes de santé chez les animaux, notamment des cas de kératopathie chez les chats et les chienschiens, ainsi que des irritations cutanées chez les humains variant en intensité et duréedurée, accompagnées ou non de démangeaisons, et provoquant parfois des réactions allergiques chez les individus sensibles.

    La fourmi de feu est envahissante et extrêmement agressive, au point de s'attaquer (en groupe) à toutes sortes d'animaux, menaçant le fragile équilibre écologique du territoire. © surasak, Adobe Stock
    La fourmi de feu est envahissante et extrêmement agressive, au point de s'attaquer (en groupe) à toutes sortes d'animaux, menaçant le fragile équilibre écologique du territoire. © surasak, Adobe Stock

    Muntjac de Reeves (Muntiacus reevesi)

    Le muntjac, une espèce exotique envahissante en Europe, a été repéré en France dans les années 1990. Des mesures de gestion ont été mises en place dans certains départements français, tels qu'Indre, Indre-et-Loire et Loir-et-Cher, où des actions de lutte sont autorisées, permettant aux détenteurs de droits de chasse de tuer ces animaux. Au Royaume-Uni, le muntjac est chassable toute l'année, avec le piégeage ou l'affût comme modes de chasse couramment utilisés. En 2011, 350 000 individus ont été prélevés au Royaume-Uni.

    L'introduction du muntjac en Europe remonte à la fin du 19ème siècle, lorsque les premiers spécimens ont été importés d'Asie à destination de parcs zoologiques. Au Royaume-Uni, l'échappée de 11 muntjacs en 1901 a marqué le début de l'installation d'une population qui compte actuellement plus d'un million d'individus. En France, une population est établie dans les forêts contiguës d'Indre-et-Loire, du Loir-et-Cher et de l'Indre, avec des effectifs en expansion. Des observations isolées ont également été signalées dans d'autres départements.

    En forte densité, le muntjac peut causer des dégradations importantes dans la végétation des zones boisées, impactant les habitats nécessaires à la survie ou la reproduction de plusieurs espèces. Il peut également entrer en concurrence avec le chevreuil autochtone. Au Royaume-Uni, il est également responsable d'un nombre significatif de collisions routières, avec 42 000 répertoriées en 2010.

    Le Muntjac pose surtout problème en Angleterre, et commence à s'installer en France, ce qui inquiète les spécialistes. © Prachya, Adobe Stock
    Le Muntjac pose surtout problème en Angleterre, et commence à s'installer en France, ce qui inquiète les spécialistes. © Prachya, Adobe Stock

    Rat musqué (Ondatra zibethicus)

    Le rat musqué a été introduit dans le nord et l'est de la France en 1920 pour l'exploitation de sa fourrure. Des populations se sont formées à la suite d'échappées d'élevages après leur faillite dans les années 30, et depuis 1983, l'espèce est présente sur la quasi-totalité du territoire. C'est un grand consommateur de végétation aquatique et de mollusquesmollusques, et est donc responsable de l'altération de la composition des communautés végétales, et de perturbations dans la reproduction de certains oiseaux, poissonspoissons et invertébrésinvertébrés.

    En tant que fouisseur, il dégrade les berges, accélère l'érosion, et affecte le lit des rivières, ravageant les prairies naturelles. Le Rat musqué peut également causer des dommages aux infrastructures humaines, comme les piliers de ponts et les digues. Enfin, il est porteur de plusieurs maladies présentant un risque pour l'homme, dont la leptospirose, la toxoplasmosetoxoplasmose, et l'échinococcose alvéolaire.

    Comme le ragondin, le rat musqué dégrade les berges et le lit des rivières, accélérant l'érosion de zones déjà fragilisées par la pollution humaine. © sanders-meertin, Adobe Stock
    Comme le ragondin, le rat musqué dégrade les berges et le lit des rivières, accélérant l'érosion de zones déjà fragilisées par la pollution humaine. © sanders-meertin, Adobe Stock

    Le statut d'espèce « invasive » ne justifie cependant pas qu'on fasse n'importe quoi avec ! La diminution des populations de ces espèces est rigoureusement encadrée par la loi, et si certaines peuvent être chassées dans certaines conditions, d'autres sont exclusivement gérées par des organismes agréés en collaboration étroite avec les services gouvernementaux.