Visible aux basses latitudes nord et dans l’hémisphère sud, Oméga Centauri brille de ses dizaines de millions d’étoiles dans le ciel austral. De nouvelles recherches renforcent l’hypothèse qu’il ne s’agit pas d’un amas globulaire. Mais alors, qu’est-ce que c’est ?
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De tous les amas globulaires qui gravitent autour de la Voie lactée, Oméga Centauri (ω Centauri)) est de loin le plus beau, le plus massif et le plus impressionnant. Certes, ces essaims d'étoiles sont tous beaux à observer mais pour celui-ci, il n'est même pas besoin d'un instrument pour le remarquer. Situé à quelque 18.000 années-lumière de la Terre, en direction de la constellation du Centaure -- ω Cen brille sur son dosdos --, il concentre à lui seul des dizaines de millions d'étoiles dont certaines ont 12 milliards d'années, là où de célèbres amas comme M13M13 ou M15 en rassemblent quelques centaines de milliers. Mais, Oméga Centauri est-il vraiment un amas globulaire comme les autres ? s'interrogent depuis des années les astronomesastronomes, particulièrement intrigués par sa massemasse hors du commun et sa population d'étoiles variées qui témoignent de plusieurs vaguesvagues de formation.
Bref, beaucoup pensent que Omega Cen serait en réalité le reste encore bien visible d'une galaxie nainegalaxie naine. Une petite galaxie qui est tombée dans le piège que la Voie lactée lui a tendu par sa force gravitationnelleforce gravitationnelle, il y a des milliards d'années, et qui se fait dévorer ses étoiles par milliers..., petit à petit, pièce par pièce, à l'instar de deux autres voisines célèbres et familières des habitants de l'hémisphère sudhémisphère sud : le Petit et le Grand Nuage de Magellan.
Une rivière d’étoiles nommée Fimbulthul
Dans un article qui vient de paraître dans Nature Astronomy, une équipe de chercheurs européens qui a traqué les courants d'étoiles reliés à la Voie lactée en a identifié un qui pourrait bien dissiper pour toujours le doute sur la véritable identité de ω Cen.
Usant de l'algorithme Streamfinder qui permet de mettre en relief des rivières d'étoiles au sein du vaste catalogue d'étoiles de GaiaGaia (le satellite de l'ESAESA mesure les distances et les mouvementsmouvements de plus d'un milliard d'étoiles), les enquêteurs-chercheurs ont mis la main sur un peloton de 309 étoiles qui semblent toutes avoir la même origine, Oméga Centauri, et le même parcours. Après vérification, via une étude spectroscopique au CFHTCFHT, l'équipe a confirmé que ces étoiles partagent toutes vélocitévélocité et trajectoire similaires.
Ils ont surnommé ce courant Fimbulthul en référence à une rivière dans la mythologie nordique. C'est un fil de la pelote (massive) d'étoiles sur lequel tire notre galaxie depuis des milliards d'années qu'ils ont épinglé. Un fil qui renforce l'idée que la Voie lactée est bien en train de détricoter une galaxie. Une galaxie dont tout indique qu'il ne reste plus qu'un noyau dense. À présent, les chercheurs sont impatients de reconstituer le passé de cette ancienne galaxie, d'inférer sa taille et sa masse d'origine. Affaire à suivre.
Plongez jusqu’au cœur d’Omega Centauri. © Nasa, ESA, G. Bacon (STScI)
Omega du Centaure est un faux amas globulaire
Article de Jean-Baptiste FeldmannJean-Baptiste Feldmann publié le 1er novembre 2010
Contrairement aux apparences, Omega Centauri ne serait pas un amas globulaire mais le reste du noyau d'une petite galaxie. Les astronomes viennent de réaliser une simulation montrant le mouvement des étoiles centrales de l'amas pour les 10.000 ans à venir.
L'astronome grec PtoléméePtolémée avait déjà repéré Omega Centauri et l'avait classé comme une étoile unique, mais c'est au XVIIIe siècle qu'Edmond HalleyEdmond Halley l'observe pour la première fois dans un instrument astronomique. Connu également sous le nom de NGCNGC 5139 et situé à 15.000 années-lumière, il s'agit de l'amas le plus brillant du ciel (magnitudemagnitude 4), dont le diamètre apparent dépasse celui de la pleine lunepleine lune. Il est observable depuis l'hémisphère sud et jusqu'aux rivages africains de la Méditerranée. À la fin du XIXe siècle, l'astronome Bailey en mission scientifique au Pérou, réalisa de nombreux clichés de l'amas et dénombra 6.000 étoiles.
On sait aujourd'hui qu'Omega Centauri en compte quelques 10 millions, ce qui explique que John Herschel le qualifiait déjà il y a 150 ans de « plus riche et plus grand objet de cette espèceespèce que renferme le ciel ». Depuis une dizaines d'années et les observations de plus en plus précises des grands télescopestélescopes, les astronomes ont remis en cause le classement de NGC 5139 dans la catégorie des amas globulaires.
Des étoiles qui bougent trop vite
Les astrophysiciensastrophysiciens s'accordent sur le fait que les amas globulaires se sont formés il y a très longtemps à la périphérie d'une galaxie : leurs étoiles ont donc le même âge et la même composition ; ce qui n'est pas le cas chez Omega Centauri. On y observe en effet des populations stellaires de compositions chimiques et d'âges variés. Le coup de grâce a été porté par le télescope spatial Hubble, utilisé en 2002 et 2006 pour observer le déplacement des étoiles au cœur de l'amas. Les astronomes ont mesuré les déplacements de 100.000 étoiles, la plus grande étude jamais menée sur un amas globulaire.
Comme le souligne Jay Anderson du Space Telescope Science Institute, « il aura fallu toute la puissance des programmes informatiques actuels pour mesurer les minuscules variations de positions d'étoiles au centre de l'amas ». Le mouvement des étoiles de NGC 5139 s'avère plus important que prévu, et pour les astronomes, l'explication la plus probable est qu'il existe un trou noir central de taille intermédiaire d'environ 40.000 masses solaires. On peut alors imaginer qu'Omega Centauri serait les restes d'une galaxie naine capturée par notre propre Voie lactée.
Mais Jay Anderson et son collègue Roeland Van Der Marel ont voulu aller plus loin. Utilisant les données récoltées, ils ont créé un film d'animation montrant pour les 10.000 ans à venir le déplacement frénétique des étoiles mesurées. Comme tient à le rappeler Roeland Van Der Marel, l'acuité du télescope spatialtélescope spatial Hubble a permis de collecter les données nécessaires à cette simulation en seulement 4 ans, là où les télescopes terrestres auraient demandé 50 ans. Il nous faudra désormais regarder d'un autre œilœil NGC 5139, la galaxie naine au faux airair d'amas globulaire.