C'était inattendu : près de la galaxie d'Andromède, pourtant étudiée depuis des siècles, des astronomes amateurs ont découvert un immense nuage de gaz. Et il ne ressemble à aucun objet astronomique connu !


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    Sa première mention écrite connue remonte à 964, soit plus d'un millénaire auparavant : la galaxie d'Andromède, aussi désignée comme M31, a été l'un des premiers objets du ciel profond à être étudié en détails. Visible à l'oeil nu lors de nuits particulièrement claires dans l'hémisphère nordhémisphère nord, cette galaxie pourrait être désignée comme une « voisine » de la nôtre, étant la galaxie spirale la plus proche de la Voie lactée. Si bien qu'elle a été l'objet de nombreuses publications, la scrutant et détaillant sa composition. Mais une nouvelle étude publiée dans RNAAS relate une découverte étonnante, et surtout très inattendue : un étrange nuagenuage de gaz jamais observé auparavant se trouve aux abords de cette galaxie. Du jamais vu !

     

    En haut, l'image obtenue après 48,6 heures de la nébuleuse au sud-est de M31. En bas, la confirmation obtenue après 85,5 heures. © Marcel Drechsler, Xavier Strottner et<em> al.</em>, <em>American Astronomical Society</em>, 2023
    En haut, l'image obtenue après 48,6 heures de la nébuleuse au sud-est de M31. En bas, la confirmation obtenue après 85,5 heures. © Marcel Drechsler, Xavier Strottner et al., American Astronomical Society, 2023

    Une détection tardive causée par sa composition

    Tout a commencé lorsque des astronomesastronomes amateurs ont réalisé différents relevés optiques dans la direction de la galaxie d'Andromède, située à 2,55 millions d'années-lumière de nous. Grâce à l'utilisation de différents systèmes d'imagerie, ils ont ciblé plusieurs raies d'émissionémission, dont Hα, caractéristique de l'hydrogènehydrogène ionisé, composant principal de la plupart des nuages de gaz, et d'autres moins présentes dans les nébuleusesnébuleuses. Avec 22 nuits d'observations entre août et octobre 2022 sur « divers sites d'observation sombres en Lorraine, en France », ils ont obtenu des spectres d'émissionspectres d'émission Hα et O III, caractéristique de l'oxygèneoxygène doublement ionisé, noté O2+.

    Et c'est là qu'ils ont vu une large nébulosité d'émission O III, située à un degré au sud-est de la galaxie d'Andromède. Pour confirmer leur découverte, les astronomes ont repris de nouvelles images, centrées sur une autre position. Le même nuage est apparu, révélant donc qu'il n'était pas un artefact d'équipement ou ne provenait pas d'une étoileétoile ou de M31 elle-même. Enfin, de nouvelles confirmations sont venues de différents endroits aux États-Unis, obtenues grâce à d'autres astronomes.

    L'arc d'émission [O III] de M31, découvert et mis en couleurs par l'équipe d'astronomes. © Marcel Drechsler, Xavier Strottner, Yann Sainty
    L'arc d'émission [O III] de M31, découvert et mis en couleurs par l'équipe d'astronomes. © Marcel Drechsler, Xavier Strottner, Yann Sainty

    On ne connait pas son origine

    Comme explique l'étude, cette nébulosité « n'a pas d'équivalent d'émission évident dans les relevés aux rayons Xrayons X, UVUV, optiques, infrarougesinfrarouges et radio » et « n'a pas été rapportée auparavant dans la littérature ». Une question reste alors en suspens : pourquoi cet étrange nuage n'a-t-il pas été détecté avant ? Selon les astronomes, cela s'explique par sa faible brillance et sa large taille angulairetaille angulaire, le rendant difficile à détecter avec la plupart des systèmes d'imagerie.

    Les auteurs discutent ensuite de l'origine possible du nuage, sans conclure sur un scénario préférentiel. Il pourrait s'agir d'une nébuleuse planétaire, car les structures filamenteuses de la nébulosité y ressemblent. Mais le rapport d'abondance en oxygène doublement ionisé par rapport à l'hydrogène ionisé implique une température supérieure à 60 000 KelvinsKelvins, qu'aucun objet astronomique aux alentours ne pourrait générer.

    Reste ensuite l'hypothèse d'un rémanentrémanent de supernovasupernova qui, cette fois, pourrait bien créer le bon rapport d'abondance. Mais un tel scénario n'explique pas l'absence d'émissions radio ou UV coïncidentes. Enfin, une interaction entre la galaxie d'Andromèdegalaxie d'Andromède et la Voie lactée pourrait créer une nébulosité similaire à celle observée. Mais là encore, problème : le nuage se situe bien trop proche de M31, dans son halo stellaire même ! L'étude conclut sur la nécessité de connaître la vitessevitesse radiale du nuage qui permettrait d'en savoir plus sur ses interactions avec M31 et son halo, elle est actuellement en cours d'obtention.