Actuellement, beaucoup de consommateurs se détournent de la viande et tendent vers une consommation de protéines végétales qui leur paraissent souvent plus vertueuses au niveau de la planète et de leur propre écosystème.


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    Le soja, sur le papier, a tout pour séduire : sa richesse en protéines plus accentuée que pour les autres légumineuses comme les pois chiches, les lentilleslentilles, sa pauvreté en acides gras saturés, son profil idéal en acides aminés qui l'apparente à la composition protéique des œufs.

    Le soja, riche en isoflavones

    Mais, il y a toujours un bémol comme dans tout ! On parle ici de la richesse en isoflavones que l'on retrouve dans certaines plantes, dont le soja. Ces isoflavones miment l'action des œstrogènes en particulier de l'œstradiol, ce qui participe à l'établissement des caractères sexuels féminins. Rien que cela ! Ces œstrogènesœstrogènes issus des plantes sont appelés phytoœstrogènes et modulent les voies de régulation hormonale pouvant de ce fait perturber le fonctionnement normal.

    Depuis les années 1990, des études établissent l'apparition de cas d'enfants - exposés au soja - en hypothyroïdiehypothyroïdie et présentant des goitresgoitres. Les hémorragies menstruelles seraient plus longues et plus accentuées en cas de consommation de « lait » de soja depuis la petite enfance. On a noté des risques accrus de cancers hormonodépendants comme celui du sein, de l'utérusutérus, des ovairesovaires en cas de consommation soutenue de phytoœstrogènes, après avoir dit l'inverse dans la décennie 1980.

    Lait et grains de soja. © Chaded, Fotolia
    Lait et grains de soja. © Chaded, Fotolia

    Le principe de précaution

    Comme dans chaque fois où il y a un doute, le principe de précautionprincipe de précaution doit prévaloir. Certains parlent du soja et de ses dérivés comme des perturbateurs endocriniensperturbateurs endocriniens quand d'autres révoquent cette idée. On sait en tout cas que même à faible dose, le soja agit en synergie avec des perturbateurs endocriniens comme le bisphénol A.

    Désormais, on ne prend plus en considération le principe ancien de Paracelse, comme quoi la dose fait le poison, mais l'effet cocktaileffet cocktail (cumulatif et additionnel) même à faible dose reste imprévisible. Le journal expert et indépendant « Que Choisir », dans son numéro 581 de juin 2019, déclare avoir saisi l'AnsesAnses afin que soit produite une nouvelle expertise scientifique des conséquences sur la santé humaine de la consommation des isoflavones. 

    On doit se méfier car on parle de plus en plus (en particulier sur les réseaux sociauxréseaux sociaux) de l'intolérance au lait de vachevache, du syndromesyndrome du colon irritable, de l'allergie au lait et on effectue la bascule lait/soja dès la petite enfance en prônant les laits infantiles de soja sans mesurer l'impact à moyen et long terme de l'apport élevé d'isoflavones. Consommer du soja, en particulier si on est une femme ou un enfant n'est pas un geste anodin. 

    Six Français sur dix ont déclaré en 2017 avoir mangé des produits à base de soja, soit une hausse incroyable pour le secteur agro-alimentaire de 49 % en trois ans. On imagine que ces chiffres sont regardés à la loupe par les actionnaires des grands groupes. 

    Considérons que ce que nous avalons n’est jamais anodin

    La réponse potentielle afin de limiter l'exposition indue à des doses élevées d'isoflavones, mimant les hormones sexuelles féminines, serait certainement de ne pas abuser de ces produits en fuyant l'effet mode et ensuite de mieux maîtriser les processus de fabrication. Le trempage réduit la teneur en isoflavones de soja qui sont éliminés partiellement dans la première eau de cuisson. Le fait d'aller toujours plus vite et de vouloir coller à la demande incitent certains industriels à raccourcir ces phases de trempage coûteuses et longues, ce qui a pour effet immédiat d'augmenter les doses d'isoflavones. Il faut se méfier de ces marchés juteux qui sont comme des bulles de champagne et naissent d'un engouement toujours surprenant sans aucun garde-fougarde-fou. Considérons que ce que nous avalons n'est jamais anodin ! Il n'y a que les publicités qui peuvent nous faire croire à un monde meilleur.

    Dr Arnaud Cocaul

    En savoir plus sur le Dr Arnaud Cocaul

    Le Dr Arnaud Cocaul est médecin nutritionniste, spécialisé dans la prévention de l'obésité et les troubles du comportement alimentaire en général. Il intervient dans les médias autour de sujets concernant la nutrition, et est favorable à une interface avec les médias. Il dispense des conférences grand public toujours dans l'esprit d'être un passeur et a participé à la réalisation d'une application ludique (Serious game) pour mobile, baptisée KcalMe.

    Son encyclopédie des super aliments :