L'OMS s'apprête à rendre son verdict au sujet de l'aspartame. Cet édulcorant de synthèse, qui se substitue au sucre et à ses calories, est largement utilisé dans l'industrie agroalimentaire. De nouvelles études permettraient de le catégoriser en « possiblement cancérogène » ; toutefois, même si un lien a été mis en évidence, cette classification ne dit rien du niveau de risque réel qui est « limité ». Alors que signifie cette catégorisation ? Et quelle dose journalière est admissible ?
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Découvert dans les années 60, puis autorisé en France en 1988, l'aspartame est un édulcorant artificiel pauvre en calories utilisé dans quelque 6 000 produits alimentaires en remplacement du sucre. Régulièrement sujet à polémique, il devrait une fois de plus se retrouver sous le feufeu des projecteursprojecteurs à la mi-juillet, comme le révèlent plusieurs médias britanniques. L'Organisation mondiale de la SantéOrganisation mondiale de la Santé, l'OMS, s'apprête à le classer comme « possiblement cancérogène pour les humains ».
L'aspartame peut-il favoriser le développement ou l'apparition de cancers ? « Possiblement », devrait prochainement faire savoir l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) par l'intermédiaire de son Centre international de Recherche sur le Cancer (Circ). Une annonce qui devrait intervenir le 14 juillet, comme le relatent plusieurs médias britanniques dont la BBC et The Guardian, et qui se baserait sur l'analyse de près de 1 300 études scientifiques. Notons que le Circ dispose de cinq catégories pour classer les agents ou mélanges, de « probablement non cancérogènes » à « cancérogènes ». L'aspartame serait considéré comme « possiblement cancérogène », derrière « potentiellement cancérogène » et « cancérogène » ; ce qui signifie que les études ont mis en évidence un lien entre l'édulcorant artificiel et le risque de cancer mais que celui-ci demeure limité.
Quels sont les risques potentiels ?
Après les nombreuses polémiques qui ont touché l'aspartame au cours des dernières années, et ce bien que l'édulcorant de synthèse soit commercialisé aux États-Unis depuis 1981 -- après la suspension d'une première autorisation de mise sur le marchéautorisation de mise sur le marché accordée en 1974 --, cette nouvelle annonce risque de faire couler beaucoup d'encre. Il est pourtant difficile de savoir avec exactitude ce que cette classification signifie, ne serait-ce que parce qu'elle induit un risque mais avec des preuves limitées. À titre d'exemple, plus de 320 agents sont classés « possiblement cancérogènes » par le Circ, parmi lesquels l'aloe veraaloe vera, les légumes marinés, les gazgaz d'échappement des moteurs à essence, ou encore le dioxyde de titane.
Interrogé par la BBC, Kevin McConway, professeur de statistiques appliquées à l'Open University, explique : « La catégorisation du Circ ne nous dira rien sur le niveau réel de risque lié à l'aspartame, car ce n'est pas ce que signifient ces catégorisations ». Et d'ajouter : « J'insiste cependant sur le fait que les preuves que ces substances peuvent causer le cancer ne sont pas très solidessolides, sinon elles auraient été classées dans le groupe 1 ou 2A ». Toujours est-il que le Circ devrait faire part de sa décision dans quelques jours, avec la remise d'un rapport complet sur ces risques potentiels.
Révision de la dose journalière admissible
D'après l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), pour l'aspartame, « la dose journalière admissible de 40 milligrammes par kilogrammekilogramme de poids corporel par jour est considérée comme protectrice pour la population générale », précisant que les consommateurs y sont bien moins exposés au quotidien. The Guardian, citant un porteporte-parole du Circ, précise toutefois que cette dose journalière pourrait être révisée au regard des nouvelles observations. « Le comité mixte d'experts FAOFAO/OMS sur les additifs alimentairesadditifs alimentaires mettra à jour son exercice d'évaluation des risques de l'aspartame, y compris la révision de la dose journalière admissible et l'évaluation de l'exposition alimentaire à l'aspartame. Le résultat des deux évaluations sera mis à disposition en même temps, le 14 juillet 2023. »
L'édulcorant de synthèse est présent dans environ 6 000 produits alimentaires, parmi lesquels certains sodas et boissons gazeuses diététiques, certains yaourtsyaourts, chewing-gums, ou bonbons, ou encore dans certains médicaments, consommés par des millions de personnes à travers le monde. En 2022, une étude française notamment menée par des chercheurs de l’Inserm auprès de 102 865 adultes mettait en évidence « une association entre la consommation d'édulcorants et un risque accru de cancer ».
« Ces résultats ne soutiennent pas l'utilisation d'édulcorants en tant qu'alternatives sûres au sucresucre et fournissent de nouvelles informations pour répondre aux controverses sur leurs potentiels effets néfastes sur la santé. Ils fournissent par ailleurs des données importantes pour leur réévaluation en cours par l'Autorité européenne de sécurité des alimentsAutorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et d'autres agences de santé publique dans le monde », expliquait alors la Dr Mathilde Touvier, directrice de Recherche à l'Inserm et coordinatrice de l'étude.
Édulcorants : et s’ils étaient cancérigènes ?
Les sucres artificiels ou édulcorants sont partout dans l'alimentation industrielle, boissons comprises. Depuis de nombreuses années, plusieurs études ont mis en évidence les effets néfastes pour la santé de ces additifs. Un nouvel article vient faire la lumièrelumière sur leur lien avec la survenue de cancers.
Article de Stéphanie Le GuillouStéphanie Le Guillou, publié le 25 mars 2022
L'industrie alimentaire utilise des sucres artificiels dans de nombreux aliments et boissons. Les effets néfastes pour la santé des édulcorants sont de mieux en mieux connus. Ils seraient impliqués dans la survenue de maladies chroniques et de cancers. Les auteurs d'une étude publiée le 24 mars 2022 dans la revue PLOS Medecine ont investigué le lien entre consommation de sucres de synthèse (aspartame E951, acesulfame-K E950, sucralose E955) et le risque de cancer dans un groupe de plus de 100.000 personnes. L'aspartame, le plus connu des sucres artificiels, a la même valeur énergétique que le sucre mais a un pouvoir sucrant 200 fois plus élevé : il suffit d'en mettre très peu pour avoir un goût sucré.
Un suivi sur plus de 100.000 Français
Cette étude a été menée en France et a pu réunir 102.865 participants adultes issus de la cohortecohorte NutriNet-Santé de 2009 à 2021. La médiane de suivi des individus est de 7,8 années. Pour mesurer les apports en sucres de synthèse, les participants ont dû à plusieurs reprises enregistrer pendant 24 heures tout ce qu'ils ont mangé en incluant les noms de marque des aliments et boissons industriels. Des modèles statistiques ont été utilisés et ajustés sur l'âge, le sexe, le niveau socio-professionnel, l'activité physiquephysique, le fait d'être fumeur ou non, l'IMC (indice de masse corporelleindice de masse corporelle), la prise ou la perte de poids durant le suivi, le fait d'être diabétiquediabétique ou non et les antécédents familiaux de cancers. Les modèles ont également été adaptés en fonction des apports d'alcoolalcool, de sodiumsodium, d'acides gras saturésacides gras saturés, de fibres, de sucres, de fruits et légumes, de céréalescéréales complètes et de produits laitiers.
La consommation de sucres artificiels est un facteur de risque des cancers
Les plus grands consommateurs de sucres de synthèse (tous confondus) avaient plus de risques de développer un cancer, quelle que soit sa localisation. En particulier, l'aspartame et l'acesulfame-K étaient associés avec un risque plus élevé de cancer.
Les auteurs ont mis en évidence un lien statistiquement significatif entre sucres artificiels et survenue d'un cancer du sein ou d'un cancer lié à l'obésitéobésité. L'aspartame avait un lien particulièrement puissant avec le cancer du seincancer du sein et les cancers liés à l'obésité.
Beaucoup de cancers pourraient être évités. Les cancers liés à la consommation de produits transformés en font partie. D'une part, il faut éduquer les populations dès le plus jeune âge à la consommation modérée de ce type d'aliments. D'autre part, il est nécessaire de mieux réglementer l'utilisation des sucres artificiels par les industriels via l'Autorité européenne de sécurité des aliments et les autres agences de santé.
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