Les records de température tombent. Les uns après les autres. La machine infernale du réchauffement climatique est lancée. Nous l’avons lancée. Et elle semble parfois vouloir nous échapper. Alors pourrons-nous seulement l’arrêter un jour ? Ramener nos émissions de gaz à effet de serre au net zéro sera-t-il suffisant ?


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    « Sans équivoque ». C'est le terme retenu par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climatGroupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) dans son 6e rapport d'évaluation (2021-2022) pour qualifier la responsabilité des activités humaines dans le réchauffement climatique que nous connaissons depuis quelques décennies. En émettant des gaz à effet de serre (GES) dans notre atmosphère, nous avons déréglé le climat de notre Planète. Les températures se sont mises à grimper. D'environ un demi-degré Celsiusdegré Celsius de la période préindustrielle au début des années 2000. D'un peu plus d'un autre demi-degré dans les vingt années qui ont suivi. Et nous risquons désormais de franchir le seuil du 1,5 °C de réchauffement climatique anthropique désigné par l'Accord de Paris comme celui sous lequel il faudrait nous maintenir pour garder sur notre Terre, des conditions vivables pour à peu près tous.

    Arrêter les émissions de gaz à effet de serre pour arrêter le réchauffement climatique

    Si le réchauffement climatique est dû à nos émissionsémissions de gaz à effet de serre, suffira-t-il de les réduire pour arrêter la machine ? Certainement pas. Car c'est un peu comme si votre baignoirebaignoire débordait. Il ne suffirait pas de tourner légèrement le robinet pour qu'elle arrête de déborder. Ce qu'il faudrait pour cela, c'est complètement fermer le robinet. En d'autres mots, concernant le réchauffement climatique, réduire nos émissions de GES permettrait seulement de ralentir l'augmentation des températures. En revanche, arrêter toute émission de gaz à effet de serre pourrait le stopper. C'est l'idée du « zéro émission ». On lui adjoint parfois le terme de « nette » pour indiquer que certaines émissions pourront être compensées -- par la reforestation ou la capture et la séquestration de dioxyde de carbone (CO2).

    Mais, dans la vraie vie, les choses ne sont jamais aussi simples. Arrêter d'émettre des GES ne nous permettrait pas de revenir immédiatement en arrière et de retrouver le climat plus agréable de nos 20 ans. Parce que les gaz à effet de serre, une fois émis, ont la fâcheuse tendance à s'installer plus ou moins durablement dans notre atmosphère. Ils continuent ainsi de réchauffer notre Planète pendant un certain temps :

    • quelques jours seulement pour la vapeur d’eau, qui est le principal gaz à effet de serre ;
    • mais déjà plus de 10 ans pour le méthane (CH4), un GES au fort pouvoir réchauffant ;
    • jusqu'à 1 siècle pour le fameux CO2 ;
    • environ 120 ans pour un autre GES encore peu connu, le protoxyde d'azoteprotoxyde d'azote (N2O) ;
    • et même plus de 50 000 ans pour certains gaz halogénés comme le CF4.

    Réchauffement climatique : stop ou encore ?

    Doit-on en conclure que, même en arrêtant dans l'instant nos émissions de gaz à effet de serre, les températures continueront d'augmenter pendant des siècles, voire des millénaires ? C'est ce que les scientifiques ont d'abord modélisé. Ils entrevoyaient alors un réchauffement qui s'aggraverait de l'ordre d'un demi-degré encore, même une fois atteint le zéro émission.

    Ils n'en sont désormais plus aussi sûrs. Des travaux suggèrent que les concentrations de gaz à effet de serre dans notre atmosphère pourraient finalement assez rapidement diminuer une fois le zéro émission atteint. Grâce au CO2 qui est naturellement absorbé par la terre et par les océans. De quoi potentiellement stopper net la marche en avant du réchauffement climatique. Un petit coup de pouce des technologies de capture et de stockage du CO2 pourrait même rapidement le faire reculer.

    Un climat qui pourrait être bouleversé pour encore longtemps

    Mais beaucoup de questions restent encore sans réponse. Par exemple, celle qui touche aux précieux puits de carbone naturels. En misant sur un zéro émission « nette », n'aurons-nous pas saturé ces puits et ne les empêcherons-nous pas d'absorber le CO2 et d'arrêter rapidement le réchauffement climatique ? En consommant moins de combustiblescombustibles fossilesfossiles et en faisant, de fait, baisser la pollution de l'airair, n'allons-nous pas trop faire baisser les concentrations en aérosolsaérosols dans notre atmosphère, des aérosols qui eux, refroidissent la Planète et compensent ainsi une part du réchauffement ?

    Ainsi, d'autres travaux continuent d'estimer aujourd'hui que les gaz à effet de serre que nous avons déjà émis vers notre atmosphère ont la capacité d'impacter le climat pour au moins... un demi-million d'années ! Impacter ne signifiant pas nécessairement des températures qui continueront d'augmenter. Mais, par exemple, que la prochaine période glaciairepériode glaciaire qui devrait naturellement se produire d'ici 120 000 ans n'arriverait pas avant 600 000 ans.

    Toutefois, ces doutes exprimés par les scientifiques n'enlèvent rien au fait qu'il est urgent de ramener à zéro nos émissions de gaz à effet de serre. Plus vite ce sera fait, plus vite nous arrêterons le réchauffement climatique et ses effets.