Les flatulences des animaux herbivores actuels participent au réchauffement climatique en libérant plusieurs millions de tonnes de méthane par an. Mais au fait, des dinosaures aussi se nourrissaient de végétaux... Ont-ils eu une influence sur le climat du Mésozoïque ? Il semble bien que oui. À eux seuls, estiment des scientifiques, les sauropodes produisaient chaque année un demi-milliard de tonnes de ce puissant gaz à effet de serre…

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    Les sauropodes ont occupé des postes clés au sein des écosystèmes entre le Jurassique moyen et le Crétacé supérieur. Leurs tailles et leurs poids pouvaient atteindre des valeurs impressionnantes. L'argentinosaure mesurait près de 30 mètres de long pour un poids compris entre 80 et 100 tonnes. Autre particularité, tous les dinosaures de ce groupe étaient des herbivores.

    Comme nos vaches actuelles, ils devaient donc abriter dans leurs intestins des bactériesbactéries symbiotiques leur permettant de digérer les végétaux... tout en produisant du méthane. Ce gazgaz, libéré par des flatulencesflatulences, a la faculté de capter et d'emprisonner les rayonnements infrarougesinfrarouges émis par le soleilsoleil et participe donc au réchauffement climatique. À eux seuls, les herbivoresherbivores ruminants actuels libéreraient chaque année 50 à 100 millions de tonnes de ce puissant gaz à effet de serregaz à effet de serre. Ce chiffre n'est pas négligeable. Certains pays en sont même venus à vouloir réduire le nombre de ruminants sur leurs territoires pour diminuer la libération de méthane, à l'exemple de l'Australie

    Une équipe britannique menée par David Wilkinson, de l'université John Moores de Liverpool, s'est intéressée à cette problématique mais... du temps des dinosaures. En effet, la température moyenne de la TerreTerre à l'époque, durant l'ère MésozoïqueMésozoïque, était supérieure de 10 °C à la valeur actuelle. Le climatclimat de la Terre il y a entre 65 et 250 millions d'années aurait-il pu être influencé par des pets de sauropodessauropodes ? La réponse, publiée dans la revue Current biology, est positive. Ces animaux produisaient autant de méthane par an que l'ensemble de nos sources d'émissionsémissions actuelles !

    Un <em>Allosaurus fragilis</em> à la poursuite d’un <em>Apatosaurus louisæ </em>au sein du musée de Carnegie. Ce dinosaure herbivore pouvait atteindre une longueur de 22 mètres et devait peser environ 20 tonnes. © Kordite, Flickr, CC by-nc 2.0

    Un Allosaurus fragilis à la poursuite d’un Apatosaurus louisæ au sein du musée de Carnegie. Ce dinosaure herbivore pouvait atteindre une longueur de 22 mètres et devait peser environ 20 tonnes. © Kordite, Flickr, CC by-nc 2.0

    Les dinosaures étaient de véritables usines à méthane 

    Seule une succession d'estimations permet de mener ce type étude. Le nombre d'herbivores ayant vécu au Mésozoïque est impossible à estimer à partir des données fossilesfossiles. David Wilkinson a donc utilisé des informations disponibles sur la physiologie et le métabolismemétabolisme présumés des dinosaures pour déterminer le nombre d'individus d'Apatosaurus louisæ, une espèceespèce de taille moyenne choisie comme modèle, qui occupait les espaces verts du Globe. Avec une petite marge de sécurité, la réponse est d'environ 10 par km².

    Il reste à savoir combien de litres de méthane étaient produits par un seul individu. Cette valeur a été estimée grâce à une formule développéeformule développée pour des herbivores non-ruminants actuels tels que le cheval ou la chèvre. La quantité de gaz libérée par jour et par individu s'élève en litres à 0,18 que multiplie le poids de l'animal (en kgkg) élevé par 0,97. Un Apatosaurus louisæ adulte de taille moyenne émettait donc 2.975 litres de gaz par jour dans l'atmosphèreatmosphère, soit 1,9 kg.

    La multiplication de ce résultat par 10 (le nombre estimé de sauropodes par km²), puis par 365, le nombre de jours dans une année, fournit la production totale de CH4 par km² et par an, soit 6,9 tonnes. Dernier détail, les zones propices à la vie des herbivores recouvraient une surface de 75 millions de km², soit la moitié des terres émergées du Globe. Le résultat est surprenant, les diplodocusdiplodocus et autres mastodontes émettaient 520 millions de tonnes de méthane dans l'atmosphère par an, soit cinq fois plus que les animaux actuels.

    Les dinosaures herbivores et leurs symbiontes (c'est-à-dire leurs bactéries symbiotiques) auraient très certainement pu influencer le climat de l'époque à eux seuls. Bien évidemment, ce travail reste théorique. Pour répondre par avance aux plus sceptiques, les auteurs soulignent que même une quantité deux fois moindre pourrait avoir eu une influence sur le climat. Pour information, les émissions actuelles de méthane, toutes sources confondues, oscilleraient entre 500 et 600 millions de tonnes par an, et sont donc du même ordre de grandeurordre de grandeur...