Depuis que la chasse aux exoplanètes est ouverte, les astrophysiciens faisaient face à un mystère. Pourquoi y a-t-il si peu de planètes dont la taille se situe entre celles des super-Terres et des sub-Neptunes ? Une nouvelle étude pourrait enfin avoir la réponse : elles rétrécissent en perdant leur atmosphère dans l’espace !


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    De la petite planète rocheuse à la super géante gazeuse, les exoplanètes présentent des tailles extrêmement variées, à l'image des planètes de notre Système solaire. Afin de rapidement visualiser leur taille, les exoplanètes sont d'ailleurs souvent catégorisées suivant une terminologie utilisant le nom des huit planètes de notre système, et en y accolant le préfixe « super » ou « sub » pour signaler une taille légèrement supérieure ou inférieure à la planète de référence. On trouve ainsi un peu de tout dans la Galaxie. Enfin... peut-être pas. Car une certaine gamme d'exoplanètes semble manquer à l'appel.

    Trop peu d’exoplanètes de taille situées entre les super-Terres et les sub-Neptunes

    Au début, si la relativement faible proportion d'exoplanètes possédant une taille d'environ 1,5 à 2 fois celle de la Terre (catégorie tombant entre celles des super-Terres et des sub-NeptunesNeptunes) pouvait passer comme un biais scientifique, le catalogue est désormais bien trop volumineux pour penser à un simple défaut d'observation. Il y aurait donc une explication rationnelle à l'absence d'exoplanètes de cette taille.

    Pourquoi y a-t-il si peu d'exoplanètes de taille intermédiaire entre les super-Terres et les sub-Neptunes ? © Paulista, Adobe Stock
    Pourquoi y a-t-il si peu d'exoplanètes de taille intermédiaire entre les super-Terres et les sub-Neptunes ? © Paulista, Adobe Stock

    Pour expliquer cette observation, une équipe de chercheurs s'est penchée sur les données acquises par le télescope spatial Kepler lors de la mission nommée K2K2. Leur conclusion, publiée dans la revue The Astronomical Journal, est que les planètes situées entre les super-Terressuper-Terres et les sub-Neptunes auraient en fait la fâcheuse tendance à s'évaporer dans l'espace !

    Une atmosphère poussée dehors ou soufflée par les radiations ?

    L'idée de départ était que les planètes du type sub-Neptune auraient plus tendance à perdre leur atmosphèreatmosphère. Un phénomène qui pourrait s'expliquer par le fait que de telles planètes ne possèdent pas une massemasse suffisante, et donc une force gravitationnelleforce gravitationnelle assez importante, pour garder leur atmosphère. En perdant cette dernière, ces géantes gazeuses rétréciraient donc jusqu'à la taille des super-Terres leur assurant une meilleure stabilité. Deux mécanismes peuvent cependant être invoqués pour expliquer ce phénomène : une perte de masse induite par le noyau, et le phénomène de photo-évaporation. Dans le premier cas, la perte de masse se produit car le noyau chaud de la planète émet des radiations qui « poussent » en quelque sorte l'atmosphère en dehors du champ gravitationnel. La photo-évaporation, quant à elle, se produit lorsque l'atmosphère est « soufflée » par les radiations émises par l'étoileétoile.

    Les chercheurs ont donc testé ces deux hypothèses sur les amas de Praesepe et des Hyades. Les étoiles de ces amas sont âgées de 600 à 800 millions d'années et sont donc relativement jeunes. Il s'agit là d'un critère important car si la photo-évaporation est supposée se produire très rapidement, durant les 100 premiers millions d'années de vie de la planète, la perte de masse induite par le noyau est un phénomène beaucoup plus lent (de l'ordre du milliard d'années).

    Le phénomène de photo-évaporation : les radiations de l'étoile « soufflent » l'atmosphère de la planète © ESA/Hubble, <em>Wikimedia Commons</em>, CC by 4.0
    Le phénomène de photo-évaporation : les radiations de l'étoile « soufflent » l'atmosphère de la planète © ESA/Hubble, Wikimedia Commons, CC by 4.0

    Un mystère enfin résolu

    L'analyse révèle ainsi que 100 % des étoiles de ces deux amas possèdent des planètes de type sub-Neptune. En comparaison, seuls 25 % des étoiles âgées de plus de 800 millions d'années possèdent des étoiles de cette taille. Ces résultats montrent que la perte de masse induite par le noyau est donc le processus le plus probable pour expliquer la faible proportion de sub-Neptunes dans les systèmes planétaires âgés de plus d'un milliard d'années.


    Découverte de mini-Neptunes qui se transforment en super-Terres

    Des mini-Neptunes, il y en existe beaucoup, parmi les exoplanètes. Des planètes qui, comme notre Neptune, sont essentiellement composées d'hydrogènehydrogène et d'héliumhélium. Des astronomesastronomes viennent d'en trouver deux qui perdent leur atmosphère et s'apprêtent à basculer dans une nouvelle classe d'exoplanètes, celle des super-Terres.

    Article de Nathalie MayerNathalie Mayer publié le 8 février 2022

    Une mini-Neptune, c'est une planète au noyau rocheux, mais entouré d'une épaisse atmosphère. Une planète comme les astronomes en ont déjà identifié de nombreuses en orbiteorbite autour d'autres étoiles que notre SoleilSoleil. Dans le système stellairesystème stellaire appelé TOI 560, à quelque 103 années-lumièreannées-lumière de la Terre, par exemple. Ou encore, autour de HD 63433, à environ 73 années-lumière de notre Système solaire.

    Des chercheurs de l'université Caltech (États-Unis) ont tourné vers elles les instruments de l'observatoire W.M. KeckKeck (Hawaï) et le télescope spatial Hubbletélescope spatial Hubble pour les étudier de plus près. Et ils ont découvert que du gazgaz s'échappe de la mini-Neptune la plus interne du système TOI 560 -- soit TOI 560.01 -- et de la mini-Neptune la plus externe de HD 63433 -- soit HD 63433 c. De quoi suggérer que ces deux exoplanètes pourraient être en train de se transformer... en super-Terres.

    Les modèles développés par les astronomes prévoyaient le phénomène, mais il n'avait encore jamais pu être confirmé par l'observation. Les chercheurs envisagent les mini-Neptunes avec des atmosphères primordiales faites d'hydrogène et d'hélium. Des éléments restant de la formation de leur étoile hôte. Si une exoplanète de type mini-Neptune est suffisamment petite et proche de son étoile, les rayons Xrayons X stellaires et le rayonnement ultravioletultraviolet devraient être en mesure d'éliminer son atmosphère primordiale sur une période de centaines de millions d'années. Résultat, il resterait une super-Terre rocheuse avec un rayon sensiblement plus petit. Et a priori, une atmosphère relativement mince, similaire à celle qui entoure notre Planète.

    La mini-Neptune TOI 560.01 est environ 2,8 fois plus grande que la Terre. Son atmosphère est essentiellement composée d’hydrogène et d’hélium. Un hélium qui s’échappe actuellement en quantité. Laissant penser que d’ici quelques centaines de millions d’années, cette exoplanète aura rejoint le rang des super-Terres. © Adam Makarenko, Observatoire Keck, Nasa Vidéo

    Un phénomène qui reste à comprendre

    De quoi expliquer pourquoi les astronomes n'ont observé que peu de planètes de taille intermédiaire. Entre la mini-Neptune et la super-Terre. Parce qu'une planète de taille intermédiaire intercepterait encore suffisamment de rayonnement pour perdre rapidement de son atmosphère et donc, de son diamètre. Elle ne resterait ainsi que peu de temps dans ce domaine des « tailles intermédiaires ».

    Le saviez-vous ?

    Pour expliquer qu’il existe si peu de planètes de taille intermédiaire, les astronomes envisagent aussi que les plus petites planètes rocheuses n’ont jamais rassemblé d’enveloppes de gaz. Les mini-Neptunes pourraient être des mondes aquatiques et non enveloppés d’hydrogène gazeux.

    C'est en étudiant le passage des exoplanètes devant leur étoile hôte que les astronomes ont obtenu les précieuses données qui les ont menées à ces conclusions. Ils ont en effet trouvé, du côté de TOI 560.01, des signatures d'hélium. Et du côté de HD 63433 c, des signatures d'hydrogène. En revanche, rien pour HD 63433 b, la mini-Neptune interne du système. Qui a peut-être... déjà perdu son atmosphère.

    La vitessevitesse mesurée des gaz en question a donné la preuve de pertes dans les atmosphères. Les astronomes évoquent 50 kilomètres par seconde (km/s) pour l'hydrogène de HD 63433 c et 20 km/s pour l'hélium de TOI 560.01. L'étendu des écoulements confirme le phénomène : il atteint 12 fois le rayon de la planète pour HD 63433 c et 3,5 fois le rayon de la planète pour TOI 560.01. Avec dans ce cas, des gaz qui fuient en direction de l'étoile hôte. Contrairement à ce que prévoient les modèles...