Si la panspermie, c'est-à-dire la diffusion d'organismes vivants d'une planète à l'autre, voire d'une étoile à une autre, est possible, alors cette dispersion doit laisser des traces, en l’occurrence la présence de vie dans des astres voisins. Des astrophysiciens suggèrent que, lorsqu'on saura trouver des biosignatures, ces oasis de vie seraient repérables, s'ils existent.

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    Comment la vie est-elle apparue sur Terre ? À cette grande question des origines, il n'existe pas encore de réponse définitive. À travers leurs enquêtes au sein de notre monde et des autres - dans notre voisinage (Mars, Europe, EnceladeEncelade, etc.) ou au-delà (les exoplanètes) -, les biologistes et astrobiologistes assemblent petit à petit les pièces de ce puzzle. La Terre est pour l'instant le seul endroit connu où la vie existe, autour d'une étoile paisible et relativement stable depuis des milliards d'années. Aussi, la vie serait-elle une exclusivité de notre planète ? Un phénomène extrêmement rare, voire unique ? Ou, au contraire, abonde-t-elle dans la Galaxie et l'univers ? Se peut-il qu'elle ait émergé spontanément sur Terre à la faveur de processus physico-chimiques conditionnés par la synergiesynergie exceptionnelle de nombreux facteurs (taille, masse, orbiteorbite, géologiegéologie, lunelune, quantités d'eau liquide, etc.) ? Ou a-t-elle pu se disséminer d'un monde à l'autre ?

    Notre biosphèrebiosphère a pu, en effet, être contaminée par des agents venus d'autres systèmes planétaires. Dans ce scénario, dit de la panspermie, les astéroïdesastéroïdes et les comètescomètes, représentent de bons candidats pour transporter d'éventuels germesgermes de vie, voire des bactéries résistantes... En effet, ces objets astronomiques sont volontiers échangés par deux étoiles lorsqu'elles passent à proximité l'une de l'autre - plusieurs de nos comètes, voire des plutoïdesplutoïdes comme SednaSedna, auraient ainsi été « volées » à d'autres étoiles.

    Un moyen alternatif pour disperser la vie serait un transport volontaire de la vie sur des mondes choisis. Pour l'instant, l'humanité n'est pas encore en mesure de réaliser une telle exportation mais, qui sait, cela pourrait être mis en œuvre dans un avenir plus ou moins proche. Et cela a peut-être déjà été entrepris par d'autres...

    Des floraisons de vie

    Face à ces incertitudes, une équipe d'astrophysiciensastrophysiciens d'Harvard estime que, si l'hypothèse de la panspermie est correcte, il serait possible d'en déceler des traces tangibles. La vie ainsi propagée formerait progressivement « des groupes qui grandissent et se chevauchent, comme des bulles dans une casserole d'eau bouillante », pour reprendre la métaphore d'Henry LinLin (Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics), auteur principal de l'article accepté pour publication dans The Astrophysical Journal Letters (disponible sur arXiv). Selon ce modèle, la vie se diffuserait dans toutes les directions et prendrait plus ou moins racine, selon le milieu qui accueille les graines. « La vie se propagerait d'une étoile-hôte à une autre à la manière d'une épidémieépidémie, ajoute son collègue Avi Loeb qui préfère cette image. Dans un sens, la Voie lactéeVoie lactée serait infectée avec des poches de vie. » Cela serait donc identifiable, le désertdésert galactique se remplissant peu à peu d'oasis saturées de vie.

    Sur ce schéma de notre galaxie, la Voie lactée, vue d’au-dessus, les taches vertes indiquent d’hypothétiques foyers où la vie pourrait essaimer. La détection de biosignatures regroupées dans certaines régions de la galaxie validerait le scénario d’une propagation de la vie d’une étoile à l’autre, c'est-à-dire le scénario de la panspermie. © Nasa, JPL, R. Hurt

    Sur ce schéma de notre galaxie, la Voie lactée, vue d’au-dessus, les taches vertes indiquent d’hypothétiques foyers où la vie pourrait essaimer. La détection de biosignatures regroupées dans certaines régions de la galaxie validerait le scénario d’une propagation de la vie d’une étoile à l’autre, c'est-à-dire le scénario de la panspermie. © Nasa, JPL, R. Hurt

    Il ne reste plus qu'à observer des biosignatures dans l'atmosphèreatmosphère de lointaines planètes pour traquer d'éventuels essaims et valider ou non cette hypothèse. Nous y sommes presque. En effet, vingt ans après la découverte de la première exoplanète, Pegasi 51b, et près de 2.000 autres cas confirmés, les nouvelles technologies nous permettent désormais de caractériser l'atmosphère de quelques-uns de ces nouveaux mondes. D'abord des géantes gazeusesgéantes gazeuses et très bientôt des superterressuperterres telles Kepler-452b (à 1.400 années-lumièreannées-lumière), « la plus ressemblante à la Terre », ou HD 219134b, récemment confirmée et toute proche de nous (21 années-lumière).

    D'ici quelques années, les chercheurs ont bon espoir d'étudier l'atmosphère de planètes rocheusesplanètes rocheuses gravitant dans la zone potentiellement habitable de leur étoile et de démasquer d'éventuelles traces d'activité biologique. Pour les auteurs, « la détection d'un minimum de 25 exoplanètes biologiquement active suffirait pour accorder 5 sigma à la panspermiepanspermie [renforçant ainsi l'hypothèse, NDLRNDLR] ». Mais les étoiles bougent dans la Voie lactée, montent et descendent dans les bras spiraux, entrent dans des zones d'« embouteillages » ou dans des régions moins densément peuplées. Bref, les chercheurs soulignent que ces paquetspaquets de vie ne pourront être détectés que s'ils se répandent assez lentement.

    Comme l'a dit Thomas Carlyle (1795-1881) cité dans l'introduction de Terres d'ailleurs, à la recherche de la vie dans l'Univers d'André BrahicAndré Brahic et Bradford Smith (édition Odile Jacob) : « Si les planètes sont habitées, quelle étendue pour la folie ; si elles ne sont pas habitées, quelle perte de place ».