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On devrait fêter dans quelques années le centenaire de la découverte de la relativité générale par Albert EinsteinEinstein. Dès 1917, le physicienphysicien avait montré que ses équations de champ, qui décrivaient les déformations du tissu de l'espace-temps comme si celui-ci était la surface d'un fluide, devaient contenir des solutions correspondant à la propagation d'ondes. Einstein retrouvait en fait dans le cadre de sa théorie relativiste de la gravitation ce qu'avait déjà entrevu le mathématicienmathématicien et physicien Henri Poincaré quelques années plus tôt. Le génial savant français, même s'il n'avait pas pris toute la mesure de la révolution physique de la théorie de la relativité restreinte, dont il avait largement anticipé la forme mathématique avant Einstein et Minkowski, savait qu'elle impliquait de modifier les équations de la gravitation de Newton.
En effet, dès le XIXe siècle, un autre mathématicien de grand talent, Laplace, avait montré que l'influence de la gravitation devait se déplacer bien plus vite que la vitesse de la lumièrevitesse de la lumière entre les corps pour rendre compte de leur mouvementmouvement en fonction des modifications des positions des corps attracteurs. Poser que toutes les lois de la physique devaient respecter une vitesse limite, celle de la lumière, conduisait à postuler une modification des lois de Newton sous la forme d'équations ressemblant à celles décrivant le champ électromagnétiquechamp électromagnétique de Maxwell et la propagation des ondes lumineuses. La théorie proposée pour cela par Poincaré n'était pas la bonne. Mais, comme l'a montré Einstein, il existe bel et bien des ondes gravitationnellesondes gravitationnelles dans les équations de la relativité généralerelativité générale et elles doivent se propager à la vitesse de la lumière.
Une image de synthèse extraite de la représentation d'une collision de deux naines blanches. On a représenté ici les ondes gravitationnelles faisant osciller le tissu de l'espace-temps comme des vagues sur l'eau, juste avant la collision des deux astres compacts. En emportant de l'énergie, ces ondes font décroître la taille de l'orbite d'un système binaire constitué d'astres compacts jusqu'à ce qu'une collision se produise. © GSFC/D. Berry
La première preuve indirecte par un couple d'étoiles à neutrons
Toutefois, dans les années 1950 et encore pendant les années 1960, des doutes sur le bien-fondé des calculs d'Einstein étaient apparus dans l'esprit de certains physiciens mathématiciens. Ces doutes furent dissipés mais il restait tout de même le problème de la démonstration de l'existence des ondes gravitationnelles. Malheureusement, l'intensité du rayonnement émis par des corps matériels, accélérés à la façon des électronsélectrons produisant des ondes lumineuses, est extrêmement faible. Pour avoir une chance d'observer quelque chose sur Terre avec des détecteurs d'ondes gravitationnelles comme Ligo et Virgo, il faut des sources comme des astresastres compacts comme les étoiles à neutrons et des trous noirstrous noirs, dans des systèmes binairessystèmes binaires ou bien entrant en collision.
Heureusement, dès 1974, la détection d'un pulsar binaire par Hulse et Taylor allait permettre les années passant de donner la première preuve indirecte de l'existence de ces ondes. En effet, les deux étoiles à neutronsétoiles à neutrons en orbiteorbite l'une autour de l'autre devaient perdre de l'énergieénergie sous forme d'ondes gravitationnelles de telle sorte que la taille et la période de leur orbite devaient diminuer avec le temps. Comme on était aussi en présence d'un pulsarpulsar, cette perte devait pouvoir être mesurée au cours du temps sous forme d'une diminution de la période du signal capté par des radiotélescopesradiotélescopes sur Terre. L'accord entre les prédictions de la théorie d'Einstein et les observations ont finalement valu à Hulse et Taylor le prix Nobel de physique en 1993.
Une vidéo de présentation de la mission eLisa (voir les explications ci-dessous). Un prototype sera peut-être lancé en 2014. © djxatlanta-Max Planck Institute for Gravitational Physics
Comme vient de le prouver un groupe d'astronomesastronomes dans un article déposé sur arxiv on peut aussi démontrer indirectement l'existence des ondes gravitationnelles dans un système binaire contenant des naines blanchesnaines blanches. Dans ce cas, il a suffi de simples observations dans le visible, comme avec le télescopetélescope de 2,1 m Otto Struve équipant le McDonald Observatory au Texas. En utilisant la même méthode que celle des vitesses radiales mise en œuvre pour détecter des exoplanètesexoplanètes, les chercheurs ont pu constater que depuis 2011 au moins, la période orbitalepériode orbitale de l'étoile double SDSS J065133.338+284423.37 ne cessait de diminuer.
Comme il s'agit de deux naines blanches qui, bien qu'à une distance de l'ordre du tiers de la distance de la Terre à la LuneLune, ne sont pas connectées par un transfert de matièrematière, cette diminution de la valeur de la période ne peut s'expliquer que par une perte d'énergie sous forme d'ondes gravitationnelles.
Des milliers d'étoiles doubles sources d'ondes gravitationnelles
La période orbitale de cette binaire (aussi nommée J0651) située à environ 3.000 années-lumièreannées-lumière de la Terre est d'un peu plus de 6 minutes et elle diminue d'environ 0,25 milliseconde chaque année, en bon accord avec les prédictions de la relativité générale.
J0651, ainsi que des milliers d'autres systèmes similaires proches du SoleilSoleil dans la Voie lactéeVoie lactée, devraient être de bonnes sources d'ondes gravitationnelles détectables au début des années 2020 si l'evolved Laser Interferometer Space AntennaLaser Interferometer Space Antenna (eLisa)) est finalement construit et lancée par l'ESa. Depuis le désengagement de la NasaNasa, eLisa est la nouvelle dénomination du projet Lisa qui consiste à lancer trois satellites artificiels identiques en orbite héliocentriquehéliocentrique formant un triangle équilatéral de 5 millions de kilomètres de côté. Ces trois satellites formant une configuration presque perpendiculaire au plan de l'orbite terrestre et qui suivent la Terre sur son orbite avec un retard de 20°, soit environ 20 jours terrestres, constitueraient une sorte d'interféromètreinterféromètre géant. En mesurant leurs distances respectives avec des lasers infrarougesinfrarouges, cet instrument détecterait d'infimes modifications périodiques causées par le passage de certaines ondes gravitationnelles.
En permettant de comparer la forme de ces modifications avec celle prédite par le calcul en fonction des paramètres d'un événement astrophysiqueastrophysique générateurgénérateur d'ondes gravitationnelles, eLisa ouvrirait une nouvelle ère en astrophysique, celle de l'astronomie gravitationnelle.