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    Le bâillementbâillement est un cycle respiratoire paroxystique, associé à une ouverture totale de la bouche, comportant, durant 5 à 10 secondes, des mouvements se succédant toujours dans la même séquence. Mais à quoi sert le bâillement ?

    Le bâillement est un cycle respiratoire paroxystique. Mais à quoi sert-il ? © VGstockstudio, Shutterstock
    Le bâillement est un cycle respiratoire paroxystique. Mais à quoi sert-il ? © VGstockstudio, Shutterstock

    Les mouvements du bâillement sont les suivants :

    • Une inspiration ample, lente et très profonde avec la bouche largement ouverte.
    • L'expansion du pharynxpharynx peut quadrupler son diamètre par rapport au repos, simultanément à une ouverture du larynxlarynx avec abductionabduction maximale des cordes vocalescordes vocales. L'inspiration d'air ne peut pas se faire par le neznez pour bâiller, ni dents occluses.
    • Un bref arrêt des flux ventilatoires à thoraxthorax plein, l'acmé, souvent associé à des mouvements d'étirement des membres et une occlusion des yeuxyeux.
    • Une expiration passive bruyante et lente chez l'Homme, rapide chez les primatesprimates, accompagnée d'une relaxation de tous les muscles concernés. La bouche se referme et le larynx reprend sa place initiale. Une sensation de bien-être se répand.

    Le tout peut s'accompagner de bruits d'intensité variable, volontairement ou non modulable. Les mouvements thoraciques et diaphragmatiques ne diffèrent en rien d'une inspiration banale, alors que l'importance de l'ouverture pharyngo-laryngée accompagnant un visible abaissement du cartilagecartilage thyroïdethyroïde et de l'os hyoïdehyoïde est propre au bâillement et absente dans l'imitation du bâillement. À ce moment s'ouvrent les trompes d'Eustache, entraînant une brève baisse de l'audition ; une ouverture du cardiacardia provoque un appel d'air intra-gastrique responsable d'une impression de plénitude abdominale.

    À quoi sert le bâillement ? © DR
    À quoi sert le bâillement ? © DR

    Les muscles et le bâillement

    Le bâillement n'est pas une simple ouverture de la bouche, mais un mouvement d'étirement musculaire généralisé, des muscles respiratoires (diaphragmediaphragme, intercostaux, scalènes), des muscles de la face et du cou.

    Très curieusement, il associe une contraction simultanée de muscles antagonistesmuscles antagonistes, tels les muscles masticateurs (fermeture de la bouche) et les muscles digastriques qui ont l'action prédominante, permettant la large ouverture de la bouche. Tous les muscles du facièsfaciès interviennent, donnant de multiples mimiques, sans ordre précis ; les sécrétions lacrymales sont brièvement gênées dans leur écoulement par la compression des canaux lacrymaux, une larmelarme perle alors à la paupière. Un peu de salivesalive déborde la lèvre largement éversée bouche grande ouverte.

    Le bâillement. Illustrations de la thèse de Wolter Seuntjens. © DR
    Le bâillement. Illustrations de la thèse de Wolter Seuntjens. © DR

    Le bâillement, un réflexe ?

    Cette association complexe et synergique de mouvements est néanmoins un comportement très stéréotypé qu'on peut qualifier de réflexe car de survenue involontaire. Une fois enclenché, le bâillement peut être modulé par la volonté, soit en accentuant toutes les phases, soit en minimisant l'ouverture de la bouche et l'expiration, mais sans jamais pouvoir être empêché.

    Il survient souvent par salves de deux ou trois cycles, accompagnées de mouvements d'étirement du tronc en hyperlordose, des membres en hyperextension chez les bipèdes, essentiellement au sortir du sommeilsommeil.

    Chez les quadrupèdes, le dosdos peut se déformer en dos rond (carnivorescarnivores : chats, chienschiens...). Les primates non humains bâillent le plus souvent assis, parfois allongés et même, exceptionnellement, en marchant. À l'acmé du bâillement, on peut observer soit un haussement d'épaules (mangabés), soit une contraction des muscles de la nuque dessinant une « bosse de zébu » (macaques). Le port de la tête se fait en hyperextension cervicale à l'inspiration, suivie d'une flexionflexion à l'expiration. Il s'associe à des émissions sonores de modulationsmodulations différentes suivant la phase et les types de bâillements. Le bâillement peut apparaître simultanément à une urination, une défécationdéfécation, une érection voire une vocalisation.

    Petits et grands bâilleurs

    L'association bâillement-étirements se nomme pandiculationpandiculation. Moindre audition, paupières fermées, sensation de plénitude corporelle concourent à une relative perte de contact avec l'environnement. Le bâillement est souvent perçu comme une jouissance, un bref bien-être, ressemblant aux satisfactions des tiqueurs.

    La durée du bâillement est fixe chez un individu. Il existe une stabilité au cours de la vie dans ce comportement, c'est-à-dire qu'il existe des petits bâilleurs (fréquence faible) et de grands bâilleurs (fréquence élevée). D'après les travaux du professeur Provine, 47 % des étirements s'associent à des bâillements, alors que seulement 11 % des bâillements sont associés à des étirements.

    À quoi sert le bâillement ?

    L'éthologieéthologie plaide pour donner un rôle de communication non verbale au bâillement (effet de synchronisation d'humeur d'un groupe, signal de décroissance d'un état de tension relationnelle ?). Les travaux récents concernant le comportement d'attachement (mère-enfant ; individu-groupe, individu-individu) montrent le rôle essentiel de l'oxytocine et du noyau paraventriculaire de l'hypothalamushypothalamus, comme pour le bâillement ; un lien permettant de comprendre le bâillement d'émotivité des primates ? 

    Chez l'Homme, la signification sociale du bâillement est un signal de fatigue ou d'ennui de l'interlocuteur. Ceci parait plus un conditionnement psychosocialpsychosocial signifiant qu'une fonction physiologique. M. de la Salle, prêtre, instituteur des écoles chrétienne, dans sa livraison de 1776 écrivait dans Les règles de la bienséance et de la civilité chrétienne : « Il faut surtout prendre garde en bâillant de ne rien faire qui soit indécent, et de ne pas bâiller excessivement : il est très malséant de le faire avec bruit ; et encore plus de s'allonger et de s'étendre en le faisant. ». 

    Enfin, il semble que le bâillement puisse devenir un réflexe conditionné comme les tests de renforcement par des récompenses alimentaires l'ont montré chez des primates non humains.