au sommaire


    La fabrication d'embryonsembryons humains par clonageclonage pourrait avoir deux indications, deux finalités, l'une thérapeutique et l'autre reproductrice (35,36). Dans le premier cas, il s'agit d'obtenir des cellules embryonnaires identiques sur les plans génétiquesgénétiques - et donc probablement immunologiques - à celles d'un malade en attente de greffesgreffes cellulaires pour une grande diversité de maladies : affections neurodégénératives telles que les maladies de Parkinsonmaladies de Parkinson ou d'AlzheimerAlzheimer, cancerscancers, diabètesdiabètes, insuffisances hépatocellulaires, brûlures... etc.

    La réalisation d'un tel programme nécessiterait de la part des biologistes une maîtrise précise de la différenciation de cellules souchescellules souches isolées d'un embryon cloné, ce qui, nous l'avons vu, n'est pas encore le cas mais n'est pas impossible. Dans l'avenir, une personne atteinte d'une maladie de Parkinson ou d'un diabète demanderait à sa femme, à sa fille, de lui faire don d'ovocytesovocytes, ou bien les obtiendrait de donneuses, rémunérées ou non. Le médecin remplacerait le noyau de ces ovulesovules par celui d'une cellule quelconque de la personne à soigner et cultiverait l'embryon cloné ainsi créé pendant 6 à 7 jours dans les conditions du laboratoire jusqu'à sa transformation en blastocytes. A ce stade, les cellules du bouton embryonnaire constituent les précurseurs du fœtusfœtus proprement dit. C'est là l'origine des cellules souches embryonnairescellules souches embryonnaires, dont nous avons déjà longuement parlé. S'il est possible de leur commander de se différencier, en agissant sur les conditions de culture, en cellules du cerveaucerveau ou du pancréaspancréas, elles pourront alors être greffées au malade pour traiter sa maladie de Parkinson ou son diabète. La prise de la greffe devrait, en principe, être parfaite puisque les cellules greffées seront essentiellement identiques à celles de la personne receveuse.

    Macaque rhésus.© Yann - Domaine public

    Macaque rhésus. © Yann - Domaine public

    Il faut noter que la description qui vient d'être faite d'un protocoleprotocole de clonage à visée thérapeutique chez l'homme reste à ce jour très académique. En effet, plusieurs équipes ont tenté de reproduire le clonage par transfert nucléaire chez des primatesprimates non humains (singes macaques et rhésus), mais sans succès. Selon des résultats rapportés par des journalistes scientifiques, les embryons clonés obtenus dégénèrent très rapidement, après quelques divisions seulement ; à leur niveau s'accumulent des anomalies chromosomiquesanomalies chromosomiques dont la cause n'est pas comprise. Ces résultats négatifs rendent très improbable le succès d'éventuelles tentatives de clonage humain, si elles étaient réalisées aujourd'hui (37). Cette analyse a été confortée à la fin du mois de novembre 2001 par la très médiatique annonce que la société américaine Advanced Cell Technology avait progressé dans la mise au point des techniques de clonage à visée thérapeutique. A y regarder de plus près (The Journal of Regenerative Medicine du 25 novembre, une publication en ligne sur InternetInternet), le transfert de noyaux de fibroblastesfibroblastes dans des ovocytes humains était toujours un échec alors que l'injection de cellules ovariennes du cumuluscumulus permettait, sur un total de 71 tentatives, d'aboutir deux fois à des embryons au stade quatre cellules et une fois à un embryon au stade 6 cellules. Dans tous les cas le développement de ces embryons était spontanément abortif en 24 heures ou moins. Quand on se rappelle que les cellules souches embryonnaires sont isolées d'un blastocyte, c'est-à-dire d'un stade du développement correspondant au 6-7ème jour après la fécondationfécondation, soit à plus de cent cellules, on réalise combien on est encore loin de l'obtention d'un embryon humain utilisable pour le clonage humain, qu'il soit thérapeutique ou reproductif.

    Cela signifie que des recherches menées au nom du « clonage thérapeutique » se focaliseraient en fait aujourd'hui exclusivement sur la méthode de création d'embryons humains clonés, et ne participeraient en aucun cas à l'avancée des connaissances nécessaires pour créer les conditions d'une utilisation possible des cellules souches embryonnaires en clinique. Une telle recherche n'a donc, à ce jour, rien de « thérapeutique », et ses résultats sont d'ailleurs nécessaires pour quiconque voudrait faire naître des bébés clonés aussi bien que pour les thérapeutes cellulaires qui rêveraient d'avoir à leur disposition des cellules ES immuno-compatibles. Cet aspect de la question apparaît évidemment crucial aujourd'hui alors que se multiplient les déclarations d'intention de réaliser un clonage reproductif humain. La secte des raéliens a fondé une société de biotechnologiebiotechnologie dédiée à ce projet, Clonaid. Un groupe d'éminents biologistes de la reproduction mené par l'Italien Severino Antinori a également annoncé qu'il était mandaté par deux cents couples stériles pour parvenir à la production de bébés clonés à partir de cellules des pères stériles. Le Dr Zavos, collaborateur américain d'Antinori, nous a fait miroiter pour le 25 décembre la perspective d'une nativité d'un nouveau genre, celle d'embryons humains clonés. Ces deux entreprises possèdent des atouts pour réussir. Les mécanismes sectaires, d'essence totalitaire, mettent en effet à la disposition des raéliens des centaines de jeunes femmes « volontaires » pour donner des ovules et prêter leur utérusutérus afin qu'y soient transférés les embryons clonés. Quant à Antinori et à ses collègues, ils disposent d'une solide expérience clinique en biologie de la reproduction. Le seul obstacle rencontré par ces candidats cloneurs est qu'ils sont en fait, selon toute vraisemblance, encore incapables de fabriquer à ce jour, nous l'avons vu, des embryons humains clonés normaux. Le jour où la technique aura été mise au point pour les besoins du clonage thérapeutique, l'obstacle sera levé, et il ne faudra pas attendre longtemps avant que l'on annonce la naissance d'enfants clonés.

    Une autre inquiétude a trait aux risques d'instrumentalisation supplémentaire du corps féminin auquel ne manquerait pas de conduire une large utilisation du clonage thérapeutique. En effet, les équipes publiques ou privées réalisant ces expériences devraient alors disposer d'une grande quantité d'ovules humains. La demande créant inéluctablement un marché, au moins en de nombreux pays, on imagine alors que des femmes dans le besoin seraient enrôlées en nombre pour constituer des cohortescohortes de donneuses d'ovules rémunérées. Elles accepteraient, par contrat, de se prêter à des stimulationsstimulations ovariennes répétées, accompagnées du contrôle sanitaire nécessaire à la vérification de la qualité des productrices et de leur production.