Les limites extrêmes de la vie ne cessent d'être repoussées. Une fois de plus, des organismes vivants ont été découverts là où on s'y attendait le moins.

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    Le 21 janvier 2001, un ballon-sonde du département Biosciences de l'Université de Cardiff (Royaume-Uni) réussissait à prélever des échantillons d'airair atmosphérique à différentes altitudes comprises entre 20 et 41 km. Capturés en environnement stérile, ces échantillons ont été ramenés au sol puis confiés à divers laboratoires indépendants.

    Un des buts de ces analyses, qui portaient notamment sur la détection de matièresmatières organiques, visait à déterminer jusqu'à quelle altitude la vie pouvait être présente dans des conditions qui avoisinent celles du milieu spatial (basse pressionpression, rayonnements). Avec, en ligne de mire, une vérification de la théorie de la panspermiepanspermie, qui suggère que la vie sur Terre aurait pu être apportée par des poussières interstellairespoussières interstellaires. Pour cela, l'air atmosphérique est filtré à travers un matériaumatériau microporeuxmicroporeux, puis ramené au sol dans un container stérile.

    Analysés par une équipe sous la direction du professeur ChandraChandra Wickramasinghe, les échantillons ont révélé la présence de matière organique "viable", formée de plusieurs espècesespèces différentes de bactéries. Toutefois, ces microorganismesmicroorganismes n'avaient pu être ranimés par les moyens mis à la disposition des chercheurs.

    Appel a été fait au Dr Milton Wainwright, du département de biologie moléculaire et biotechnologiebiotechnologie de l'Université de Sheffield. Celui-ci parvenait alors à identifier deux bactéries dans l'échantillon capturé à 41 km. Les organismes isolés se montraient très semblables à leur équivalent sur Terre, mais en présentant toutefois certaines différences. Elles ne font pas non plus partie des "contaminants" que l'on s'attendrait à trouver dans un laboratoire de biologie.

    Récemment, de nouvelles analyses ont été entreprises par le Dr Milton Wainwright, en collaboration avec Wickramasinghe, J.V. Narlikar (Inter-University Centre for Astronomy and Astrophysics, Inde), et P. Rajaratnam (Indian Space Research OrganisationIndian Space Research Organisation, Antariksh Bhavan, Inde).

    Prélevés sur les filtres au moyen d'un scalpel stérile, les échantillons, révélèrent, comme précédemment, des groupements de microorganismes formés de bâtonnets et de coques, celles-ci se montrant plus abondantes. Toutefois, les mises en cultures échouèrent à nouveau, alors qu'elles réussissent dans le cas des espèces terrestres habituelles.

    Les chercheurs ont alors entrepris une nouvelle mise en culture des échantillons en incubateur (30°C durant quatre jours avec agitation, puis trois jours au repos) cette fois sans les séparer des filtres. Et à la surprise des chercheurs des colonies apparurent et développèrent, formées d'agglomérats de bactéries en forme de bâtonnets et de coques identifiées comme appartenant aux espèces Bacillus simplexsimplex, et Staphylococcus pasteuri. Les analyses d'ARN ont indiqué 100% de similitude des premières par rapport à la variété terrestre connue, et 99,8% pour les secondes.

    Une nouvelle mise en culture prolongée permettait alors d'observer la mitose des Staphylococcus pasteuri. Les groupes ainsi formés se révèlent tous gram-négatifs et anaérobies (c'est-à-dire n'utilisant pas d'oxygène), et se distinguent de l'espèce terrestre par leur capacité à croître en présence de furazolidone (antibactérien, antiseptiqueantiseptique et antiprotozoaire). Les bâtonnets de Bacillus simplex ont, eux, formé de longues chaînes qui ont fini par engendrer des spores.

    Il est possible que le succès de cette culture ait été favorisé par un heureux hasard purement accidentel : le milieu de culture utilisé (agar) datait d'une quinzaine d'années, et comportait - comme cela a été constaté ultérieurement - de très légères traces d'oxydationoxydation. Celle-ci, bien que totalement stérilisée avant l'expérience, est entrée en contact avec les microorganismes et a pu contribuer à leur développement. Cette faculté a déjà été constatée par ailleurs.

    Se pose évidemment la question de l'incidenceincidence de cette matière vivante à la frontière de l'espacefrontière de l'espace. Les échantillons prélevés à 41 km contiennent 4,3 bactéries par litre d'air ramené à la pression du niveau de la mer. Par extrapolation, on arrive à une densité de 1,4x10-2 bactérie/litre à 41 km. La vitessevitesse de chute de ces organismes à cette altitude pouvant être estimée à 0,18 cm/seconde à cette altitude, on peut facilement calculer que la surface de la Terre reçoit quotidiennement 3 tonnes de bactéries, et cela en continu.

    Pour les défenseurs de la théorie de la panspermie, dont Wickramasinghe, la relative similitude entre les microorganismes découverts et leurs équivalents terrestres n'est pas un inconvénient, bien au contraire. Le fait que cette matière vivante ensemence en permanence notre planète contribue à maintenir cette ressemblance en forçant la vie à évoluer dans une direction précise.

    Reste à confirmer cette hypothèse. La voie royale dans ce sens semble être l'analyse d'échantillons cométaires. D'où l'importance à accorder à la mission RosettaRosetta, dont la sonde devrait être lancée ce mois de janvier 2003 par une fuséefusée Ariane 5Ariane 5, et qui devrait se poser sur le noyau de la comètecomète de Wirtannen en 2011 afin d'y effectuer de nombreuses analyses in situ. Mais aussi de StardustStardust, une sonde automatique qui a été lancée le 7 février 1999 par une fusée DeltaDelta 2 depuis Cap CanaveralCap Canaveral avec une mission extrêmement ambitieuse qui consiste à opérer un rendez-vous avec la comète Wild-2, y recueillir des échantillons de poussière et de gazgaz et les ramener sur Terre en 2006.