Les microARN, des petits bouts d’ARN non codants, sont capables de dégrader le matériel génétique des virus. Or, ce microARN est très déficient chez les personnes âgées ou souffrant de comorbidités. Cela expliquerait en grande partie pourquoi ces dernières sont surreprésentées dans les décès liés à la Covid-19.


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    Les microARN (miARN) sont des morceaux d'ARN non codants comprenant 21 à 25 nucléotides. Ces petits bouts d'ARN jouent un rôle important dans l'expression des gènes, en s'appariant avec de l'ARN messager (ARNm) pour inhiber ou modifier leur action. Ils sont par exemple impliqués dans la différenciation et l'apoptoseapoptose cellulaire, la lutte contre les tumeurstumeurs ou la production d'enzymesenzymes. Selon une nouvelle étude du Medical College de Georgia de l'université d'Augusta (États-Unis), la diminution de ces microARN avec le vieillissement ou les maladies chroniques expliquait en grande partie pourquoi certaines personnes âgées et souffrant de pathologiespathologies associées sont plus vulnérables au coronaviruscoronavirus de la Covid-19Covid-19.

    Plus de 800 microARN interagissent avec le SARS-CoV-2

    « Le microARN est en premier plan dans la lutte contre l'infection virale, en se liantliant et en coupant l'ARN, le matériel génétiquematériel génétique du virusvirus », explique Sadanand Fulzele, principal auteur de l'étude publiée dans la revue Aging and disease. Les chercheurs ont procédé au séquençageséquençage ARN de deux coronavirus, le SARS-CoVSARS-CoV à l'origine de l'épidémieépidémie de 2003, et le SARS-CoV-2SARS-CoV-2 à l'origine de la pandémiepandémie actuelle de la Covid-19, puis ont cherché quels microARN « s'emboîtent » sur cet ARN à l'aide d'une modélisationmodélisation informatique. Ils ont ainsi découvert 848 microARN ciblant le génome du SARS-CoV et 873 microARN ciblant le SARS-CoV-2, dont certains sont en commun. Ces microARN sont associés à plus de 72 processus biologiques différents allant de la production de moléculesmolécules à la régulation de la réponse immunitaireréponse immunitaire, rapporte l'étude. De précédentes études ont par exemple montré que le microARN dégrade le matériel ARN du virus, empêchant sa reproduction et sa capacité à produire des particules virales.

    L’appariement entre le microARN et l’ARN messager conduit à la diminution du niveau d’expression de l’ARNm ciblé par l’inhibition de sa traduction ou par sa dégradation. © médecine/sciences, Inserm, 2013
    L’appariement entre le microARN et l’ARN messager conduit à la diminution du niveau d’expression de l’ARNm ciblé par l’inhibition de sa traduction ou par sa dégradation. © médecine/sciences, Inserm, 2013

    Les personnes âgées déficientes en microARN

    Or, bon nombre de ces microARN sont diminués ou dérégulés chez les personnes âgées ou souffrant de pathologies sous-jacentes. « Le miRmiR-15b-5p, qui a une grande affinité avec l'ARN du SRASSRAS-CoV-2, est par exemple moins efficace dans les maladies coronariennes », explique Sadanand Fulzele. Le microARN serait donc un facteur clé pour expliquer la surmortalité au sein des populations les plus âgées, à en croire l'étude. En France, 84 % des décès de Covid-19 sont liés à des personnes ayant des comorbiditéscomorbidités et 93 % des morts sont âgés de plus de 65 ans, indiquent les données de Santé publique France. « Il serait également intéressant de savoir si les personnes jeunes et touchées par des formes graves sont déficientes en microARN », s'interroge Sadanand Fulzele.

    MicroARN : le nouveau traitement miracle ?

    Le microARN pourrait-il constituer une nouvelle piste de traitement ? Des cocktails de plusieurs microARN pourraient par exemple être administrés par voie nasale, suggèrent les chercheurs, qui travaillent déjà sur la production de microARN spécifique. Le microARN pourrait aussi renforcer l'action d'autres médicaments à l'étude, comme l'hydrochloroquine ou le remdesivir. Le problème est de cibler les bonnes séquences de microARN, car certains peuvent à l'inverse protéger le génome du virus contre l'action des cellules immunitaires. De précédentes études ont notamment montré que le miR122, exprimé dans le foiefoie, favorise la réplicationréplication de l'ARN des virus de l'hépatite Bhépatite B et C.

    Cette étude ouvre en tout cas un nouveau champ de recherche dans la lutte contre la Covid-19. Malheureusement, ce ne sont pas les pistes qui manquent, des centaines de traitements étant actuellement à l'étude : antivirauxantiviraux, anti-inflammatoiresanti-inflammatoires, immunomodulateursimmunomodulateurs, plasmaplasma, cocktails d’anticorps polyclonaux ou même vieux antipsychotiques ressortis des placardsplacards.