-
Ce superbe dossier en deux parties nous révèlera l'utilité des haies de nos campagnes, pratiquement disparues de nos jours, puis vous découvrirez quel est cet étrange oiseau de nos rivières "le cincle plongeur" .
-
Ce superbe dossier en deux parties nous révèlera l'utilité des haies de nos campagnes, pratiquement disparues de nos jours, puis vous découvrirez quel est cet étrange oiseau de nos rivières "le cincle plongeur" .
Dans les rivières libres et sauvages de notre pays vit l'un des oiseaux les plus étonnants de la gent animale : le cincle plongeur. A tout instant, l'imprudent défie les forces de la nature, plongeant dans les remous, affrontant les courants.
Dans l'eau limpide du torrent, le plastron blanc du merle d'eau dévale les rapides. Avec une agilité déconcertante, l'oiseau se joue du flot impétueux de la rivière. Ballotté dans les vagues, il flotte à la surface de l'eau, puis, soudain, plonge dans le lit du torrent, nage dans l'onde miroitante, remonte le courant et explore les galets à la recherche d'invertébrés. Adapté à la vie aquatique, le cincle est unique en son genre. C'est, en effet, le seul passereau plongeur et nageur d'Europe !
Nul besoin d'être ornithologue pour identifier le cincle ! Il ressemble à un petit merle (d'où son surnom de " merle d'eau " !) ou à un gros troglodyte. Il mesure environ 18 centimètres de longueur, pèse de 50 à 70 grammes et porte un habit chocolat avec un grand plastron blanc caractéristique.
Les ailes et la queue sont courtes, les pattes robustes, la silhouette trapue et le bec effilé. Autre détail important : les tics nerveux qui secouent l'oiseau en permanence (courbettes, mouvements de queue et battements de paupières). Pour rencontrer le cincle, il faut parcourir les cours d'eau rapides, explorer les cascades, les barrages et les chutes. Tout comme la truite, l'oiseau est l'hôte des eaux froides, riches en oxygène. Il est, de ce fait, plus commun en montagne. On l'observe ainsi posé sur un rocher ou rasant les flots d'un vol rapide et direct, un peu à la manière du martin pêcheur. Parfois, le cincle peuple également les rivières de plaine, si tant est qu'il y trouve gîte et nourriture en suffisance. En fait, il peut nicher à une altitude variable (de 100 à 2000 mètres), à condition toutefois que l'eau soit propre et limpide. L'espèce est bien représentée en France (Vosges, Jura, Alpes, massif-central, Pyrénées, Corse).
Le territoire de l'oiseau est linéaire. Il suit, en fait, la rivière sur 200 à 1000 mètres de long, selon les ressources alimentaires disponibles. Les individus sont toujours très solitaires, querelleurs aux abords des frontières. De ce fait, l'espèce n'est jamais abondante. Il faut attendre janvier pour la formation des couples. Février et mars sont ensuite plus propices aux manifestations amoureuses (révérences, poursuites...) qui se prolongent durant toute la période de nidification. Outre les danses saccadées des deux oiseaux en parade, ce qui surprend l'observateur, ce sont les chants, très puissants, curieusement émis par les deux adultes. Sans doute pour couvrir le tumulte du torrent ! Autre détail qui a son importance, car c'est un fait rare chez les oiseaux, le cincle chante presque toute l'année, à l'instar d'autres espèces très territoriales.
Le cincle aime son confort ! Il construit, en effet, un douillet nid sphérique, fait de mousses et de feuilles mortes, qu'il place dans une cavité surplombant la rivière (vieux mur, pilier de pont, rocher...). C'est en mars que s'effectue la construction. Les deux adultes y participent. À la fin de ce mois, la femelle pond, en moyenne, 5 œufs blancs, qu'elle couve 15 à 18 jours. Les oisillons restent ensuite environ 20 jours au nid, nourris par les deux parents. Puis ils prennent leur envol, si l'on peut dire, car ces oiseaux aquatiques nagent et plongent avant même de savoir voler ! Ils restent 4 ou 5 semaines sur le territoire des adultes. Une seconde nichée est de règle chez l'espèce qui reste, d'ordinaire, très fidèle au site de nidification.
Certaines espèces animales vivent dans des habitats encore préservés, sains, sauvages et naturels. C'est le cas du cincle, qui ne peut subsister que dans les rivières propres et riches en invertébrés aquatiques. Il constitue, de ce fait, un indicateur biologique (ou bio-indicateur !) de la qualité du milieu.
En montagne, l'homme a généralement peu d'emprise sur la nature, du fait du relief accidenté de ces secteurs. Neige, pluie, ruisseaux et torrents apportent donc aux rivières une eau pure et limpide, propice à la survie du cincle et de la truite. Plus bas dans les vallées, les choses se compliquent. Usines hydroélectriques, pollutions industrielles, eaux usées des villages, parfois même recalibrages, curages et rectification des berges et des rivières détériorent l'habitat du cincle, privant du même coup de multiples autres espèces animales d'un milieu de vie indispensable.
Avec le cincle, c'est alors tout le cortège de la petite faune des eaux vives qui disparaît. La nature n'y trouve plus son compte, le naturaliste non plus, le pêcheur encore moins, sans parler du consommateur que nous sommes tous. Alors protégeons le cincle et nos rivières, et offrons un monde beau et riche de biodiversité à nos enfants !