Alors que, depuis les années 1970, les scientifiques pensaient que la taille du cerveau des mammifères avait grandi au même rythme que leur corps, une nouvelle étude sur des crânes de fossiles montre que leur évolution s’est faite de manière distincte.


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    La connaissance du développement le cerveaucerveau dans le passé est encore mal comprise. Après l'extinction des dinosaures causée par l'incroyable collision d'une comète géante avec la Terre il y a 65 millions d'années, des niches écologiques ont été libérées et ont permis aux animaux plus petits de les occuper et de pouvoir rayonner : au fil du temps, le manque de pressionpression prédatrice a favorisé l'expansion et le développement des mammifères, dont certains sont devenus des géants.

    Les scientifiques avaient donc admis l'idée que le cerveau des mammifères avait grandi à mesure que leurs corps grossissaient, mais les crânescrânes fossiles datant de l'époque suivant l'extinction des dinosaures étaient très rares ; cette hypothèse était difficile à tester. Une nouvelle étude publiée dans Science suggère plutôt que la taille du cerveau s'est développée après la croissance du corps, et non en même temps. 

    Une nouvelle étude avec de récents fossiles

    Ornella Bertrand, paléo-neurologue à l'Université d'Edimbourg et co-auteure de cette étude, et ses collègues à l'origine de cette découverte, ont cherché à mesurer l'évolution du cerveau en comparant la taille des cerveaux des animaux avec leur taille corporelle estimée à l'aide de leurs os et de leurs dents. Pour ce faire, ils ont analysé un ensemble de 34 crânes de mammifères appartenant au Paléocène (de 65 à 55 millions d'années) dont certains ont récemment été découverts dans le bassin de San Juan, au Nouveau-Mexique (États-Unis), et dans le bassin de Denver, au Colorado. Les crânes ont été reconstruits numériquement en 3D grâce à la tomographietomographie à haute résolutionrésolution. Les images 3D (ou endocasts 3D) obtenus des crânes fossiles étaient suffisamment détaillées pour mesurer les régions sensorielles du cerveau comme le néocortexnéocortex (lié à l'intelligenceintelligence) et les bulbes olfactifs (liés à l'odoratodorat).

    La tomographie est une technique qui permet de reconstruire le volume d’un objet (le crâne ici) à partir d’une série de mesures effectuées depuis l’extérieur de cet objet. © Ornella Bertrand et <em>al.</em>, 2022
    La tomographie est une technique qui permet de reconstruire le volume d’un objet (le crâne ici) à partir d’une série de mesures effectuées depuis l’extérieur de cet objet. © Ornella Bertrand et al., 2022

    Après ces analyses, l'équipe de chercheurs a constaté que la taille corporelle des mammifères a augmenté en premier -- après que la disparition des dinosaures leur a fait de la place -- et que le cerveau n'a commencé à grossir qu'environ 10 millions d'années plus tard. Ces résultats démontrent donc que l'évolution de la taille du corps et du cerveau se sont développés comme deux entités distinctes, et l'explication est actuellement toujours en débat.

    Les hypothèses de cette découverte

    Parmi les hypothèses émises, Stephen Brusatte, paléontologuepaléontologue à l'Université d'Édimbourg et dirigeant la nouvelle étude, pense que les mammifères se sont juste concentrés sur la manière de devenir le plus gros possible après l'extinction des dinosaures, car ils n'avaient plus la pression des prédateurs et parce qu'il y avait plus de nourriture. Avec cette théorie, les cerveaux n'ont évolué que lorsque ça a été nécessaire pour les mammifères, c'est-à-dire lorsque la concurrence pour la nourriture est devenue difficile et qu'il a fallu devenir plus intelligent pour survivre.

    Des crânes fossiles de mammifères comme celui-ci (carnivore <em>Claenodon ferox</em>) ont été scannés pour comparer l'évolution du cerveau et de la taille. Cette dernière a été estimée à l’aide de leurs os et de leurs dents. © Thomas Williamson
    Des crânes fossiles de mammifères comme celui-ci (carnivore Claenodon ferox) ont été scannés pour comparer l'évolution du cerveau et de la taille. Cette dernière a été estimée à l’aide de leurs os et de leurs dents. © Thomas Williamson

    Suzana Herculano-Houzel, neuro-anatomiste à l'Université Vanderbilt qui n'a pas participé à la recherche, propose une autre hypothèse, à savoir que le manque de prédation et la nourriture en abondance après l'extinction des dinosaures a été une combinaison favorable au développement du cerveau des petits mammifères. Dès lors qu'ils sont devenus assez gros, les mammifères ont pu utiliser l'énergieénergie acquise par leur nourriture pour développer leur cerveau et le faire mieux fonctionner.

    Nous avons encore beaucoup à étudier et à apprendre avant de pouvoir mettre en avant une théorie plutôt qu'une autre. L'équipe de chercheurs continue son étude et s'intéresse aux structures du crâne et au développement des différentes aires, comme l'oreille interneoreille interne qui est un bon indicateur de l'agilité et de l'audition.

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