Des expériences sur la physique des hautes pressions ont démontré qu'un minéral à base de fer dans certaines roches pouvait rester aimanté à des températures où ce n'est plus possible sous la pression de l'atmosphère. Contrairement à ce que l'on pensait, une partie du manteau pourrait être magnétisée, ce qui change notre compréhension au moins des archives magnétiques de la Terre mais aussi de l'évolution et des caractéristiques de son champ magnétique.


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    On peut dire que l'étude scientifique du magnétismemagnétisme des roches et de la Terre a commencé avec la publication du « De Magnete » de William Gilbert, en 1600. Ce médecin et physicienphysicien britannique avait alors émis l'hypothèse que la Terre était un gigantesque aimantaimant analogue à ceux connus depuis les Grecs, avec les roches se trouvant dans la région de la ville de Magnésie. Cette hypothèse était très raisonnable mais il fallut l'abandonner quand on a découvert, tout à la fois, que la température augmentait selon un gradientgradient mesurable en s'enfonçant dans les mines, et la disparition de l'aimantationaimantation au-dessus d'une température de plusieurs centaines de degrés pour les aimants.

    La solution de l'énigme fut trouvée durant la première moitié du XXe siècle, essentiellement avec la découverte, puis le développement de la théorie de la dynamodynamo auto-excitatrice décrivant ce qui se passe dans la partie liquideliquide du noyau de la Terrenoyau de la Terre, un alliagealliage de |1411711e3bd7737df8c84e601aba0664|-nickelnickel liquide, convectif, turbulent, et dans un référentiel en rotation dont la physiquephysique s'explore aujourd'hui en laboratoire avec notamment l'expérience VKS.

    Au cours de la seconde moitié du XXe siècle, l'étude fine du magnétisme de la Planète -- et notamment de son paléomagnétisme enregistré dans différentes types de roches, mais essentiellement des roches ignéesroches ignées -- a eu une grande importance puisque qu'elle a mené à la théorie de la tectonique des plaques. Le paléomagnétisme a été utilisé pour retracer ces mouvementsmouvements anciens mais aussi pour dresser une chronologie des fameuses inversions magnétiques des pôles et de leurs migrations.


    Pour recréer les conditions régnant dans le manteau terrestre en laboratoire, de très petits morceaux d'oxyde fer magnétique peuvent été placés entre les pointes de deux diamants. Les diamants ont été pressés l’un contre l’autre, afin de produire des pressions atteignant 90 GPa. Un faisceau laser infrarouge peut alors chauffer l’échantillon jusqu’à 1.000 °C. Traduction en français en cliquant sur le rectangle blanc en bas à droite, puis sur l'écrou, ensuite sur « Sous-titres » et « Traduire automatiquement ». © Carnegie Science

    Toutefois, des travaux récents publiés dans le journal Nature et menés par une équipe internationale réunissant des physiciens allemands, français, danois et états-uniens, spécialistes en géosciences, viennent de redonner un peu de crédibilité à l'hypothèse de Gilbert sans rien invalider de l'explication donnée avec la géodynamo.

    Des roches aimantées riches en hématite dans le manteau ?

    Déjà en surface, comme dans le cas d'autres planètes rocheusesplanètes rocheuses, on sait que la croûtecroûte froide contient des roches aimantées qui contribuent par leurs magnétismes rémanents, acquis notamment lorsque les laves océaniques se refroidissent, au champ magnétiquechamp magnétique total de la Terre. Mais, selon les chercheurs, il pourrait exister des régions du manteau à des températures relativement élevées où les conditions de pressionspressions permettraient à une roche, contenant un oxyde de fer bien particulier, de rester aimantée, contrairement à ce qui se passerait en surface à la même température.

    Le minéralminéral magnétique de cette roche est bien connu des géologuesgéologues, c'est l'hématitehématite, l'un des polymorphes de l'oxyde de fer (III) de formule Fe2O3, avec des traces de titanetitane, d'aluminiumaluminium, de manganèsemanganèse et d'eau. Les chercheurs ont étudié son comportement dans le cadre des expériences de physique des hautes pressions dans lesquelles des échantillons micrométriques d'hématite dans une cellule dite enclume de diamantdiamant sont portés à des pressions pouvant atteindre 90 gigapascals et sont chauffés à l'aide de laserslasers à des températures jusqu'à 1.000 °C. L'état magnétique de ces échantillons pouvait être mesuré grâce à la méthode de spectroscopie Mössbauer au moyen du rayonnement disponible au synchrotron de l'ESRFESRF, à Grenoble.

    Il s'est avéré que l'hématite pouvait restée magnétique jusqu'à une température d'environ 925 °C et à des pressions qui peuvent être replacées dans un contexte géologique. En effet, les géologues pensent que de l'hématite existe dans des plaques océaniques en cours de subductionsubduction dans le manteau de la Terre, notamment sous la partie occidentale de l'océan Pacifique, et est restée en conséquence aimantée à une profondeur d'environ 440 à 660 km correspondant à la fameuse zone de transition minéralogique du manteau -- le manteau terrestremanteau terrestre, s'étendant de 35 à 2.900 kilomètres sous la surface de la Terre.

    Cela peut changer la donne en ce qui concerne l'évolution actuelle du champ magnétique terrestrechamp magnétique terrestre mais aussi le décryptage de son passé car on peut maintenant penser que les champs magnétiques mesurés sont la somme de celui produit par le noyau de la Terre avec ceux de régions se comportant comme des aimants au sens de Gilbert dans le manteau.