Face à la surpêche qui menace les stocks de poissons, l’aquaculture semble promise à un bel avenir mais l'impact sur le littoral et sur les eaux côtières pose problème. Pour s’en affranchir, un nouveau concept de ferme aquacole a été développé : l’Aquapod, sorte de cage sphérique à poissons, exploitable en haute mer. Mangerons-nous bientôt plus de poissons grâce à lui ?

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    Les 34 Aquapod actuellement déployés peuvent être observés à Puerto Rico, en Indonésie, à Panama, en Floride et à Hawaï. © Ocean Farm Technologies

    Les 34 Aquapod actuellement déployés peuvent être observés à Puerto Rico, en Indonésie, à Panama, en Floride et à Hawaï. © Ocean Farm Technologies

    Le poisson, un aliment riche en protéinesprotéines, est régulièrement consommé par des centaines de millions de personnes dans le monde. Malheureusement, les stocks de cette ressource alimentaire tendraient à diminuer d'année en année et pourraient à terme manquer pour de nombreuses populations. La surpêche est bien évidemment en cause. L'une des solutions envisagées consiste à élever les poissons. À ce jour, seuls 2,8 % des organismes marins consommés seraient produits en aquaculture.  

    Le développement de cette filière présente de nombreux avantages, mais aussi des inconvénients logistiques et environnementaux. Les fermes aquacoles actuelles ont besoin d'eaux calmes, car les vagues et les courants forts les fragilisent, et doivent idéalement se situer à proximité du littoral, donc dans des eaux peu profondes. Cette situation est problématique. Les excès de médicaments et de nourriture fournis aux poissons participeraient activement à la pollution des eaux côtières. Par ailleurs, les cas d'animaux exotiquesexotiques, malades ou blessés ayant réussi à s'échapper ne sont pas rares. Or, ils peuvent entrer en compétition avec la faune locale ou transmettre leurs pathologiespathologies.

    L'entreprise Ocean Farm Technologies, créée par des biologistes marins en 2005, prétend détenir une solution : l'Aquapod. Cette cage à poissons sphérique peut être emportée en haute mer, puis être fixée sur des sites profonds voire dériver au gré des courants, tout en nécessitant peu d'interventions humaines. Ce système novateur permettrait une importante production de poissons sains, d'une manière durable et non polluante.

    Les Aquapod sont faciles et rapides à assembler. Ils peuvent être lancés depuis un port ou tout simplement au départ d'une plage. © Ocean Farm Technologies

    Les Aquapod sont faciles et rapides à assembler. Ils peuvent être lancés depuis un port ou tout simplement au départ d'une plage. © Ocean Farm Technologies 

    L’Aquapod, une alliance entre métal et plastique

    Les cages se composent d'un grand nombre de cadres triangulaires en acier galvaniséacier galvanisé. Leur assemblage permet d'obtenir des sphères mesurant à 8 à 28 m de diamètre (contenance de 115 à 11.000 m3)). Le traitement du métalmétal réduit la fixation d'organismes marins benthiquesbenthiques, limitant ainsi l'utilisation de peintures antifouling particulièrement polluantes.

    Chaque triangle est constitué d'un cadre renfermant un filet en polyéthylènepolyéthylène, fabriqué à 80 % à partir de produits recyclés, recouvert d'un treillistreillis métallique. Cette double protection évite les fuites de poissons et les attaques de prédateurs. Certains panneaux sont adaptables afin de recevoir, entre autres, un système d'alimentation automatique ou une trappe d'accès.

    Les cages sont utilisables en surface ou en profondeur, aussi bien sur le littoral qu'au large. Les triangles pèsent entre 40 et 50 kgkg à l'airair, mais leur poids s'annule une fois dans l'eau. Ces sphères peuvent être immergées avec facilité, permettant de les soustraire à l'action des vagues, par exemple en cas de tempête, ou de les protéger de tout risque de collision avec des engins flottants tels que des navires.

    Certains aspects techniques seront appréciés par les professionnels de la filière aquacole. Plus besoin de plonger parfois profondément pour aller nettoyer les cages ou les filets. Il suffit en effet de se mettre sur l’Aquapod en surface et de le faire tourner sur lui-même. Même si, en revanche, il est plus facile de manipuler des gros éléments sous l'eau. © Ocean Farm Technologies

    Certains aspects techniques seront appréciés par les professionnels de la filière aquacole. Plus besoin de plonger parfois profondément pour aller nettoyer les cages ou les filets. Il suffit en effet de se mettre sur l’Aquapod en surface et de le faire tourner sur lui-même. Même si, en revanche, il est plus facile de manipuler des gros éléments sous l'eau. © Ocean Farm Technologies

    Des cages à poissons fixées ou dérivantes

    Plusieurs projets ont vu le jour pour tester les possibilités d'exploitation de ces sphères. Les 34 Aquapod actuellement immergés dans le monde sont principalement ancrés, au moyen de longs câbles, dans des eaux profondes (parfois entre 200 et 300 m). Ils sont donc fixes, comme les fermes aquacoles conventionnelles, mais leur impact sur l'environnement est réduit du fait de la plus grande profondeur. Les courants marins peuvent en effet emporter et diluer les déchetsdéchets organiques avant qu'ils ne parviennent sur le fond, diminuant ainsi les risques de pollution. L'eau des cages est également plus facilement remplacée.

    Afin de faciliter la manœuvrabilité et le transport des sphères, Cliff Goudey du MIT OffshoreOffshore Aquaculture Engineering Center (OAEC) les a équipées de moteurs électriques, reliés à un générateurgénérateur en surface. Ces engins n'ont pas besoin d'être puissants. Le chercheur les destine simplement au repositionnement des Aquapod dans des masses d'eau les... transportant vers leurs sites de fixation.

    En effet, de telles sphères pourraient un jour être lancées à la dérive au sein de courants marins circulaires, par exemple dans des eddies (des tourbillonstourbillons géants pouvant atteindre 100 à 200 km de diamètre). Un test grandeur nature a été réalisé à Hawaï en 2011 dans le cadre du projet Velella. Un Aquapod de 8,7 m de diamètre contenant 2.000 poissons a été tiré au large par une goélette puis laissé à la dérive durant plusieurs mois. La cage a alors librement évolué entre 3 et 75 milles marins des côtes (5 à 140 km) en réalisant des cercles. Elle revenait donc régulièrement à son point de départpoint de départ. Selon les chercheurs, la croissance des poissons, des Seriola rivoliana, a été plus importante que celle observée dans une ferme conventionnelle.

    Les futures fermes aquacoles pourraient ainsi dériver dans les océans, au sein des eaux naturellement fréquentées par les poissons produits, là où l'espace ne risque pas de manquer et où la pollution est moindre... Ce type de projet pourrait permettre de produire de plus grandes quantités de poissons de qualité sans pour autant dégrader notre environnement.