Il y a 30 ans, le 24 janvier 1986, la mission Voyager 2 survolait Uranus, une visite qui n'a depuis jamais été rééditée. De nombreuses questions restent en suspens justifiant une nouvelle visite à cette géante glacée entourée d’anneaux et de 27 satellites, plus proche de nous que son homologue Neptune.

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    Après un lancement en 1977 et le survolsurvol de JupiterJupiter puis SaturneSaturne, la sonde Voyager 2Voyager 2 s'approchait à 81.000 km d'Uranus, révélant un système planétaire inattendu : un système complexe d'anneaux et de 27 satellites - les plus grands sont ObéronObéron, TitaniaTitania, UmbrielUmbriel, ArielAriel, MirandaMiranda -, une rotation rapide en 17,24 heures, une chimie et une dynamique atmosphérique inédites, une source d'énergie interne nulle ou presque, et un environnement magnétique unique dans notre Système solaire.

    On s'attendait bien à ce que la septième planète dévoile quelques surprises. Avec un axe de rotation pointant alors vers notre étoile - résultat probable d'une antique collision d'ampleur avec un impacteur géant -, son atmosphèreatmosphère est soumise à une insolationinsolation extrême, avec un hémisphère éclairé en permanence, tandis que ses satellites gravitaient dans un plan perpendiculaire à l'écliptiqueécliptique. Mais avec, en sus, un axe magnétique incliné de 60° (un record dans le Système solaire !), cette magnétosphèremagnétosphère asymétriqueasymétrique devenait dès sa découverte un cas extrême dans le club très fermé des planètes magnétisées.

    Depuis, l'intérêt pour cet intrigant système planétaire ne s'est jamais démenti. En témoigne un atelier international organisé au centre international d'ateliers scientifiques de l'Observatoire de Paris à Meudon fin 2013 au titre évocateur : « UranusUranus beyond Voyager 2 : from recent advances to future missions » (Uranus après Voyager 2 : des avancées récentes aux futures missions) accompagné d'une conférence grand public au CNRS Bellevue par deux chercheurs du Lesia (Laboratoire d'études spatiales et d'instrumentation en astrophysiqueastrophysique).

    La lune glacée Miranda (480 km de diamètre), un des 27 satellites naturels d’Uranus, photographiée par Voyager 2 le 24 janvier 1986. © Nasa, JPL-Caltech

    La lune glacée Miranda (480 km de diamètre), un des 27 satellites naturels d’Uranus, photographiée par Voyager 2 le 24 janvier 1986. © Nasa, JPL-Caltech

    Quelle sera la prochaine mission d’exploration d’Uranus ?

    C'est que, depuis la moisson de données pionnières de Voyager 2, de nombreuses questions restent en suspens. Certes les observations régulières de télescopestélescopes terrestres permettent d'étudier son activité nuageuse et son système d'anneaux, mais la gamme spectrale observable et la sensibilité atteignable depuis l'orbiteorbite terrestre (à plus de 2,7 milliards de km) n'égalent pas celles de mesures locales, dont certaines ne peuvent être réalisées qu'in situ, comme la mesure de particules ou de champ magnétiquechamp magnétique.

    Et après les nombreuses missions spatiales qui ont permis l'exploration de Jupiter (GalileoGalileo, Juno en fin de cette année, et plus tard Juice), Saturne (Cassini-Huyghens), MercureMercure (MessengerMessenger et bientôt BepiColombo) et même de comètescomètes (Rosetta-Philae) et des planètes nainesplanètes naines CérèsCérès et PlutonPluton-|a52c5a59bb03a059b38145f1ffae33ec| (DawnDawn, New Horizons), Uranus est la prochaine étape-clef de l'exploration du Système solaire. Elle forme en effet avec NeptuneNeptune la catégorie des planètes géantesplanètes géantes glacées (moins massives que les géantes gazeusesgéantes gazeuses avec un cœur de roches et de glaces), mais elle est située deux fois moins loin, ce qui la rend donc plus accessible.

    Depuis quelques années déjà, plusieurs scénarios sont à l'étude. Côté NasaNasa, une telle expédition a été classée comme prioritaire dans plusieurs rapports récents, tandis qu'une équipe de définition scientifique d'une telle mission est actuellement en cours de constitution. Côté Esa, le projet Uranus Pathfinder - avec un soutien important de la communauté française - a été soumis aux récents appels d'offres de l'agence spatiale européenneagence spatiale européenne et reçu une excellente évaluation scientifique, bien que jusqu'à présent non sélectionnée.

    L'enjeu technologique est de taille, la dimension des panneaux solaires nécessaires pour alimenter une sonde à 19 fois la distance Terre-SoleilSoleil (environ un terrain de football) rend cette option caduquecaduque et nécessite un générateurgénérateur nucléaire, que l'Esa n'a pas encore mis au point. Deuxième enjeu de taille, la duréedurée de la phase de croisière : 15 ans au bas mot, passés pour la plupart en hibernation, soit plus long encore que pour la mission RosettaRosetta. En 2011, le projet identifiait une arrivée possible en... 2037 !

    Les anneaux délicats d’Uranus photographiés par Voyager 2 le 23 janvier 1986 à quelque 1,1 million de km. © Nasa, JPL-Caltech

    Les anneaux délicats d’Uranus photographiés par Voyager 2 le 23 janvier 1986 à quelque 1,1 million de km. © Nasa, JPL-Caltech

    Numérisées, les données de Voyager sont réexaminées

    Pour ce type d'exploration à longue échéance, il est particulièrement important de la sélectionner dès que possible, et d'anticiper sa préparation. À ce titre, on peut noter le choix du Cnes de démarrer en 2016 une première étude d'une mission exploratoire de l'environnement uranien.

    En attendant, la période est propice à la réanalyse des observations Voyager à la lueur de notre compréhension actuelle des systèmes planétaires. Le groupe magnétosphères du Lesia a démarré cet été un travail de réhabilitation des jeux de données à haute résolutionrésolution de l'instrument PRA (Planetary Radio Astronomy), précédemment conservés sur bandes magnétiquesbandes magnétiques et désormais archivées au Cnes sous forme numériquenumérique.

    En parallèle, le même groupe avait redétecté les aurores d’Uranus avec le télescope spatial Hubbletélescope spatial Hubble en 2011, en les observant lors d'une période de forte activité solaire. Les résultats obtenus témoignent d'une richesse de processus magnétosphériques variant avec les saisonssaisons planétaires, une motivation de plus pour retourner explorer Uranus au plus tôt.