Une météorite martienne remet en question le modèle de formation des planètes rocheuses de notre Système solaire.


au sommaire


    L'étude des météorites retrouvées sur Terre permet de mieux comprendre la formation de notre Planète et de ses sœurs Mercure, Vénus et Mars. Véritables reliques de l'origine du Système solaire, les météorites aident les scientifiques à définir notamment la composition originelle des planètes rocheusesplanètes rocheuses et en particulier la nature et l’origine des éléments volatils qui entrent dans la composition des roches et qui ont participé à la formation de notre atmosphèreatmosphère.

    Formation des planètes rocheuses : nébuleuse ou chondrites ?

    Actuellement, l'hypothèse en vigueur concernant la formation des planètes rocheuses suggère que ces éléments volatils ont été précocement ponctionnés dans la nébuleuse solaire par les jeunes planètes en formation. À ce stade, la Terre mais les autres planètes rocheuses également n'étaient que des boules de roche en fusion. Les éléments volatils, comme l'hydrogène, le carbonecarbone, l'oxygèneoxygène, l'azoteazote et de nombreux gazgaz rares, ont ainsi été absorbés, se dissolvant au sein de l'océan de magmamagma occupant leur surface. Puis, par le biais du volcanismevolcanisme intensif qui a suivi, ces gaz sont venus former une atmosphère. Les jeunes planètes ont ensuite subi un long et intense bombardement par des météorites que l'on appelle « chondriteschondrites », qui, elles aussi, ont participé à l'apport d'éléments volatils. L'idée est d'ailleurs que ce soient les éléments volatils des météorites qui aient le plus participé à la formation de l'atmosphère, terrestre tout du moins.

    Le modèle actuel veut que les éléments volatils composant l'intérieur de la Terre proviennent de la nébuleuse solaire et que ceux composant l'atmosphère viennent majoritairement des météorites. © Ron Miller, International Space Art Work
    Le modèle actuel veut que les éléments volatils composant l'intérieur de la Terre proviennent de la nébuleuse solaire et que ceux composant l'atmosphère viennent majoritairement des météorites. © Ron Miller, International Space Art Work

    Il résulte de cette hypothèse que la composition de la nébuleuse solaire primitive, ou celle du mélange nébuleuse-météorite, serait principalement à rechercher au niveau des couches les plus internes de la Terre. Les parties profondes du manteau sont en effet plus susceptibles d’avoir préservé cette signature chimique que les couches plus superficielles, soumises depuis des milliards d'années à un intense processus de fusion et de dégazagedégazage. Une nouvelle étude vient cependant perturber ce schéma de pensée.

    Une météorite témoignant de la composition interne de Mars

    Les météorites tombées sur Terre peuvent provenir de nombreuses sources, et notamment de la surface des autres planètes rocheuses du Système solaire. Les puissants impacts qui ont touché les différentes planètes au début de leur vie ont en effet projeté des fragments planétaires dans l'espace, qui viennent encore régulièrement percuter les planètes voisines. C'est ainsi que l'on a retrouvé des fragments de roches martiennes sur Terre. L'une de ces météorites a cependant une valeur particulière pour les scientifiques, puisqu'elle proviendrait non pas de la surface, mais de l'intérieur de Mars, un fait extrêmement rare. Il s'agit de la météorite de Chassigny, découverte en France en 1815.    

    Météorite de Chassigny, fragment de l'intérieur de Mars. © Ariel Provost, Wikimedia Commons, CC by-sa 4.0
    Météorite de Chassigny, fragment de l'intérieur de Mars. © Ariel Provost, Wikimedia Commons, CC by-sa 4.0

    Une équipe de chercheurs s'est penchée sur la composition de cette météorite et notamment sur l'origine de ses éléments volatils. L'analyse des rapports isotopiques du kryptonkrypton permet habituellement de différencier l'origine solaire ou chondritique des éléments volatils. Et les résultats de l'étude de la météorite de Chassigny sont pour le moins surprenants.

    En effet, l'analyse isotopique montre que les éléments volatils qu'elle contient ne proviendraient pas d'une assimilation de composants de la nébuleuse solaire comme on le pensait, mais proviendraient d'une intégration de matériel chondritique. Cela implique que les chondrites auraient participé bien plus tôt que ce que l'on pensait à l'apport de matériel volatil, soit au moment de la formation de la planète à partir de la nébuleuse solaire.

    Il se pourrait même que la situation soit totalement inversée, la composition interne de la planète étant associée aux chondrites, et celle de l'atmosphère à la nébuleuse solaire.

    L’atmosphère de Mars se serait formée très rapidement

    L’article, qui vient de paraître dans la revue Science, suggère en tout cas que l'atmosphère de Mars n'a pas pu se former uniquement par le dégazage du manteaumanteau, qui aurait alors dû avoir une composition chondritique. Il est possible que la planète ait acquis son atmosphère très tôt, par intégration des éléments de la nébuleuse solaire, et cela avant que l'océan de magma ne refroidisse. Il faut noter que Mars s'est solidifiée très rapidement, en seulement 4 millions d'années, même si cette durée est discutée, contrairement à la Terre qui a mis entre 50 et 100 millions d'années à se refroidir.

    Mars aurait acquis une atmosphère très tôt à partir de la nébuleuse solaire, avant que son océan de magma ne soit solidifié. © magann, Adobe Stock
    Mars aurait acquis une atmosphère très tôt à partir de la nébuleuse solaire, avant que son océan de magma ne soit solidifié. © magann, Adobe Stock

    Ces nouveaux résultats suggèrent que Mars aurait terminé sa croissance avant que la nébuleuse solaire ne se dissipe sous l'effet des radiations du jeune SoleilSoleil.