Au cœur des ténèbres intersidérales, une équipe d’astrophysiciens a fait la découverte inédite d’une exoplanète solitaire. La première du genre par imagerie directe. Appelée PSO J318.5-22, elle se présente également comme l’objet céleste en déshérence de la plus faible masse connue.

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    Une grande majorité des exoplanètes connues à ce jour (bientôt 1.000 découvertes) ont été détectées par vitesse radiale en mesurant le mouvement de leur étoile hôte. La principale alternative, la méthode dite par transit, employée notamment par le satellite Kepler, a permis d'en révéler plusieurs centaines sur un total de 3.588 candidates, alors qu'elles passaient devant leur étoile.

    Débusquer puis photographier une exoplanète directement est encore très rare, puisque leurs masse et luminositéluminosité sont très inférieures à celle de leur SoleilSoleil. C'est pourquoi identifier une planète, même géante, flottant librement dans l'espace et loin de toute étoile-parent relève encore de l'exploit ! C'est ni plus ni moins chercher une aiguille dans une botte de foin... Toutefois, conscient du défi, Eugène Magnier, professeur à l'Institut d'astronomie de l'université d'Hawaï et coauteur de l'étude publiée dans la revue The Astrophysical Journal Letters, explique qu'il a décidé de « chercher dans la plus grande meule de foin qui existe en astronomie, la base de donnéesbase de données de PS1 [acronyme de Pan-Starrs 1, NDLRNDLR] ».

    Il s'agit d'une grande campagne de sondage du ciel, effectuée avec le télescopetélescope Pan-Starrs 1 (Panoramic Survey Telescope And Rapid Response System) en quête d'étoiles relativement froides de type naine brune. Bien que très discrètes, elles sont très nombreuses dans la galaxie. Depuis le sommet du Mauna Kea (Hawaï), les caméras grand champ installées sur le télescope produisent chaque nuit l'équivalent de 60.000 photos numériquesnumériques. Actuellement, plus de 4.000 téraoctets de données ont été cumulées ! Pas de quoi infléchir la détermination de l'équipe d'astronomesastronomes. Surtout que l'objet PSO J318.5-22 s'est distingué du lot par sa luminosité et sa masse très faibles, bien en-deçà des valeurs attribuées aux naines brunesnaines brunes communes.

    Âgée de seulement 12 millions d'années, PSO J318.5-22 erre seule dans la constellation du Capricorne. Elle est 100 milliards de fois moins brillante que Vénus. © <em>N. Metcalfe &amp; Pan-Starrs 1 Science Consortium</em>

    Âgée de seulement 12 millions d'années, PSO J318.5-22 erre seule dans la constellation du Capricorne. Elle est 100 milliards de fois moins brillante que Vénus. © N. Metcalfe & Pan-Starrs 1 Science Consortium

    L’exoplanète PSO J318.5-22 trop écarlate pour une naine brune

    Même si la frontière entre les genres planète et étoile est de plus en plus ténue, PSO J318.5-22, qui affiche une masse 6,5 fois supérieure à celle de JupiterJupiter, est une exoplanète confirmée, trahie parce qu'elle rougit trop sur la photo. En effet, les observations réalisées dans le proche infrarougeinfrarouge avec les télescopes Gemini North et l'IRTF (Infrared Telescope Facility) de la NasaNasa, tous deux installés au sommet du Mauna Kea, montrent des paramètres caractéristiques d'une jeune planète gazeuse. Avec une température évaluée à environ 800 °C (1.073 K), PSO J318.5-22 serait âgée de seulement 12 millions d'années, soit beaucoup plus jeune que les planètes de notre système solairesystème solaire qui comptent en moyenne 4,5 milliards d'années. Un monde encore frais, tout juste sorti du ventre chaud d'un nuagenuage de gazgaz et de poussières, matrice d'étoiles...

    « Je me suis souvent demandé si de tels objets solitaires pouvaient exister », confie le professeur Michael Li (université d'Hawaï) qui a dirigé l'équipe, ajoutant qu'« à présent nous savons que oui. Elle a toutes les caractéristiques des jeunes planètes trouvées autour d'autres étoiles, mais elle dérive [dans l'espace] toute seule ». Suivie régulièrement durant deux années par le télescope Canada-France-Hawaï (CFHT), il apparaît que PSO J318.5-22, éloignée de seulement 80 années-lumièreannées-lumière de la Terre, appartient au jeune groupe d'étoiles dominé par Bêta Pictoris. Du même âge et de même distance, cette dernière s'est fait connaître, entre autres, pour l'exoplanète géante qui gravite autour parmi les nuées de poussières, et elle a été imagée par le Very Large TelescopeVery Large Telescope (VLT) en 2008. Moins lumineuse encore que sa consœur, la planète erranteplanète errante PSO J318.5-22 s'est vraisemblablement formée dans des conditions très différentes.