Une récente étude espagnole a évalué les croyances et les attitudes d'un échantillon de participants à propos des causes du cancer. Parmi eux, des individus vaccinés et non-vaccinées contre le SARS-CoV-2, préférant la médecine conventionnelle ou les médecines alternatives, adhérant (ou pas) aux théories de la Terre plate et à l'existence des reptiliens. 


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    À son apogéeapogée, la pandémie mondiale causée par le SARS-CoV-2 nous a montré à quel point il était devenu difficile pour la plupart des gens de distinguer les connaissances fiables des hypothèses les plus fragiles dans le domaine de la santé. Malheureusement, cet état de fait précédait la pandémie et se poursuit encore aujourd'hui malgré les efforts de pédagogie qui ont été réalisés tant bien que mal par certains acteurs du monde médiatique et universitaire.

    Depuis lors, des franges de la population sont de plus en plus visibles et donnent de la voix. On les taxe facilement d'antivax ou de complotistes mais ces étiquettes ressemblent plus à des stéréotypes qu'à de véritables catégories scientifiques qui nous informent sur les différentes croyances (ou croivances, si on en croit l'essai récent Croiver, pourquoi la croyance n'est pas ce que l'on croit d'un chercheur en neurosciences et psychologie du complotisme contemporain, Sebastian Dieguez) de ces individus, leurs fonctions ou encore les raisons pour lesquelles ils y adhèrent de même que les influences que cela peut avoir sur leurs comportements. Aussi, on ne sait pas vraiment si cette visibilité accrue est due à une augmentation des objets assez hétérogènes que l'on rassemble sous le terme de « croyances complotistes » ou si elles sont simplement mieux tolérées socialement.

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    De fait, le domaine de la santé ne se limite pas à la pandémie et s'il y a une pathologie qui fait régulièrement l'objet de fake newsfake news, c'est bien le cancer et les causes de son apparition. À tel point que deux questionnaires standardisés existent dans le monde de la recherche pour évaluer des participants sur leurs connaissances vis-à-vis de ces causes.

    D'un côté, le Cancer Awareness Measure (ou CAM) tente de sonder notre compréhension des causes consensuelles du cancer : consommation de tabac, d'alcoolalcool, de viande rouge et de viande transformée, le niveau d'activité physiquephysique, les coups de soleil, l'histoire familiale, l'infection à des papillomavirus oncogènesoncogènes, le surpoidssurpoids, être âgé de plus de 70 ans et la faible consommation de fruits et légumes.

    Ne pas manger suffisamment de fruits et légumes est une cause reconnue de cancer. Cela favorise notamment la survenue du cancer colorectal. © Pixel-Shot, Adobe Stock
    Ne pas manger suffisamment de fruits et légumes est une cause reconnue de cancer. Cela favorise notamment la survenue du cancer colorectal. © Pixel-Shot, Adobe Stock

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    De l'autre, le CAM-Mythical Causes Scale (ou CAM-MYCS) tente de sonder notre adhésion envers des causes illusoires qui sont considérées sans danger par les autorités compétentes : boire dans des bouteilles en plastiqueplastique, manger des aliments contenant des édulcorants, des additifs ou des OGMOGM, l'utilisation du four à micro-ondesfour à micro-ondes, les aérosolsaérosols, les téléphones portables, les produits de nettoyage, vivre à côté de lignes à haute tensionhaute tension, le stressstress, avoir subi un traumatique physique et être exposé à des fréquences électromagnétiques ou à des radiations non ionisantes telles que le Wi-FiWi-Fi, la radio et la télévision. 

    Le flou règne autour des causes du cancer

    Dans une récente étude espagnole publiée dans le British Medical Journal, différents chercheurs en santé publique, épidémiologie, oncologieoncologie, psycho-oncologie, psychologie et psychobiologie cliniques ont fait passer ces tests à des participants sur InternetInternet. Cette méthodologie a des limites claires, comme le fait de ne pas pouvoir extrapoler les résultats obtenus à d'autres populations. Mais, grâce à sa simplicité, elle permet d'apporter des résultats préliminaires. Dans cet échantillon, on retrouve différents types de sous-population que les chercheurs ont distingué selon leurs croyances et attitudes. On y retrouve donc des personnes déclarant préférer la médecine alternative à la médecine conventionnelle, et inversement, d'autres déclarant croire en la théorie de la Terre plate et des reptiliens, certains sont vaccinés contre la Covid-19Covid-19, d'autres ne le sont pas. 

    Parce que non, tout ne cause pas le cancer et toutes les causes n'ont pas le même impact sur l'apparition de la maladie

    Les chercheurs observent plusieurs résultats intéressants. Le plus rassurant est que le score médian de l'ensemble des participants est plus élevé pour le CAM (63,5 %) que pour le CAM-MYCS (41,7 %) avec une conscience quasi unanime pour le tabagisme actif (97 % de l'échantillon) et une ignorance assez généralisée pour la faible consommation de fruits et légumes (moins de 25 % de l'échantillon). Le plus inquiétant est que 45 % des participants adhèrent à l'affirmation suivante : « Après tout, il semble que tout cause plus ou moins le cancer ». Une façon de dire que, certes, fumer tue mais après tout vivre aussi, alors à quoi bon ? On pourrait presque y voir l'expression d'un certain fatalisme qui se dissipe dans le flou ambiant concernant les causes du cancer et leur importance relative. Parce que non, tout ne cause pas le cancer et toutes les causes n'ont pas le même impact sur l'apparition de la maladie. 

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    Enfin, les investigateurs observent des différences significatives au score des deux tests selon les croyances et attitudes des participants. Globalement, les personnes qui ont déclaré ne pas être vaccinées, être conspirationnistes et préférer les médecines alternatives décèlent moins bien les causes reconnues du cancer, et elles pensent que certaines causes mythiques sont des causes réelles.

    Pour les auteurs, ceci constitue un argument qui suggère qu'il existe une connexion directe entre la désinformation en ligne, les croyances erronées des individus, ce qui peut, toujours selon les auteurs, diminuer l'adhésion à de futurs traitements et aux recommandations pour prévenir la maladie. Ces inférences sont des hypothèses d'interprétation des résultats de leur étude qui ne sont pas démontrées et devront faire l'objet d'études plus approfondies.