Les émissions de gaz à effet de serre et la dénaturation des sols risquent de pousser notre Planète bleue dans un état durablement dangereux « d’étuve », alertent des chercheurs. Pour eux, nous sommes proches d'un point de non-retour.

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    Si les calottes polairescalottes polaires continuent de fondre, les forêts d'être décimées et les émissionsémissions de gaz à effet de serre de battre chaque année des records (+ 2 % en 2017 pour le CO2 avec 41 milliards de tonnes émises), la Terre va franchir un point de rupture. Un basculement qui pourrait intervenir « dans quelques décennies seulement », ont prévenu les scientifiques qui ont publié leur étude dans la revue Pnas (Proceedings of the National Academy of Sciences) du 6 août 2018. Passer ce seuil signifie, selon eux, « une température de 4 à 5 °C plus élevée qu'à la période préindustrielle et un niveau de la mer 10 à 60 mètres plus haut qu'aujourd'hui ».

    « Une Terre étuveétuve est probablement incontrôlable et dangereuse pour beaucoup », selon les conclusions de scientifiques de l'université de Copenhague, de l'université nationale australienne et de l'Institut de recherche de Potsdam sur les effets du changement climatiquechangement climatique en Allemagne. Les rivières déborderaient, les ouragansouragans feraient des ravages sur les côtes et les récifs de corail disparaîtraient, le tout avant la fin de ce siècle, voire plus tôt. Les températures moyennes mondiales dépasseraient celles de toute période interglaciaire -- ces cycles séparant deux glaciationsglaciations -- depuis 1,2 million d'années. La fontefonte des calottes polaires provoquerait à elle seule une hausse très importante du niveau des océans, engloutissant des régions côtières où habitent des centaines de millions de personnes. « Des endroits sur Terre deviendront inhabitables si la "Terre étuve" devient une réalité », met en garde Johan Rockström, directeur du Stockholm Resilience Centre.

    Sur ce graphique, le nombre de journées de grosses chaleurs dans le monde entier depuis 1950. © NOAA

    Sur ce graphique, le nombre de journées de grosses chaleurs dans le monde entier depuis 1950. © NOAA

    L'idée qu’une hausse de 2 °C est un point de non-retour est nouvelle

    Les chercheurs suggèrent que le point de rupture pourrait être atteint lorsque la température de la Terre sera supérieure de 2 °C à celle de l'ère préindustrielle. Elle l'est déjà de 1 °C et continue d'augmenter à un rythme de 0,17 degré par décennie. « Un réchauffement de 2 °C pourrait activer d'importants éléments de rupture, augmentant ainsi encore davantage la température, ce qui pourrait activer d'autres éléments de rupture par un effet domino qui pourrait entraîner la Terre vers des températures encore plus élevées », prévient le rapport. Les experts s'inquiètent également de phénomènes comme les feux de forêt qui se multiplieraient à mesure que la planète se réchauffe et s'assèche.

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    Pourquoi limiter le réchauffement climatique à 2 °C et pas plus ?

    Cette étude a exploité de précédents travaux scientifiques sur les points de rupture de la Terre. Les scientifiques ont également examiné des périodes lointaines, comme l'ère du Pliocène il y a cinq millions d'années quand le niveau de CO2 dans l'atmosphère était de 400 parties par million, comme aujourd'hui (405 ppmppm en 2017). Durant le Crétacé -- la dernière période des dinosaures -- il y a quelque 100 millions d'années, le CO2 a même atteint 1.000 ppm, en grande partie à cause de l'activité volcanique.

    Déterminer qu'une hausse de 2 °C est un point de non-retour « est nouveau », selon Martin Siegert, codirecteur du Grantham Research Institute on Climate Change de Londres, qui n'était pas impliqué dans l'étude.

    Les « points de bascule » du climat, bombes à retardement. © Simon Malfatto, AFP, <em>Pnas</em>

    Les « points de bascule » du climat, bombes à retardement. © Simon Malfatto, AFP, Pnas

    Comment empêcher un emballement ?

    Il est nécessaire de changer immédiatement de mode de vie pour protéger la Terre, ont averti les chercheurs, expliquant que les énergies fossilesénergies fossiles devaient être remplacées par des sources à faibles, voire sans, émissions de CO2. Ils ont notamment préconisé une meilleure gestion des sols, de meilleures pratiques agricoles, la protection des terres et des côtes ou encore le développement de techniques de capture du gaz carbonique, planter des arbresarbres et arrêter la déforestation.

    Mais, même en cas d'arrêt des émissions de gaz à effet de serre (principalement le dioxyde de carbonedioxyde de carbone, le méthane et le protoxyde d'azoteprotoxyde d'azote), la tendance actuelle de réchauffement pourrait déclencher d'autres processus du système terrestre -- appelés rétroactions --, faisant davantage monter les températures. Parmi ces processus : la fonte du pergélisolpergélisol, la déforestationdéforestation, l'absence de couverture neigeuse dans l'hémisphère nordhémisphère nord, de banquisebanquise et de calottes polaires.