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Les observations des courbes de révolution des étoiles autour du centre de leur galaxie montrent qu'elles tournent trop vite (vitesse v, en ordonnée, en fonction de la distance r au centre de la galaxie), si l'on se base sur la loi de la gravitation de Newton ou sur la masse déduite de la luminosité des galaxies. © Gianfranco Bertone
Le statut de la matière noirematière noire en cosmologie est toujours quelque peu problématique, même si l'on a des preuves indirectes convaincantes de son existence, comme celle qu'a fournie Planck. Le débat à son sujet ne sera vraiment clos que lorsque l'on aura des preuves directes de l'existence des particules qui la constituent.
Il est douteux que le détecteur AMS nous fournisse de telles preuves dans un avenir proche. En attendant, comme on l'a vu avec les galaxies naines en orbite autour de la galaxie d'Andromède, la théorie Mond marque des points. Peut-être faudra-t-il donc remplacer la matière noire dans les simulations cosmologiques (comme DEUS)) par des modifications de la loi de la gravitation pour vraiment comprendre la formation des galaxies. Il se peut aussi qu'il faille combiner Mond avec le modèle de la matière noire froide (cold dark matter, ou CDM en anglais).
Actuellement, le modèle CDM repose souvent sur plusieurs hypothèses. La matière noire serait formée d'un seul type de particules et, en plus d'interagir très faiblement avec la matière baryonique, interagirait faiblement avec elle-même. Il résulterait que contrairement à la matière normale (qui peut se refroidir lorsqu'elle s'échauffe en s'effondrant sur elle-même pour former des galaxies ou des étoiles), la matière noire ne peut former que des structures sphériques en s'effondrant gravitationnellement.
Dans le cadre du modèle cosmologique standardmodèle cosmologique standard, si la matière noire a bien permis l'effondrementeffondrement rapide de la matière baryonique, elle doit donc rester sous forme de halos sphériques autour des galaxies spiralesgalaxies spirales (et même des galaxies elliptiquesgalaxies elliptiques) qu'elle a fait naître. Cependant, il n'est pas exclu qu'en réponse au champ de gravitation de la matière normale des disques galactiques, une partie de cette matière noire puisse se rassembler dans un disque.
Des astroparticules comme alternatives au LHC
Avec ses collègues de l'université Harvard, LisaLisa Randall vient de proposer elle aussi qu'une partie de la matière noire pourrait former des disques dans les galaxies... mais pour une tout autre raison. La physicienne est loin d'être une inconnue. On se souvient de la révolution que ses travaux ont entraînée à la fin des années 1990. Ils laissaient espérer que l'on pourrait observer des mini trous noirs au LHCLHC.
Hélas, ce ne fut pas le cas, et comme bien d'autres spécialistes en physiquephysique des hautes énergiesénergies, elle s'inquiète du fait que la découverte du boson de Higgs n'ait été accompagnée d'aucun signe d'une nouvelle physique au LHC. Cela pourrait bien vouloir dire que l'humanité est presque arrivée au pied d'un murmur infranchissable dans le domaine de la physique des particules élémentairesphysique des particules élémentaires, même avec un « Fermitron ».
Néanmoins, il reste de l'espoir en astrophysiqueastrophysique et en cosmologie. C'est donc probablement en cherchant à trouver des signes d'une nouvelle physique grâce à ces domaines que Lisa Randall et trois autres chercheurs viennent de publier un article sur arxiv.
La physicienne Lisa Randall est professeur de physique théorique à l’université Harvard. Sportive, elle pratique la varappe. On lui doit des livres de vulgarisation, ainsi que le livret de l'opéra Hypermusic Prologue, A projective Opera in Seven Planes, en collaboration avec le compositeur Hèctor Parra. © The Regents of the University of California, Davis campus
Selon les quatre physiciensphysiciens, la matière normale étant formée de divers types de particules, il se pourrait bien qu'il en soit de même pour la matière noire. En utilisant les contraintes issues des expériences de détection des particules de matière noire ou les observations de collisions d'amas de galaxiesamas de galaxies, il est tout de même possible de considérer que 5 % de la matière noire peut interagir avec elle-même. Si tel est bien le cas, elle pourrait se refroidir lorsqu'elle s'effondre, et composer une structure en forme de disque, par exemple dans celui de la Voie lactéeVoie lactée.
Atomes et photons noirs dans un univers parallèle
Il se trouve que plusieurs théories avec de la matière noire se comportant en accord avec les hypothèses de Lisa Randall ont été proposées depuis un certain temps, parfois de décennies. Prenons le cas de la théorie hétérotique des supercordes. Les groupes de symétrie de jauge du modèle standardmodèle standard y sont déduits du fameux groupe E8. Mais comme cette théorie des supercordesthéorie des supercordes postule deux groupes de symétrie E8 dans ses équationséquations, certains en ont déduit qu'il pourrait bien y avoir un monde de particules interagissant entre elles un peu comme dans le modèle standard, mais n'interférant avec le nôtre que par son champ de gravitation, ou peu s'en faut. Sur cette base, on a notamment développé la théorie d'un universunivers miroirmiroir occupant le même espace-tempsespace-temps que le nôtre.
Des variantes de ces idées conduisent à introduire une sorte de protonproton noir avec des électronsélectrons noirs portant l'équivalent d'une charge électrique, et capables d'émettre des photonsphotons noirs. Dans le cadre de cette théorie, ces particules de matière et de « lumièrelumière » se comportent comme la matière chargée normale, peuvent former des atomes noirs, mais en sont distinctes. À nouveau, on ne peut détecter leur présence que par le champ de gravitation qu'elles produisent.
Même si ces diverses théories peuvent émerger naturellement de théories plus vastes dont l'introduction est bien justifiée et naturelle d'un point de vue théorique, on ne peut s'empêcher de penser à bon droit qu'il s'agit là d'épicycles (c'est-à-dire d'explications construites à posteriori pour expliquer une observation). Toutefois, Lisa Randall et ses collègues n'excluent pas que la précision des mesures de la mission Gaia soit en mesure de nous révéler l'existence d'un tel disque de matière exotiqueexotique dans la Voie lactée. On verra bien...