Ce matin, une capsule Soyouz TMA-15 s'est posée au Kazakhstan, ramenant sur Terre trois membres de l'Expédition 21, qui viennent de passer six mois dans l'ISS. Avant de rentrer, le Canadien Robert Thirsk avait écrit une lettre aux Terriens. La voici.

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    L'Expédition 21, photographiée dans l'ISS peu avant le retour sur Terre. De gauche à droite, le Canadien Robert Thirsk, le Russe Roman Romanenko et le Belge Frank De Winne. © Nasa TV

    L'Expédition 21, photographiée dans l'ISS peu avant le retour sur Terre. De gauche à droite, le Canadien Robert Thirsk, le Russe Roman Romanenko et le Belge Frank De Winne. © Nasa TV

    Roman Romanenko, commandant de bord russe, Frank De Winne, de l'Esa, et Robert Thirsk, de l'Agence spatiale canadienneAgence spatiale canadienne, ont touché le sol de notre planète ce matin à 7 h 15 TU (8 h 15 en heure française) au Kazakhstan, après 188 jours passés dans la Station spatiale internationale (ISS).

    Deux jours avant, le 30 novembre, le Canadien avait envoyé une lettre, transmise par l'Agence spatiale canadienne, pour expliquer comment s'étaient déroulés ces six mois en orbite terrestre et ce que l'on ressent lorsqu'on revient à la maison.

    « Mes six mois à bord de la Station spatiale internationale ont passé à la vitesse de l'éclairéclair. Si on m'avait demandé d'y rester encore quelque temps, j'aurais pu le faire et continuer de bien travailler. Mais je commence à ressentir une certaine fatigue que même les fins de semaine, ni une bonne nuit de sommeilsommeil ne peuvent effacer. Le moment est venu pour moi de rentrer à la maison.
     
    La deuxième moitié de cette expédition a été tout aussi emballante que la première. Nos activités de septembre et d'octobre ont principalement porté sur le HTV, ce fantastique véhicule cargo japonais. C'est le matin du 17 septembre que nous avons aperçu le HTV pour la première fois. On aurait dit une pierre précieuse bleue et or, posée sur le bleu de l'océan en toile de fond. C'était très inspirant. Une fois le HTV arrivé à la station, nous nous sommes tout de suite mis à la tâche. Nicole Stott, aux commandes du Canadarm2, a saisi l'immense vaisseau cargo en vol libre à dix mètres de la station. Je me suis ensuite chargé de fixer le HTV à un port d'amarrage situé sur la face inférieure de la station.
     
    Quelques jours plus tard, à l'aide de notre bras robotiquerobotique canadien, Nicole et moi avons retiré une grande palette du véhicule HTV. Puis, dans une manœuvre chorégraphiée au quart de tour, nous l'avons transférée à Frank De Winne et au bras robotique japonais, qui l'ont installée sur le laboratoire Kibo.
     
    Après le départ du HTV, nous avons amarré un nouveau module russe à la station. Puis, la semaine dernière, la navette Atlantis et son équipage ont passé une semaine bien remplie avec nous. Cette expédition riche en action se termine en grand!
     
    Au cours des derniers mois, nous avons poursuivi nos activités d'entretien et de réparation. Le système de survie de la station nous a tenus bien occupés. Il y avait toujours quelque chose à réparer. Par exemple, notre dernier problème se rapporte au système de traitement de l'urine. Il est défectueux. C'est le système qui recycle notre urine en eau pure et potable. Nous avons déterminé qu'il faut faire venir de la Terre une pièce de rechange avant de reprendre nos travaux de réparation.

    Robert Thirsk, astronaute canadien, vient de passer six mois dans l'espace. © Agence spatiale canadienne

    Robert Thirsk, astronaute canadien, vient de passer six mois dans l'espace. © Agence spatiale canadienne

     L'aspect le plus gratifiant de mon expérience à bord de la station a été sans contredit la recherche scientifique. L'une des dernières expériences à laquelle j'ai travaillé parvient de l'Université Simon Fraser. Il s'agit d'une étude en génie des colloïdes désignée BCAT-5.  Les colloïdes sont de minuscules particules en suspension dans un liquideliquide, comme de la peinture, de l'encre ou encore du lait. L'expérience BCAT-5 vise l'étude des effets de la séparationséparation en phases sur la croissance des cristaux. Les résultats que nous en tirerons pourraient nous permettre de prolonger la duréedurée de conservation de certains produits et de raffiner les techniques de production du plastiqueplastique.
     
    J'ai également mis en place une expérience très intéressante en biologie végétale conçue par l'Université du Nouveau-Brunswick. On m'a demandé de plier en boucle des tiges de jeunes saules, de manière à favoriser l'étude des processus fondamentaux selon lesquels les plantes produisent de la cellulosecellulose et de la ligninelignine, les deux principaux matériaux de structure produits par les arbresarbres.
     
    Durant les moments plus calmes, j'ai eu le temps de réfléchir à certains aspects qui me tiennent à cœur. Aujourd'hui, je suis convaincu, plus que jamais, que l'exploration, l'innovation et les études supérieures sont des valeurs que notre nation doit continuer de véhiculer. L'acquisition de nouvelles compétences est essentielle à la poursuite de nos rêves personnels et de nos objectifs collectifs.
     
    J'ai aussi réfléchi aux avantages du travail d'équipe et de la coopération internationale. Les divers centres de contrôle de mission de partout au monde ont très bien collaboré entre eux et avec mon équipage. Malgré l'énorme distance qui nous sépare, nous avons travaillé comme une seule et même entité.
     
    Le 1er décembre, je reviendrai sur Terre avec deux de mes collègues astronautesastronautes. Après la mise à feufeu de son moteur principal, notre capsule SoyouzSoyouz traversera l'atmosphèreatmosphère comme un bolidebolide en feu, puis atterrira sous parachutesparachutes dans les steppessteppes du Kazakhstan. Plus tard ce jour-là, je rejoindrai ma femme et mes trois enfants à Moscou. J'attends ce moment avec impatience. La chose la plus importante après cette réunion remplie d'émotions sera de prendre une longue douche chaude (bien que mes enfants m'aient suggéré de le faire avant de les retrouver!). J'ai aussi très hâte de sentir les doux rayons du soleilsoleil sur mon visage et de me faire faire enfin une bonne coupe de cheveux.
     
    Ma réadaptation à la pesanteur se fera lentement et graduellement. Je pense qu'il faudra compter plusieurs semaines avant que mes muscles, mon cœur et mon sens de l'équilibre redeviennent comme ils étaient avant mon vol. De nombreux mois s'écouleront avant que mon ossature se remette du phénomène de la déminéralisation.
     
    Au terme de mon aventure à bord de la station, je ressens un sentiment à la fois doux et amer. Les défis que représente la vie dans l'espace me manqueront. Au cours de cette expédition, chaque jour apportait son lot de tâches qui m'ont permis de pousser mes capacités au maximum. Mais par-dessus tout, ce sont mes collègues astronautes qui vont me manquer. Il y avait entre nous une incroyable synergiesynergie.
     
    Je suis fier d'avoir contribué à l'établissement de la Station spatiale internationale en tant que laboratoire capable d'accueillir six personnes. La station est entièrement opérationnelle et elle vient d'entrer dans une ère glorieuse. Elle héberge une vaste gamme d'expériences scientifiques inédites qui ne peuvent être réalisées sur Terre.
     
    Maintenant que les objectifs de notre expédition sont atteints, je ressens une profonde satisfaction. Je tiens à remercier l'Agence spatiale canadienne de la confiance qu'elle m'accorde, et ma famille de son appui indéfectible.
     
    Enfin, merci à mes concitoyens canadiens et à mes amis étrangers qui ont suivi mon aventure. Les liens que nous avons tissés lors d'événements éducatifs, vos mots d'encouragement, vos photos et votre inlassable enthousiasme ont renforcé ma détermination. Vous m'avez inspiré à donner le meilleur de moi-même, comme l'exige cette vocation. Je vous en suis profondément reconnaissant. J'ai hâte de vous revoir au sol. »