Si la corrélation des paramètres orbitaux de la Terre avec les grands cycles glaciaires est certes aujourd’hui évidente, certains détails restent encore mal expliqués. Une nouvelle étude propose cependant de nouveaux modèles climatiques qui permettent de mieux comprendre l’influence précise de chaque paramètre orbital dans les cycles glaciaires ayant marqué le début du Pléistocène, il y a 1,6 million d’années.


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    En observant l'évolution du climat au cours de l'histoire de la Terre, on se rend compte que notre Planète a connu de nombreuses glaciationsglaciations entrecoupées par des périodes plus chaudes. Ces cycles climatiques présentent d'ailleurs une certaine régularité, que le scientifique Milutin Milankovitch (1879-1958) a attribuée aux variations de l’orbite terrestre.

    En effet, la rotation de la Terre sur elle-même et autour du SoleilSoleil est bien plus compliquée qu'il n'y paraît au premier abord. L'orbiteorbite terrestre se déforme au fil du temps sous l'influence des attractions gravitationnelles des autres planètes du Système solaireSystème solaire. Elle peut ainsi passer d'une forme quasi-circulaire à une ellipse plus allongée. On parle ainsi d'excentricitéexcentricité de l'orbite terrestre. De même, l'axe de rotation de la Terre oscille lentement, un peu comme une toupie sur le point de s'arrêter. Il s'agit de la précessionprécession. L'axe possède également une certaine inclinaison, qui varie de 22,1° à 24,5°. On parle d'obliquitéobliquité dans ce cas.

    Quel facteur dominant pour les cycles du début du Pléistocène ?

    Ainsi, excentricité, précession et obliquité font varier la distance de la Terre par rapport au Soleil, l'ensoleillement d'un point à la surface du Globe et le contrastecontraste entre les saisons. La combinaison de ces principaux facteurs astronomiques détermine l'évolution du climat au cours du temps et notamment la duréedurée des cycles glaciaires. Actuellement, ceux-ci sont d'environ 100 000 ans. Mais cette durée était bien plus courte au début du Pléistocène, il y a plus de 800 000 ans. Les cycles étaient alors d'environ 40 000 ans. L'origine de ce changement rapide de la durée des cycles a fait l'objet d'une récente étude dont nous vous présentions les résultats dans un précédent article.

    Évolution de certains paramètres orbitaux (précession et obliquité) en regard des cycles glaciaires (en bas). On note le passage de cycles courts de 41 000 ans à des cycles longs de 100 000 ans. © Watanabe et al. 2023, <em>Communications Earth and Environnement</em>, CC by 4.0
    Évolution de certains paramètres orbitaux (précession et obliquité) en regard des cycles glaciaires (en bas). On note le passage de cycles courts de 41 000 ans à des cycles longs de 100 000 ans. © Watanabe et al. 2023, Communications Earth and Environnement, CC by 4.0

    Une équipe de scientifiques s'est cependant penchée sur les cycles climatiques prévalant avant ce changement. Yasuto Watanabe de l'université de Tokyo et ses collègues se sont en effet intéressés à la période comprise entre 1,6 et 1,2 million d'années, qui marque le début du Pléistocène. Grâce à de nouvelles simulations numériquessimulations numériques du climat basées sur les théories les plus récentes concernant le forçage astronomique, les chercheurs ont pu reproduire avec une précision inégalée le cycle de 41 000 ans gouvernant le climat à cette époque.

    Les résultats ont été publiés dans Communications Earth and Environnement. Jusqu'à présent, les variations de l'obliquité étaient présentées comme le paramètre influençant majoritairement le climat au début du Pléistocène, l'ordre de variation de la précession apparaissant comme relativement faible et donc sans impact. Ce schéma ne permettait cependant pas d'expliquer correctement la durée de 41 000 ans des cycles glaciaires à cette période.

    Un angle de précession nul mais qui a son importance

    Les modélisationsmodélisations réalisées révèlent cependant l’importance de la précession. Elles montrent en effet que les déglaciations sont à chaque fois survenues lorsque la précession était minimale (la Terre oscille très peu sur son axe), et l'obliquité forte. L'angle de précession semble d'ailleurs être le facteur contrôlant, à l'inverse de ce que l'on pensait précédemment. Toutes les déglaciations étudiées sont en effet corrélées avec un angle de précession proche de 0° alors que l'angle de l'obliquité admet des variations significatives. Cette combinaison de paramètres contrôle également la géométrie et la taille des calottes glaciairescalottes glaciaires ainsi que la durée des cycles interglaciaires.

    Le phénomène de précession des équinoxes serait important pour expliquer les cycles glaciaires au début du Pléistocène. © Nasa, Mysid, Wikimedia Commons, domaine public
    Le phénomène de précession des équinoxes serait important pour expliquer les cycles glaciaires au début du Pléistocène. © Nasa, Mysid, Wikimedia Commons, domaine public

    Si l'affinement des paramètres contrôlant le climat permet ainsi de reproduire avec précision les cycles glaciaires de 41 000 ans du début du Pléistocène et donc de mieux comprendre l'origine des variations climatiques de notre Planète dans le passé, il s'agit également de résultats essentiels pour mieux anticiper l'évolution climatique future.