La découverte et l’étude balistique de nombreux petits cratères ont permis de remonter la trace d’un impact météoritique majeur survenu il y a 280 millions d’années. Il s’agit de la première identification de cratères secondaires sur Terre.


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    Dans le sud-est du Wyoming, aux États-Unis, des scientifiques ont découvert toute une série de petits cratères, de 10 à 70 mètres de diamètre. Imprimée dans des sédiments d'âge Permien (280 millions d'années), cette multitude de structures d'impact a d'abord été attribuée à la désintégration d'un important astéroïde lors de son entrée dans l'atmosphère. En effet, aucun cratère majeur n'est visible dans le paysage de la région environnante. Cependant, au fil des investigations sur le terrain, il est apparu que l'extension du champ d'impacts est bien trop vaste pour être expliquée par cette hypothèse.

    Une étude balistique pour remonter à l’origine des cratères

    Comme des détectives, les scientifiques ont alors conduit une étude balistique sur chaque petit cratère afin de remonter à son origine. Trente-et-un impacts ont ainsi été passés au crible mais plus de 60 autres structures pourraient faire également partie du champ de cratère. La distribution des impacts montre dans un premier temps que les cratères ne sont pas répartis au hasard : ils forment plusieurs petits groupes, qui définissent un corridorcorridor de 30-45° pointant dans une direction bien précise. Les cratères ont également une morphologiemorphologie spécifique en ellipse. Cette forme indique que les objets à l'origine des cratères ont percuté le sol avec un angle relativement plat. Ces données ont ainsi permis aux chercheurs de reconstruire la trajectoire des objets. Mises ensemble, ces trajectoires montrent un schéma radial : les objets à l'origine du champ de cratères proviendraient tous d'une source unique.

    Exemples de petits cratères observés dans le Wyoming (images prises par drone ou sur Google Earth). © Kenkmann et al. 2022, GSA bulletin, CC by license
    Exemples de petits cratères observés dans le Wyoming (images prises par drone ou sur Google Earth). © Kenkmann et al. 2022, GSA bulletin, CC by license

    Les marques d’un impact majeur

    L'ensemble des résultats montrent que les dizaines de petits cratères recensés dans le Wyoming ne seraient donc pas liées à la désintégration d'un astéroïdeastéroïde dans l'atmosphère mais résulteraient de blocs éjectés lors d'un impact majeur. Il s'agit donc de cratères secondaires, dispersés autour d’un cratère principal, sous forme d'une couronne d'éjectas. Si ce type de formation est très commun sur la LuneLune ou sur Mars par exemple, il n'avait cependant encore jamais été observé sur Terre.

    Cette absence est à associer principalement aux processus d'érosion, particulièrement efficaces sur notre Planète, qui ont tendance à gommer rapidement les traces des impacts météoritiques, surtout ceux de petite taille. L'activité tectonique et la sédimentationsédimentation font que la surface de la Terre est également constamment « rafraîchie », les anciennes cicatricescicatrices étant ainsi vite effacées. Il ne faut pas oublier également que la surface terrestre est, et a toujours été, principalement occupée par des océans. Il y a donc statistiquement plus de chance qu’une météorite tombe dans un océan que sur un continent, ne laissant ainsi derrière elle aucune trace, ou très peu.  

    Carte montrant la localisation des cratères secondaires et la position supposée du cratère principal (cercle blanc) suite à l'étude balistique. © Kenkmann et al. 2022, GSA bulletin, CC by license
    Carte montrant la localisation des cratères secondaires et la position supposée du cratère principal (cercle blanc) suite à l'étude balistique. © Kenkmann et al. 2022, GSA bulletin, CC by license

    Des blocs de plusieurs mètres projetés sur 200 km

    Le cratère principal à l'origine des cratères secondaires du Wyoming a d'ailleurs disparu. Grâce aux calculs des trajectoires et de simulations numériquessimulations numériques, les scientifiques ont réussi à modéliser la formation des cratères et à retrouver l'emplacement du cratère principal. Leurs résultats, publiés dans le bulletin de la Geological Society of America, suggèrent que le cratère principal, aujourd'hui enfoui sous des sédiments plus récents, faisait à l'origine 50 à 65 kilomètres de diamètre. L'impact météoritique aurait projeté des blocs de quatre à huit mètres de large sur 150 à 200 kilomètres, menant à la formation du champ de cratères secondaires. Les débris auraient ainsi percuté les sédiments encore non consolidés à une vitessevitesse de 700 à 1.000 m/s.