Depuis cinquante ans, trois milliards d'oiseaux d'Amérique du Nord se sont envolés dans la nature... volatilisés ! C'est ce que révèle une vaste étude conduite par des chercheurs qui considèrent ainsi qu'un quart de l'avifauve a disparu, un déclin considérable de la biodiversité où la responsabilité des activités anthropiques pèse lourdement, même si les causes sont loin d'être toutes comprises.


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    La population d'oiseaux d'Amérique du Nord s'est effondrée d'un quart depuis 1970, soit près de trois milliards de volatiles en moins dans la nature, estiment des chercheurs dans une étude d'ampleur publiée jeudi par la revue Science. Les oiseaux des campagnes sont les plus touchés, sans doute en raison de la réduction des prés et des prairies, et de l'extension des terres agricoles. L'utilisation de pesticides est aussi en cause qui, en tuant les insectes, affectent toute la chaîne alimentairechaîne alimentaire.

    Mais, plus inquiétant encore, les oiseaux des forêts et les généralistes (qui s'adaptent à une diversité d'environnement) sont aussi en déclin : 90 % des pertes concernent 12 familles d'oiseaux, dont des moineaux et bruants, des parulines, des merles ou encore le chardonneret jaune -- les espèces qui vivent aux États-Unis et au Canada ne sont pas les mêmes que dans d'autres régions du globe. Ces chiffres correspondent au déclin observé ailleurs et notamment en France, où l'Observatoire national de la biodiversité a estimé à 30 % le déclin des oiseaux des champs entre 1989 et 2017. 

    Le saviez-vous ?

    En Europe, les oiseaux communs, tels la perdrix grise, l’alouette des champs ou l’étourneau, ont subi depuis les années 1980 une diminution massive de leurs populations, avec une chute de 77 % des effectifs chez la tourterelle.

    Une paruline des prés, l'une des nombreuses espèces d'oiseaux en déclin en Amérique du Nord, à New York le 7 mai 2014. © Spencer Platt, Getty images North America, AFP
    Une paruline des prés, l'une des nombreuses espèces d'oiseaux en déclin en Amérique du Nord, à New York le 7 mai 2014. © Spencer Platt, Getty images North America, AFP

    Les causes du déclin sont loin d'être toutes comprises

    L'étude américaine combine deux sources de données. La première vient des relevés annuels réalisés chaque printemps, au moment de la saison de reproduction, par des milliers de bénévoles, selon une méthode identique, depuis 1970. Sur un itinéraire de route de campagne de 40 kilomètres, ces observateurs s'arrêtent tous les 500 mètres pendant trois minutes et comptent tous les oiseaux qu'ils voient. Les chercheurs compilent et analysent ensuite ces données.

    Tout est propre et mécanisé, il n'y a plus de place pour les oiseaux, la faune et la nature

    La seconde source vient des relevés de 143 stations radars qui détectent assez finement les massesmasses d'oiseaux pendant leur migration, la nuit. Plus de la moitié des oiseaux d'Amérique du Nord migre, soit vers le sud des États-Unis, soit vers l'Amérique centrale ou du Sud. Ces données radar sont moins précises mais montrent aussi une diminution de 13,6 % entre 2007 et 2017, avec une marge d'erreur importante de 9 points.

    Les canards et oies sont la grande exception : leurs populations, après avoir été menacées, ont augmenté depuis 1970. C'est grâce à la prise de conscience des chasseurs qui ont soutenu des mesures de protection, explique à l'AFP l'ornithologueornithologue Ken Rosenberg, de l'université Cornell et de l'American Bird Conservancy, l'un des principaux coauteurs de l'étude.

    « On observe la même chose partout dans le monde, l'intensification de l'agriculture et les modifications du paysage font pressionpression sur ces populations d'oiseaux, dit Ken Rosenberg. Désormais, on voit des champs de maïsmaïs ou d'autres cultures jusqu'à l'horizon, tout est propre et mécanisé, il n'y a plus de place pour les oiseaux, la faunefaune et la nature ».

    Les oiseaux se fracassent sur les fenêtres, une cause de mortalité loin d'être anodine

    Les causes sont mal comprises, mais les ornithologues évoquent d'autres facteurs, comme les chats laissés dehors, ainsi que les fenêtresfenêtres des maisons sur lesquelles les oiseaux se fracassent, une cause de mortalité loin d'être anodine : le nombre d'oiseaux tués dans ces collisions a été estimé en 2014 entre 365 millions et 1 milliard par an aux États-Unis.


     421 millions d'oiseaux européens ont disparu en 30 ans

    Article d'Andrea Haug publié le 11 novembre 2014

    En seulement trente ans, 421 millions d'oiseaux ont disparu du Vieux Continent pour une population totale estimée à 2 milliards d'individus. Si certaines espèces rares se portent mieux, les plus communes sont en revanche plus vulnérables.

    Les populations d'oiseaux européens subiraient une forte chute du nombre d'individus depuis les années 1980, rapporte une étude publiée dans la revue Ecology Letters. Ce sont les espèces dites abondantes qui seraient les plus menacées de disparaître, si cette tendance se poursuivait.

    Pour arriver à une telle conclusion, les auteurs de l'article scientifique ont analysé, dans 25 pays européens et sur trois décennies, des données de 144 espèces de volatiles : dans l'ensemble, la baisse d'abondance et de biomassebiomasse aviaire est avérée. En outre, elle est plus marquée chez les 36 espèces communes étudiées. Par exemple, 61 % des moineaux auraient déjà disparu. A contrario, les espèces plus rares montrent une augmentation globale de leur abondance et de leur biomasse en Europe.

    Les raisons précises d'une telle variabilité dans le taux de déclin des espèces communes et rares restent méconnues des chercheurs. « Les efforts visant à ralentir ce taux [global de déclin] ont porté avant tout sur les espèces rares qui sont les plus exposées à un risque d'extinction », mentionnent-ils en revanche. « Moins d'intérêt a été porté sur les espèces plus communes, malgré leur plus grande importance dans le fonctionnement de l'écosystèmeécosystème et pour les services rendus à l'Homme », soulignent-ils. En effet, ces oiseaux sont utiles à l'Homme en mangeant les parasitesparasites des cultures, en disséminant les graines ou encore en nettoyant la nature des carcasses d'animaux morts.

    L’intensification de l’agriculture moderne est une des causes avérées du déclin de l’avifaune européenne, indique une étude. © Owacle, <em>Wikimedia Commons</em>
    L’intensification de l’agriculture moderne est une des causes avérées du déclin de l’avifaune européenne, indique une étude. © Owacle, Wikimedia Commons

    Impact des activités humaines sur les oiseaux

    Selon les analystes, les causes responsables de la diminution globale du nombre d'oiseaux en Europe sont multiples et reposent avant tout sur l'impact des activités humaines sur l'avifauneavifaune : effets sur la santé des espèces de produits phytosanitaires et d'autres méthodes modernes d'agricultureagriculture intensive, disparition de leur habitat suite à la coupe de haieshaies ou le bétonnage des zones rurales et périurbaines, etc.

    « C'est un avertissement qui vaut pour toute la faune européenne, signale Richard Gregory, chercheur à la Société royale pour la protection des oiseaux, au Royaume-Uni et co-auteur de l'analyse. La manière dont nous gérons l’environnement est insoutenable pour nos espèces les plus communes. »

    Si la situation paraît critique, elle n'est pas pour autant irréversible. Alors que les aires protégées sont essentielles à la conservation des espèces rares et menacées, ces plans de gestion offrent peu de protection aux espèces les plus communes et les plus répandues, déclarent les scientifiques. Ils recommandent par conséquent que les programmes d'amélioration de l'environnement passent à une échelle plus large, notamment au travers de la mise en place de nouveaux schémas agricoles et de zones vertes en milieu urbain.